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Faites attention. Amazon ayant vos coordonnées bancaires, veillez à ne pas accepter les crédits suggérés par Audible. Au troisième test, la plateforme vous prélève 9 €. Le procédé est un peu incorrect. Mais je suis finalement resté car cette nouvelle forme de lecture m’intéresse. Mais, soyons vigilants...
Sur Audible, la littérature africaine d’expression française n’existe qu’au travers des lectures des romans Alain Mabanckou. D’autres auteurs africains y sont présents, mais ils sont généralement anglophones et traduits comme Chimamanda Ngozi Adichie. Je vais donc en profiter pour me coller à quelques classiques européens. Comme l’écrivain russe Gogol. J’ai écouté trois fois sa nouvelle intitulée Le journal d’un fou. Il y en a pour un peu plus d’une heure lecture. Donc, on peut répéter l’écoute. Il faut dire qu’au niveau de la lecture audio, le gros souci, c’est l’inattention. 2 minutes de distraction et vous pouvez perdre le fil de la narration.
Gogol met en scène l’histoire d’un fonctionnaire russe qui sombre dans la folie. Avant d’aborder le sujet, peut être faudrait-il que je situe cet auteur russe d’origine ukrainienne, né en 1809 et décédé en 1852. Il fait partie de cette grande tradition d’écrivains russes s'inscrivant dans le sillage de Pouchkine et dans laquelle on trouvera Dostoïevski, Tolstoï et plus tard Bulgakov… Et je dois dire que lorsqu’on se place dans le contexte, je ne sais pas si un auteur s’était employé avec autant de brio à proposer l’univers complexe de la pensée d’un fou. Je me demande d’ailleurs si le personnage autiste, Benjamin Compson, du fabuleux roman Le bruit et la fureur de Faulkner ne tient pas un peu, d’un projet ambitieux de faire aussi bien que Gogol…
Un homme écrit dans un journal ses observations. Du moins, je pense que c’est lui qui écrit. Détail qui m’a peut-être échappé. Mais nous avons des éléments du journal. Une date de début. Octobre d’une année lambda. Une date de fin. Quelques mois plus tard. Le texte est écrit à la première personne. On suit donc notre homme dans ses observations. A la réécoute, je réalise que des indices de la folie sont présents dès le début du texte. Il décrit son environnement de travail. Il s’intéresse à la fille de son patron. En la rencontrant quelque part dans la ville, il constate que son chien parle… On se dit qu’on est dans un conte fantastique russe. Mais on réalise progressivement que c’est le personnage qui est complètement barge.
Ses remarques dépassent le cadre local. Il ne comprend pas la succession du trône d’Espagne dans la même période. Une femme va prendre le pouvoir, ce qui lui semble inconvenable. Il va se prendre pour le futur roi d’Espagne…
L’homme souffre. En suivant bien le texte, on réalise qu’il subit un traitement radical. En fait, c’est à une descente aux enfers à laquelle assiste le lecteur. Ce qui est étonnant, c’est le ton du narrateur. Parfaitement inconscient de sa démence. C’est donc à la fois dramatique et drôle, délicat et violent. S’inscrire donc dans la peau d’un fou et avoir le mot juste. De mon point de vue, du grand art.
Le journal d'un fou. GogolAudible. Lu par Patrick Blandin. 1h