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La Collection Renault à la Fondation Clément

Publié le 09 décembre 2018 par Aicasc @aica_sc

Du 9 décembre 2018 au 17 mars 2019, La Fondation Clément présente un ensemble choisi  de la Collection RenaultPierre Alechinsky, Arman, Pol Bury, Robert Doisneau, Jean Dubuffet, Erró, Wen Fang,  Sam Francis, He An, Julio Le Parc, Jean-Luc Moulène, Angela Palmer, Robert Rauschenberg, Niki de Saint Phalle, Arslan Sukan, Takis, Jean Tinguely, Victor Vasarely, Heidi Wood.

La Collection Renault à la Fondation Clément

Jean Luc Moulène

La saison de la Fondation Clément offre traditionnellement au public une dizaine d’expositions liées à la Caraïbe comme les remarquables Buena Vista et Décolonisons le raffinement  cette année, autour de Cuba et d’Haïti. Il y a aussi chaque année une exposition exceptionnelle, ouverte sur le monde de l’art international et co- produite avec des institutions prestigieuses : Aimé Césaire Lam, Picasso nous nous sommes trouvés avec la Réunion des musées nationaux, Télémaque puis le Geste et la Matière avec le Centre Pompidou, Afriques: artistes d’hier et d’aujourd’hui avec la Fondation Dapper. 

En cette fin d’année 2018, c’est une sélection de la Collection Renault  qui ne manquera pas de séduire le public. Collection commencée par la régie Renault en  1967, à l’heure de la splendeur de l’industrie automobile. Le principe qui préside à sa constitution est original puisqu’il ne s’agit pas d’acquisitions mais d’une invitation aux artistes à venir créer des oeuvres d’art en lien avec le monde de l’automobile, au coeur de l’usine, avec les équipes techniques de la Régie. Après une brève éclipse à partir de 1985, la dynamique de la collection est réactivée en  1995 par des expositions à travers le monde et des acquisitions récentes.

La Collection Renault à la Fondation Clément

Jean Dubuffet

La collection Renault présente un échantillon très représentatif de la scène parisienne très cosmopolite en ce début des années soixante. Tinguely est suisse, Vasarely  hongrois, Takis grec, Alechinsky belge, Le Parc argentin, Erro islandais, Rauschenberg et Francis américains. Tous entrés dans l’histoire de l’art international.  Dans les années soixante, Paris attire. Paris bouillonne. L’expansion économique des Trente glorieuses et le changement de la société vis-à-vis de l’art moderne sont favorables à l’éclosion de l’art contemporain. L’Ecole de Paris s’essouffle. En 1964, la victoire de Rauschenberg à la Biennale de Venise explose comme un éclair foudroyant. Paris perdra bientôt sa suprématie de capitale de l’art. Cependant, sur place, des plasticiens venus des quatre coins du monde créent et inventent. Les œuvres et les mouvements artistiques qui émergent à ce moment là se sont inscrits depuis dans l’histoire de l’art.

La Collection Renault à la Fondation Clément

Sam Francis

Dans une région où il n’y a pas de musée d’art, cette exposition est fondamentale pour les professeurs, élèves et étudiants car elle offre un panorama pédagogique de plus d’un demi siècle d’art contemporain, puisqu’ au-delà des courants déjà historiques, elle se prolonge avec des œuvres très récentes de jeunes artistes français, australien, chinois. La collection Renault tient manifestement compte en effet de l’essor du marché de l’art chinois qui a bouleversé la géographie du marché de l’art mondial au cours de la première décennie du XXI ème siècle.

La Collection Renault à la Fondation Clément

Niki de Saint – Phalle

Les œuvres sont représentatives de six courants majeurs de l’histoire de l’art : Art Brut, Art optique, Art cinétique, Pop Art, Nouveau réalisme, Nouvelle figuration. Une visite de l’exposition permet d’aborder  des problématiques plastiques essentielles : le mode de représentation avec l’Art Brut et la Nouvelle figuration,   la problématique de l’objet avec  le Nouveau réalisme et le Pop art, la question du  mouvement, virtuel ou réel de l’œuvre  avec l’Art optique et cinétique  mais aussi la citation ou le remix avec Erro, la place du néon dans l’art avec He An ou encore l’intrusion des problématiques écologiques dans l’art avec Wen Fang.  C’est aussi l’occasion d’expliquer le fonctionnement du marché international de l’art et l’apparition dans les années 2000 de ce que l’on appelle les marchés émergents.

Par delà ces thèmes pédagogiques, restera le plaisir de la découverte, de la contemplation et de l’analyse. Pour en donner un premier exemple, comment résister à l’œuvre de Jean Tinguely, Requiem pour une feuille morte.

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Jean Tinguely est un artiste suisse emblématique du mouvement des Nouveaux Réalistes et tisse  un lien entre l’art cinétique et le nouveau réalisme en animant de mouvements des machines bringuebalantes et poétiques,  bricolées à partie d’éléments récupérés. En 1960, il participe à l’exposition Mouvement fondatrice de l’art cinétique  à la galerie Denise René,

Conçue en 1966 pour l’Exposition universelle de Montréal, Requiem pour une feuille morte est une sculpture monumentale, un gigantesque rouage de bois, cuir et métal, recouvert de noir.  C’est un relief transparent, ample et aéré, aux rouages sobres, quelque peu en opposition avec les machines bruyantes et insolites des années 60. Cette œuvre marque un tournant dans la démarche de Tinguely.

C’est un assemblage de tiges, de leviers, d’axes, de courroies, de roulements assemblés et peints en noir ce qui souligne les caractéristiques formelles de la sculpture. Elle semble moins insolite que les créations précédentes. Il n’y a qu’un seul moteur, derrière le troisième compartiment de gauche. C’est une machine presque muette en dépit de son titre, on perçoit un ronronnement discret et continu. A l’extrémité inférieure droite, une minuscule feuille blanche mobile. Tinguely  a dû résoudre des problèmes techniques : animer tous les rouages pour aboutir au mouvement de la minuscule feuille blanche. L’œuvre est surélevée sur une estrade cachée par des panneaux noirs. Des sources de lumière y sont dissimulées, créant  des contre-jours et ombres chinoises.

Eos et Bascule, placées en amont de Requiem,  sont des mécaniques qui fonctionnent mais qui ne produisent rien. Est – ce une critique de la société industrielle ? N’évoquent- elles pas les Temps modernes de Charlie Chaplin et l’humain broyé par la machine ou bien   le mythe de Sisyphe, condamné à  pousser éternellement vers  le sommet d’une colline  un rocher qui en dégringole systématiquement une fois parvenu au point culminant.

L’Aica Caraïbe du Sud vous fera  découvrir progressivement les multiples plaisirs que vous réserve cette exposition.

Dominique Brebion


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