Chroniques de l’ordinaire bordelais. Épisode 288

Vie des livres

Jeudi 8 novembre, sur un canapé rouge abandonné dans la rue depuis quelques jours, quelqu’un a vidé sa bibliothèque, offrande à chaque passant, qui n’est pas un acte isolé. En effet, les livres ne se jettent pas, ils se partagent.

Bien sûr, il y a les « Boîtes à livres » qui fleurissent dans les villes mais bien souvent, les ouvrages les plus intéressants ont été dérobés, leur contenu finit par s’avérer médiocre. Une exception, la « librairie à ciel ouvert » du SDF du palais des sports qui, à peine évacuée et détruite par la mairie, information relayée par Sud-Ouest, France 3 Nouvelle-Aquitaine…, a été reconstituée par une forte mobilisation riveraine et citoyenne, et offre des livres de qualité.

Bref, là sur ce canapé rouge, il y a des piles et des piles de livres, romans, guides de voyage, essais… qui recouvrent jusqu’au dossier. Un père et sa fille font le tri, j’en prends quelques-uns, transférés à la libraire précédente, alerte une amie qui vit à proximité… A quelque distance, un homme observe la scène, je me demande s’il s’agit d’un curieux ou du propriétaire heureux.

Deux jours plus tard, voici ce qu’il reste sur environ 200 livres. Ils n’apparaîtront dans aucune statistique, commerciale ou relative aux pratiques de lecture… Curieuse, je regarde le titre des livres sans acquéreur : un sur Napoléon, Sainte-Hélène. La mort de l’empereur, un roman : Recherche d’une église, un titre mystérieux : Crise de l’homme, et ce qui doit être un essai, Fidélité à la France…

Ils parlent à la fois des goûts du donateur (juste une partie) et de ceux des préleveurs…

Colette Milhé