Quelle réalité chacun d’entre nous projette t – il sur le terme La Caraïbe ?
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Vidéo : Monique Mirabel
Deux expositions d’art contemporain de la Caraïbe, d’envergure internationale, Caribe insular : exclusión, fragmentación y paraíso (1998) et Relationnal undercurrents : caribbean contemporary art (2017), conçues à vingt d’intervalle, véhiculent des visions contradictoires de la Caraïbe. Le premier titre, Caribe insular : exclusión, fragmentación y paraíso, présente la Caraïbe comme un paradis fragmenté alors que le second l’envisage plutôt comme un archipel en connexité. Cependant la Caraïbe apparaît toujours comme un carrefour du monde comme l’indique un troisième évènement, Caribbean croossroads of the world (2012).
La Caraïbe n’est pas uniquement une étendue multi-ethnique ou un groupe d’îles qui se différencie par la langue ou par les catégories Grandes et Petites Antilles, îles au vent ou sous le vent ? La Caraïbe est un méta-archipel culturel sans centre et sans limites, un chaos dans lequel se trouve une île qui prolifère indéfiniment. (Benitez-Rojo, Une île qui se répète, A repeating island)
Et Stuart Hall insiste sur l’expérience de similarité et de différence que vit le visiteur dans l’arc antillais. Les îles sont à la fois semblables et différentes.
Aujourd’hui, la Caraïbe est considérée comme une zone ethno- historique ou comme une région socio-culturelle, en référence à la Caraïbe des plantations.
L’inclusion de plus en plus généralisée de la diaspora caribéenne permet la conceptualisation de la Caraïbe en tant que communauté transnationale. Ce qui implique que, si la population actuelle des territoires caribéens est de 42 millions de personnes, la population de la communauté transnationale caribéenne atteint le double.
Comment mieux appréhender la réalité géographique, historique, économique, culturelle de ce territoire avant de s’intéresser à sa production artistique contemporaine ?
Est-il possible de parler d’un art caraïbe ? Oui, on peut. Je peux l’affirmer sans l’ombre d’un doute cependant non en raison de tendances esthétiques mais bien par le constat d’opinions partagées, de sujets en relation et de poétiques adjacentes qui expriment tout à fait les pulsations de l’environnement où nous vivons. (Alvaro Medina )
Il n’existe pas de définition unique et précise de la Caraïbe. Ce terme inventé au XXème siècle, en permanente réévaluation ou réinterprétation, désigne un espace à géométrie variable à forte hétérogénéité culturelle, linguistique, socio-économique et politique. C’est une réalité géo- historique qui s’étire sur près de 3500 kilomètres d’est en ouest et sur un peu plus de 2000 kilomètres du nord au sud. Elle représente 235 830 km2 de terre émergée, pour 42 millions d’habitants La perception et la délimitation des frontières de la Caraïbe fluctuent en fonction des points de vue. Leurs désignations ont été souvent modelées par des facteurs politiques.
La Grande Caraïbe
On désigne par Petites Antilles la partie méridionale de l’Arc antillais qui s’articule entre Iles au vent et Iles sous le vent. On les oppose aux Grandes Antilles, des archipels qui couvrent 90 % de la surface totale de toutes les îles : Cuba, Haïti, la République Dominicaine, Jamaïque, Porto-Rico. A l’époque des Grandes découvertes, la région était désignée comme les Indes occidentales ou West Indies
La notion de bassin caribéen apparaît vers les années 1770 afin de désigner la mer située entre l’Amérique du sud et l’Amérique du nord. Elle corrobore l’idée d’une Méditerranée américaine, d’un monde terrien discontinu unifié par la mer.
D’autres appellations, Caraïbe insulaire, Caraïbe continentale soulignent les contrastes qui caractérisent l’archipel. La Caraïbe, c’est donc tout cela à la fois, des îlots minuscules, des atolls, des îles si vastes qu’on n’en voit pas les limites, des espaces continentaux. Il y a une diversité de la superficie des territoires : Cuba est une île cent fois plus vaste que la Martinique. Il y a une diversité des densités de population : les onze millions d’habitants de Cuba forment contraste avec les mille huit cent vingt quatre âmes de Saba dont la capitale Bottom abrite cinq cents personnes. Il y a une diversité des situations : des îles–états (Barbade, La Dominique) ; des états bi-insulaires (Trinidad & Tobago, Saint Kitts & Navis) ; des archipels (Les Bahamas) ; des îles bi-étatiques (Haïti et la République Dominicaine, Saint-Martin et Sint Maarten) ; des îles dépendantes d’une métropole européenne (Martinique, Curaçao, Iles Caïmans) ; un état associé aux Etats – Unis (Porto Rico) ; des archipels divisés (Iles Vierges britanniques et îles vierges américaines).
Il n’y coexiste pas moins de sept statuts politiques distincts : des états souverains mais aussi des territoires associés aux Etats – Unis, des territoires d’outre- mer du Royaume-Uni, des départements et régions d’Outre – mer, des collectivités d’outre – mer, des territoires autonomes au sein des Pays – Bas ou des communes à statut particulier.
Chacune de ces anciennes colonies a connu une évolution vers son statut d’aujourd’hui à son rythme particulier. Dès 1804, Haïti devient la première République noire. Mais il faut attendre la fin du XIX ème siècle pour que s’instaure la République Dominicaine en 1844 puis que la République de Cuba soit officiellement proclamée en 1902, après la guerre révolutionnaire d’indépendance commencée depuis 1895. C’est après la seconde guerre mondiale que le Royaume – Uni s’engage dans une décolonisation graduelle et onze nouveaux états insulaires voient le jour. Les anciennes colonies françaises deviennent départements en 1946 tandis que Porto Rico demeure depuis 1952 un Etat libre associé aux Etats – Unis. Les Antilles néerlandaises, Les Iles Vierges américaines restent liées à leur métropole d’origine sous des formes variées.
La Caraïbe insulaire