Intervention de François Liberti
Ce projet, fruit d’un réel travail, affiche des ambitions que l’on ne peut que partager. Pour l’essentiel cependant, le contenu de la feuille de route et des actions à mener sont à construire, notamment en raison des contradictions sur certains domaines avec les actions et les projets portés par l’agglo aujourd’hui.
Par exemple, et à propos de l’orientation n°3, laquelle vise à sécuriser nos ressources naturelles en ciblant la gestion de la ressource en eau potable, je crois que cela est mal parti si nous laissons la filière du Cycle de l’Eau en gestion privée (quasi-monopole de l’Entreprise Suez au gré de DSP…). Les indicateurs en matière de transparence, de rendement, de prix à l’usager) sont loin d’être optimaux, et ce, au-delà même du périmètre de l’agglo dans la région. Lors du Conseil Municipal de Sète, comme chaque année, nous avons pris connaissance du rapport d’Activité du Syndicat du bas Languedoc pour l’eau potable, gérée par Suez sur les années précédentes, c’est entre 3 et 4 millions de m3 de perte d’eau, entre le pompage et la distribution, TOUS LES ANS. Si on y ajoute les fuites sur les réseaux communaux, on atteint 6 millions de m3 de perte. Outre le fait que ces pertes sont facturées aux usagers, le gâchis sur la ressource est considérable et totalement incompatible avec le Projet de Territoire. Ce dernier devrait au contraire, porter l’ambition de mettre en chantier un grand projet public sur le gestion du Cycle de l’Eau.
A cet effet, nous pourrions acter le principe de la tenue d’Etats Généraux, sur la gestion du Cycle de l’eau, avec en conclusion, un référendum d’initiative citoyenne.
Par ailleurs, décrire le territoire de l’Economie Bleue de l’Occitanie, en traitant la pêche et la conchyliculture sous l’angle de l’aide à apporter aux métiers traditionnels (pêche et conchyliculture) pour adapter leur savoir-faire aux nouvelles technologies, et s’ouvrir aux métiers du futur, c’est beau à l’énoncé, mais c’est au nom de ces mutations et autres accompagnements technologique du futur, que certaines évolutions ont été catastrophiques.
L’histoire de ces 25 dernières années pour la pêche au thon, a conduit à une évolution technologique qui a fait grandir les flottes et modifier les techniques de pêche largement subventionnées par l’Europe. Cette évolution a conduit à ce que l’on sait, avec la destruction d’une partie de cette flotte moderne, qui n’avait pas plus de 8 ans d’âge, pour protéger la ressource.
L’exemple de la conchyliculture est également parlant. La filière a été poussée vers les naissains d’écloserie, parfois génétiquement modifiés, pour privilégier le commercial. La conséquence directe a conduit à la fragilisation du produit, avec des taux de mortalité massifs de naissains, au détriment de l’élevage de naissains naturels beaucoup plus résistants, que les professionnels, recommencent aujourd’hui et heureusement, à réutiliser.
Il serait plus innovant dans le Projet de Territoire, de porter l’objectif d’une spécificité méditerranéenne des métiers de notre littoral et lagunaire, qui existe réellement, que ni la France, ni l’Europe, dans leurs politiques de pêche, n’ont jamais reconnue, avec de graves conséquences à la clé.
Autres exemples :
-
Les menaces d’arrêt de la pêche à l’anguille par l’Europe, malgré les plans de gestion élaborés par les professionnels languedociens.
-
Les nouvelles décisions de réduire le temps de pêche pour la flotte chalutière, déjà considérablement réduite en nombre, en emplois, en jours de pêche autorisée.
-
La situation exsangue des « petits métiers » de la lagune, et les petites exploitations conchylicoles, dont les effectifs sont en chute libre.
-
La formation aux métiers de la mer au Lycée Maritime Régional de Sète, en raison de la réforme de la formation professionnelle.
La vraie innovation aurait été de défendre et valoriser la spécificité de notre littoral, et son inscription à notre patrimoine, plutôt que des mesures cosmétiques d’accompagnement.
Je pourrais également développer sur l’emploi avec la contradiction affichée avec votre projet de l’Entrée Est, déjà largement exposé ici, ou encore le Pôle de plaisance qui doit exclure toute nouvelle pression sur les lagunes et l’Etang de Thau.
Voilà les remarques que je souhaitais faire, et pour conclure, je dirais que l’enveloppe est jolie, mais il faut construire ce projet avec des pratiques nouvelles, en phase avec la réalité de ce qui vivent les principaux intéressés. Vous pouvez compter sur moi pour ne pas lâcher le morceau.