J'ai un rapport amour/haine avec le vieil homme. Je ne suis jamais certain si il serait mon ami au civil ou si je voudrais lui péter la gueule comme je le ferais avec Donald Trump.
Eastwood adore le jazz tout comme moi. Et je dois avouer que j'ai aimé plusieurs de ses films. Facilement 12 (ne les ayant pas tous vus tout de même).
Clinton Jr est acteur, mais aussi réalisateur. J'ai un faible pour les créateurs à plusieurs chapeaux.
Qui ne sont toutefois pas toujours heureux.
là à Paris. Faisant les acteurs. Un événement de deux minutes étiré sur plus de 120.
Voici 12 de ses bons coups, selon mon regard à moi.
Honky Tonk Man (1982)
Voilà un héros de Western qui l'était quand c'en était la mode. Puis, dans les années 70, il jouait aussi les détectives aux méthodes dures. Mais là où Clint devient beaucoup plus intéressant pour moi c'est quand il verse dans l'intime. Le "petit". Qui parfois prend des allures de grandiose. Son road-movie, dans lequel il joue avec son fils Kyle, nous montre un chanteur de country tentant un dernier grand coup pour sa carrière. Bien que Clint eût goûté aux immenses succès d'Harry Callahan ou du cavalier du cheval sans nom, il brille beaucoup dans la sentimentalité des gens bien ordinaires, issus de lieux humbles. Il ne cherchait aucunement le large public. Les coeurs de quelques uns suffisaient. Trésor sous estimé des années 80. Humble.
La critique fréquente (mais juste) dans le talent d'acteur de Clint est de lui attribuer peu d'émotions, peu de variantes, étant plus poseur qu'excentrique, bien qu'il incarne souvent des gens qui ne font pas de sens. Dans ce film, il incarne toutefois le coloré John Huston pendant le tournage de The African Queen en 1951. Il explore les fonds de l'âme de manière habile dans un personnage qu'il ne jouera pas souvent. Et peut-être pour la première fois, il concentre plus d'efforts sur l'homme derrière la caméra que sur celui qui sera à l'image.
The Bridges of Madison County (1995)
Clint tournant l'adaptation du livre qui avait fait pleurer tout le monde? Vous voulez rire? Et bien pari réussi à l'été 1995. Il fait pleurer tout le monde à son tour. Développant son côté tendre et touchant, tout en incarnant le photographe Robert Kincaid auprès de la toujours excellente Meryl Streep. Un joli effort très cinématographique, loin des fusils. Près du coeur.
Près des fusils cette fois. Et toujours très léché au niveau de l'image. Choisissant sagement de tourner les deux côtés d'un même conflit, les deux fois avec une sorte de sagesse résistant à l'envie de faire de ses protagonistes d'unilatéraux héros binaires. Alors que les Drapeux de Nos Pères fonctionnait en flashback, Les Lettres de Iwo Jima nous plaçait au coeur de la guerre. Ayant lui-même incarné plusieurs formes de violence, il l'explore sauvagement, brutalement, mais avec beaucoup d'élégance et de sensibilité aussi. Renforçant son argument que peu importe la noblesse trouvée pour faire usage de la violence, son tribut est inévitable. Car la violence ne fait pas gagnants. Superbe accomplissement.
Pale Rider (1985)
Un western dans les années 80? Seul Clint pouvait se le permettre. Incarnant un autre cavalier sans nom avec moins de 20 répliques, un hommage à peine voilé au film Shane. Bien que les critiques eût dit alors que le film confirme le fait que le genre (western) devrait rester dans le passé, cet anachronisme de Clint reste aussi agréable qu'une ballade en cheval par un beau jour d'automne.
Même avec son curriculum vitae, Clint a eu toute la misère du monde à réussir à intéresser des investisseurs dans le projet qui lui fera faire plus de 220 millions et qui raflera 4 des 7 Oscars pour lesquels il était nommé, dont ceux de la meilleure actrice, du meilleur réalisateur et du meilleur film. Bien que le dernier acte eût choqué bien des groupes de pression pour son apparent défaitisme, le film reste un tour de force à bien des niveaux. Et le jeu des comédiens y est formidable.
High Plain Drifters (1973)
Seulement son second film derrière la caméra et tout un! Il revisite ce qui a fait de lui un héros de Leone ou Siegel, mais avec un cynisme et une violence et un humour dont Tarantino a surement été jaloux. L'ambiguïté morale y est fort intéressante au point que le très conservateur John Wayne lui aurait écrit une lettre colérique au niveau de ses choix.
Mystic River (2003)
Le livre de Lehane était assez formidable, le casting sous la direction de Clint parfait. Les Hommes comme les Femmes. Complexe, émotivement chargé, et réunissant le talent nécessaire pour en faire un thriller humainement mieux joué que la plupart des films issu des États-Unis.
Bird (1988)
C'est en me retapant le film de Clint sur la vie de Charlie Parker que m'est née l'idée de cette chronique. Épousant le jazz qui le passionne, mais aussi le parcours d'une déchéance, le héros qui fonce vers le mur. Un fameux effort et une audace à une époque où le jazz n'est plus au goût du jour.
The Outlaw Josey Wales (1976)
Un expert du révisionisme western, Clint prend la relève de Philipp Kaufman dans ce portrait qui fait de Wales, une innocente victime de soldats maraudeurs de la guerre civile. Kaufman fera entrer dans les contrats de la Guilde des Réalisateurs qu'il sera désormais interdit pour un acteur de passer derrière la caméra, en expulsant son réalisateur. Clint, pendant ce temps, tourne un de ses meilleurs efforts comme réalisateur.
Midnight in the Garden of Good & Evil (1997)
Encore une fois, le casting y est ici exceptionnel. La cinématographie de Jack N.Green, tout autant. L'adaptation du livre non-fictif, de John Berendt, racontant les excentricités autour du collecteur d'art Jim Williams et de son univers homosexuel, ainsi que l'histoire du meurtre de son assistant (un crime dont il sera accusé 4 fois, mais dont on le trouvera pas coupable au final) y est très jolie, en majeure partie grâce au somptueux décor de Savannah, en Georgie.
Unforgiven (1992)
7 ans après avoir traité du cowboy, il revient en force avec peut-être le dernier grand western en provenance des États-Unis. 4 Oscars plus tard, dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur acteur de soutien (Gene Hackman), le film sera enregistré comme culturellement, historiquement et socialement pertinent dans l'histoire des États-Unis. La déconstruction du genre est parfaite, le film est définitivement anti sentimental, le mythe est confondu, sa méditation sur l'âge, les réputations, le courage, la violence, l'héroïsme, au travers de son usé cowboy, présente ses meilleures performances d'acteur et de réalisateur.
Eastwood, mon meilleur ennemi.
Il y a un mois, il lançait un second effort sur grand écran, en 2018.