Dirigo Rataplan, c'est un condensé de jazz moderne à l'ADN 100 % newyorkais : Un djeun qui n'en veut, Devin Gray, à l'origine du projet et des compos, batteur aux futs complètement de traviole pour plus de vélocité, inventif, spectaculaire, trés jazz dans sa technique mais gros cogneur quand il le faut (New York est sans doute la ville qui a produit le plus grand nombre de batteur prodigieux sur le moule de Jim Black); autour de lui trois vieux de la vieille, directement issus de la scène downtown née dans les années 80, scène à qui l'on doit le jazz le plus excitant qu'on ait pu entendre après le free des années 60 et sa bifurcation vers la free music dans les années 70 : Mark Formanek à la contrebasse, Dave Ballou à la trompette, et le trés grand Ellery Eskellin. Autant dire que la qualité musicale qui ressort de tout ça est trés trés élevée.
On reste dans l'esprit d'un groupe comme Bloodcount de Tim Berne, qui reste mon préféré de cette scène. Mais sans le côté âpre, chaotique-et-dans-ta-face hérité du free guerrier 70's à la Brotzmann, et avec plus d'espace pour l'impro libre et le groove. La formule musicale est la suivante : des structures thématiques ambitieuses, de l'improvisation harmonique mais surtout des plages d'impro libre assez longues, mais qui s'enchaînent les doigts dans le nez avec le retour du thème ou des mises en place virtuoses. Rien ne sonne expérimental, personne ne hurle ou se la joue Merzbow-harsh noise croisé avec machine gun. Ellery Eskellin joue à la perfection la nuance piano, voire pianissimo à la frontière du son et du bruit blanc. On l'adore avec Han Bennink, Marc Ribot, Jim Black, mais il a trouvé dans ce groupe de quoi assouvir ses envies de nuances.
En Bref : Un parfait équilibre entre écriture savante et liberté dans l'improvisation. Le Jazz moderne et vivant.