Me voici
voyageur obstiné
ne trouvant le repos qu’en présence du péril
disposé entre les pierres chutées par milliards
dans la toundra
—
Me voici
saltimbanque obligé
dans la splendeur juteuse des camarines
attentif aux simulies en quête de sang
de cou et d’oreilles
amoureux d’une perdrix aux yeux noirs
de chaque truite qui cherche à mordre mon canot
—
Me voici
coureur de froid et de nord
avec une histoire de parlures métissées
histoire cassée de bois et de portageurs
cherchant les paroles qui jouent avec le vent
—
Dans une tente ronde
je rêve de la meilleure métisserie qui soit
mangeant du lagopède
cuit par une grand-mère ridée sur un feu d’amour
—
Me voici
dans ma langue à venir
univers d’épinettes serrées
—
Enlacé aux écorces
j’attends le meilleur pour courir chanter frémir
voler dans de grands canots rouges
vers les plus divins enchantements
—
Jean DESY, Chez les ours, Mémoire d’encrier, 2012