Les Lilas (93)
Vendredi 14 décembre 2018. 20h30
Bartok Impressions est composé de
Mathias Lévy: violon
Matyas Szandaï: contrebasse
Milklos Lukacs: cymbalum
Lectrices passionnantes, lecteurs passionnés, j'avais manqué un concert du trio Bartok Impressions lors du festival Jazzycolors 2018 à Paris. Cette erreur est désormais réparée grâce à ce concert au Triton.
Ca tapote, gratte, grince. Puis le violon lance la danse. La contrebasse installe un tempo souple. Dialogue entre violon et cymbalum. Dans l'esprit du Mikrokosmos de Bela Bartok (1881-1945), des fragments de musique se succèdent, s'entrechoquent. C'est une beauté originale.
La contrebasse gémit sous l'archet. Le cymbalum installe une vibration mystérieuse. Le violon agace à volonté, ardent, aigu, vibrant. La tension monte. Elle se brise et repart aussitôt dans une autre direction. Solo de cymbalum. Ambiance château des Carpathes. Un petit conte léger s'élève entre les cordes pincées du violon et de la contrebasse et celles tapotées du cymbalum. Happés par la fraîcheur de la musique, des spectateurs toussent en rythme. Les notes du violon s'étirent doucement sous l'archet. C'est beau et calme comme des pas sur la neige dans la campagne.
Le premier morceau vient d'un duo pour violons. Le deuxième est d'origine inconnue. Le 3e est le " Romanian Dance Christmas Carol ". Toutes les compositions sont de Bela Bartok comme le nom du trio, Bartok Impressions, l'indique clairement.
Une œuvre tirée du " Mikrokosmos " (les exercices pour piano de Bela Bartok), cahier n°6 (donc d'un niveau déjà élevé puisque la difficulté des exercices va crescendo au fil des cahiers). Morceau très dansant, vif et festif. Ca sent la fête paysanne et la chevauchée dans la puszta. La machine se dérègle avec le cymbalum alors que la contrebasse garde le tempo. Retour à une mélodie commune pour le final.
Solo de contrebasse en introduction. Belle unisson du trio. La contrebasse impulse, le violon décolle et le cymbalum scande. Solo de cymbalum. Miklos Lukacs explore des sons neufs sur un instrument ancien. La contrebasse relance.
Solo de violon. Lui aussi cherche des sons. Du pizzicato à l'archet. Il amène quelque chose de plus doux sur lequel le trio enchaîne. En glissant, en vitesse. Duo percutant entre contrebasse et cymbalum. Le violon revient dans la danse.
Un extrait des " Danses roumaines ", de Bartok bien sûr. Mathias Levy nous explique le concept. Ils se sont intéressés à Bartok, pionnier de l'ethnomusicologie. D'abord à ses compositions; puis aux rythmes originels tziganes amenés par Miklos Lukacs. Tout d'un coup cela devient plus brutal, plus campagnard, plus libre aussi bref, plus tzigane. Ce trio devrait jouer avec Rick Margitza, saxophoniste ténor américain, résidant à Paris, descendant de Tziganes hongrois, dont le morceau fétiche se nomme " For the Gypsies ". La musique explose comme un feu d'artifice toujours plus haute, plus brillante, plus lumineuse.
Une ballade. Solo de cymbalum qui sonne comme la guitare électrique de David Gilmour. La contrebasse ronronne sous l'archet. Le violon vient ajouter sa douce plainte. Duo entre le cymbalum et la contrebasse à l'archet. Grave et profond. Tout à coup, le trio démarre. Violon et contrebasse en pizzicato alors que le cymbalum installe l'ambiance étrange de la pièce.
C'était une nouvelle pièce du Mikrokosmos. Le but est de se noyer dans l'univers de Bartok explique Mathias Lévy.
Un arrangement sur le 4e mouvement du concerto pour orchestre de Bartok. " Enfin! " s'exclame un spectateur taquin.Gageure que de jouer en trio une œuvre pour orchestre symphonique. La grâce et la majesté sont là. Mélodie jouée finement en solo par le cymbalum. Belle envolée du trio qui atterrit puis repart en douceur sur une mélodie orchestrale.
RAPPEL
Si nous n'avons pas tous compris à la première écoute, nous pouvons passer à la deuxième et plus si affinités grâce à l'album nous explique Mathias Lévy. Effectivement, il le mérite et sera prochainement chroniqué sur ce blog. Le trio Bartok Impressions est à savourer sur scène et en studio sans modération.