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(Anthologie permanente) Gellu Naum, "Athanor", extraits, traductions inédites de Jean-René Lassalle

Par Florence Trocmé

220px-Liga_by_Gellu_Naum_2018_stamp_of_RomaniaUne nouvelle proposition de traduction de Jean-René Lassalle,
des poèmes d’Athanor du poète roumain Gellu Naum,
traduits en croisant l'original roumain
et la traduction allemande des poèmes par Oskar Pastior.

Le mur

J’avais un mur
devant mes yeux je le mis, il m’aveugla
mon oreille j’y apposai, j’en devins sourd
je m’appuyai contre lui, il m’épuisa
si je lui tendais la main il me frappait
si je tentais de le dépasser il m’humiliait
il était grand mauve et rectangulaire
un grand mur mauve rectangulaire
avec une unique fenêtre rectangulaire
ses entrailles exigeaient
l’écho des dents broyées par les mots
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968. Traduit par Jean-René Lassalle en croisant l’original roumain avec la traduction allemande d’Oskar Pastior.
Zidul

Aveam un zid
îl puneam în faţa ochilor şi mă orbea
îmi lipeam urechea de el şi mă asurzea
mă rezemam de el şi mă istovea
dacă întindeam mîna mă lovea
dacă încercam să trec mă umilea
era mare mov şi dreptunghiular
un zid mare mov şi dreptunghiular
cu o singură fereastră dreptunghiulară
sîmburii lui solicitau
ecoul dinţilor striviţi de cuvinte
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968.
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Exactitude de l’ombre

Chaque bouche bourgeonnait de feuilles suivant l’orbite d’un soleil dont le bruissement pouvait dans tous les cas être entendu distinctement.
Au commencement fut l’attente du dé. À travers les points des yeux, sous les erreurs de la brume et les escaliers sans début, fulguraient nos effigies intégrales.
Nous ignorions encore dans quel os il avait été sculpté mais sentions une parenté et acceptions le roulement carré de ce frère brutal et apaisant.
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968. Traduit par Jean-René Lassalle en croisant l’original roumain avec la traduction allemande d’Oskar Pastior.
Exactitatea umbrei

Fiecare gură înfrunzea după crugul unui soare ale cărui foşnete, în orice caz, se auzeau distinct.
La pornire, aştepta zarul. În ochii lui, printre falii de ceaţă şi scări fără început, fulgerau efígiile noastre totale.
Noi nu ştiam încă din ce os fusese croit, dar simţeam înrudirea şi acceptam rostogolirea pătrată a fratelui acestuia brutal şi liniştitor.
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968.
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Personne ne savait rien d’elle

Personne ne savait rien d’elle
lorsqu’elle dormait dans une boîte en carton
Tout dans la chambre était chaulé   Le vieux
papé-feu balbutiait pour lui-même
soleil et lune erraient maussades sous les poutres
sur la table reposait une racine de raifort
en raison de la faim blanche des parois
tout était tranquille   Les mots
traversaient les pierres comme les chaussettes
Alors je me glissai près d’elle dans la boîte en carton
sur sept tiges de paille
sur ses eaux verticales
me couchant en moi dans ma carcasse d’os
me couchant dans mes haches et mes coings
et partout ainsi dans le septième ciel
Elle m’aima et s’endormit en elle
dormit en moi dans sa boîte en carton
Il faisait un peu froid aussi papé-feu
nous enveloppa dans son balbutiement
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968. Traduit par Jean-René Lassalle en croisant l’original roumain avec la traduction allemande d’Oskar Pastior.
Nimeni n-o ştia

Nimeni n-o ştia
pe când dormea în cutia ei de carton
În cameră totul era dat cu var   Bătrânul
bunicul-foc bâiguia undeva
soarele şi luna treceau mohorâţi pe sub grinzi
pusesem pe masă un hrean
pentru foamea albă a pereţilor
totul era liniştit   Cuvintele
intraseră în pietre şi în ciorapi
Atunci m-am culcat lângă ea în cutia ei de carton
pe şapte fire de paie
pe apele ei verticale
m-am culcat în mine în oasele mele
m-am culcat în topoarele şi în gutuile mele
în pretutindeni în al şaptelea tron
Ea mă iubea şi dormea în ea
dormea în mine în cutia ei de carton
Era cam frig şi bunicul-foc
ne-a învelit în bâiguielile lui
Source : Gellu Naum : Athanor, Bucarest 1968.
Choix et traductions inédites de Jean-René Lassalle, décembre 2018


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