En France, nous avons ainsi vu successivement annoncer, ces derniers mois, la mise en place (d'abord par Arkéa [PDF]) des échanges entre particuliers avec la solution interbancaire Paylib, simplifiés par l'utilisation du numéro de téléphone mobile comme identifiant du destinataire, le lancement opérationnel du virement SEPA instantané (SCT Inst) du Conseil Européen des Paiements (EPC) et le déploiement de la plate-forme TIPS (Target Instant Payment Settlement) de la Banque Centrale Européenne.
Chacune de ces initiatives possède ses spécificités propres, mais toutes ont plus ou moins en commun de promettre aux consommateurs et aux entreprises d'exécuter des transactions en moins de 10 secondes entre deux comptes bancaires détenus dans des établissements participants au même dispositif (dans l'hexagone pour Paylib, dans l'espace SEPA pour les deux autres). Ils se positionnent de la sorte en alternative sécurisée et réactive aux règlements en espèces, par chèque ou par virement.
En réalité, la cible privilégiée des institutions financières est pourtant la carte et ses deux leaders américains, Visa et Mastercard. Les outils de virements instantanés sont donc souvent présentés comme de futurs supports au développement d'une alternative crédible, capable d'atteindre la même universalité. Or ce qui est mis en place (en ordre dispersé) pour l'instant correspond à l'infrastructure indispensable à la réalisation de cet objectif. Mais le plus difficile reste évidemment à accomplir… et à réussir.
En effet, la seule capacité à finaliser un paiement en quelques secondes ne constitue pas une révolution en soi. D'une part, la possibilité de transmettre des fonds rapidement existe depuis longtemps, non seulement pour un achat auprès d'une entreprise mais aussi pour des opérations entre particuliers (outre la carte, pensons à PayPal ou Lydia…). D'autre part, l'ajout d'une option de virement instantané dans les applications bancaires ne représente qu'un avantage marginal pour une majorité d'usages, ce qui risque de rendre difficile de justifier la facturation du service qu'envisagent les banques.
Avec les nouvelles options mises à leur disposition, les acteurs du secteur sont maintenant confrontés à deux défis majeurs. Le premier consistera à clarifier l'extraordinaire confusion que crée la multiplication des solutions, qui affecte déjà les médias et qui a toute probabilité d'en freiner l'adoption. Le second, plus critique et aujourd'hui largement ignoré, est l'exigence d'inscrire le nouvel outil de transfert dans une expérience utilisateur optimale, perceptiblement supérieure à celle qui pré-existe. Dans l'attente de progrès en la matière, on s'abstiendra de parler d'innovation…