6 janvier, épiphanie. A l’origine c’était la première date choisie par les pères et même les grands-pères de l'église pour la naissance du Christ.
Image : La befana
Allez savoir pourquoi leurs descendants, les fils de l'église donc, ont a mis la chose 12 jours plus tôt, le 25 décembre. On dit que ces 12 jours symbolisent le décalage des 12 mois lunaires de l’année auxquels il faut ajouter 12 jours pour obtenir les 12 mois solaires. Pour repiquer vos salades ce printemps il était donc conseillé de surveiller le temps qu’il fait le 29 décembre, pour tailler les arbres on surveillera le 2 ou 3 janvier. Attention : « Pluie aux Rois, blé jusqu'au toit, et dans les tonneaux, vin à flot. »
Dans le ciel, on a la Vierge et le Bouvier (berger du boeuf) ensuite le Lion de la tribu de Judas, celle de Joseph père de Jésus. Dans la Cancer on a les Anes qui en grec se dit Phatnè - la crèche. Les mages peuvent venir. Matthieu nous le relate :
1 Quand Iéshoua' naît à Béit Lèhèm en Iehouda, dans les jours du roi Hèrôdès, voici, des mages du levant arrivent à Ieroushalaîm et disent :
2 "Où est-il, le nouveau-né, le roi des Iehoudîm ? Oui, nous avons vu son étoile au levant, et nous venons nous prosterner devant lui".
…
10 Ils voient l'étoile et se réjouissent. Ils offrent l'or, l'oliban et la myrrhe.
C’est le zoroastrisme qui introduisit l’idée de la résurrection, associée à la venue du Saoshyant, le messie né d’une vierge. Plus tard, le Saoshyant devint l’envoyé d’Ahura Mazda, l’incarnation divine de Mithra dans un homme qui devra ramener l’âge d’Or. L’islam shiite fit du Saoshyant le 13ème imam. Comme quoi la superstition ne date pas d'hier.
Les liturgies syrienne et arménienne qui ont une nette tendance à l’exagération parlent de douze mages. Les théologiens y ont mis le haut-là. Il y avait trois mages un point c’est tout : Melchior, un vieillard à cheveux blancs et longue barbe. Il offre l’or royal. Gaspard, jeune imberbe, teint rougeaud offre l’encens. Balthazar un noir barbu, amène la myrrhe qui annonce la mort et Pâques.
Mais Alexandre Vialatte le grand en parle mieux que moi :
Il n’y a rien de plus beau que les Rois mages. Surtout de nos jours. Ils sont plus noirs et plus dorés. C’est le nègre que je préfère. C’est Balthazar. Surtout quand il a une robe verte. Et le chameau. Au XVIIIe siècle on n’aimait pas qu’il y ait le chameau. Cet exotisme était proscrit. On protégeait les valeurs nationales. Je ne sais plus quel illustre peintre avait logé un dromadaire dans une Adoration des mages, pour entrer à l’Académie. Le jury lui en ferma les portes. Le chameau, lui dit-on, « distrayait l’attention ». Il est pourtant dans Isaïe : « Lève-toi, Jérusalem, et brille… Les dromadaires te couvriront en foule, les jeunes chameaux viendront de Median et d’Epha. » Ainsi l’Orient saluait-il l’Occident. (La Montagne, 24 décembre 1957)
Et encore…
La poésie, c’est le début de l’année. C’est les Rois mages avec leurs couronnes d’or, l’encens, la myrrhe, les robes rouges, les robes jaunes, le chameau à l’oeil dédaigneux, avec son profil de vieille dame, et son cou comme un tuyau de pompe. Et le nègre ; surtout le nègre ; à cause de sa robe verte.
Et tout le mois de janvier est comme ça. Comme un Breughel ; les enfants qui patinent, la vapeur qui leur sort du nez, le ciel noir, la terre blanche, les peupliers tout nus ; le schlitteur en bonnet de fourrure ; rien de plus charmant que les images de l’hiver.
Surtout quand on les voit de l’auberge, à travers une petite fenêtre. devant un grog fumant où nage un citron pâle.
Quand on a eu bien froid et qu’on aura bien chaud.
(La Montagne – 9 janvier 1964)