Ces poèmes sont extraits du recueil « A l’orient de tout », publié en 2005 chez Poésie/Gallimard et qui réunit cinq recueils de François Cheng.
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Au creux de l’aveugle abandon
Conduis-nous
Le long des filons
Vers où jaillit un jour
l’irrépressible désir
Creuset originel où tout se rejoint
Les corps rompus
n’y toucheront nuls confins
Les cœurs brisés
y battront sans fin
La mort ne sera plus notre issue
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Rondeur de la colline
– un instant de repos
Des remous telluriques -,
Mamelon du Désir
Qu’effleurent les rayons
Du couchant, bientôt mués
En brume de long regret.
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Entrer de plain-pied dans l’heure nocturne
L’heure du sommeil
l’heure de l’éveil
Dehors
Les saules ont séché leurs pleurs
Le bouleau s’est dévêtu
de sa laiteuse nostalgie
Au milieu du gazon, près des rocailles
Plus que le hibou vigilant
Un lys tient ouvert l’oeil du mystère
Retenant pour longtemps
le furtif rayon qui passe.
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Parfois les absents sont là
Plus intensément là
Mêlant au dire humain
au rire humain
Ce fond de gravité
Que seuls
ils sauront conserver
Que seuls
ils sauront dissiper
Trop intensément là
Ils gardent silence encore
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François CHENG