À la suite de la publication des photos gagnantes du concours que j’organisais à l’occasion du Salon de la Photo à Paris, vous avez été plus de 80 à laisser un commentaire.
Déjà, merci !! 🙂
Ensuite, parmi ces nombreux commentaires, certains demandaient à ce que j’explique pourquoi je n’ai pas retenu toutes les autres photos. Alors bien sûr, sur 320, je ne vais pas commenter chacune d’entre elles. Par contre, j’ai déterminé quelques grandes catégories dans ces photos non sélectionnées.
C’est ce que je vous propose de découvrir ! 🙂
Quelques précisions
Toutes les critiques que vous allez lire dans cet article sont des commentaires non pas destinés à descendre gratuitement des photos, mais destinés à comprendre pourquoi elles ne fonctionnent pas. Au sens de ne pas sortir du lot parmi 320 photos (le nombre de photos reçues pour le concours que j’ai organisé ici).
Autre chose.
Ces critiques (constructives donc, vous l’avez compris) n’engagent que moi et n’ont pas valeur de vérité absolue. N’oubliez pas que la photographie animalière s’inscrit dans le cadre plus général de la photo, et donc de l’art. C’est une discipline artistique. À ce titre, TOUT est acceptable ! Chaque photo a autant de valeur dans l’absolu que n’importe quelle autre photo.
Cependant, il existe des canons esthétiques, des règles artistiques qui, si elles ne sont pas respectées, réduisent drastiquement les chances que votre photo retienne l’attention des spectateurs.
C’est ainsi. L’art est aussi ancien qu’homo sapiens sapiens, et depuis le temps (des milliers d’années donc), les centaines de générations d’artistes qui se sont succédées se sont mis d’accord sur des espèces de conventions artistiques. Pas pour emmerder contraindre les artistes, mais parce que les utiliser donne à l’oeuvre visuelle un vrai pouvoir d’attraction.
Et quand ces règles là ne sont pas utilisées, il est très probable que les membres d’un jury ne retiennent pas votre photo.
Mes critiques de vos photos de concours
Photo #1 – la photo plongée
Cette photo est assez représentative du point de vue utilisé en majorité par ceux qui débutent en photo. Il s’agit du point de vue en plongée.
La plongée, (…) est une représentation dont le point de vue est situé au-dessus du sujet (…) la forte plongée est réputée diminuer le personnage, le rendre pitoyable?
(lire l’article complet sur Wikipédia)
Photographier en plongée, en se plaçant au-dessus du sujet est donc un choix artistique fort. Quand on choisi ça, il y a une volonté du photographe de montrer son sujet en position de vulnérabilité. Ce qui n’était manifestement pas le cas de l’auteur de cette photo.
Dans l’immense majorité des cas, en photo animalière, le but du photographe est de magnifier ses sujets naturels. De rendre hommage à leur beauté cachée en quelque sorte. Il n’y a donc aucun intérêt, dans le cas de cette photo, de photographier en plongée.
Comprenez bien que je ne dis pas que photographier en plongée est mal. Je dis que choisir ce point de vue par défaut est une erreur.
Ce qu’il aurait fallu faire ? C’est très simple, se mettre au ras du sol pour donner à cette sauterelle toute l’importance qu’elle mérite. Comme sur cette photo par exemple (qui n’est pas celle d’une sauterelle, mais ça fonctionne quand même 🙂 )
Ensuite, il y a un autre défaut présent sur cette image. Celui de couper des parties importantes du sujet. Ici, les antennes.
Et c’est parfaitement compréhensible. On est l’oeil dans le viseur, on pense à ses réglages, on fait super attention à la netteté et puis, bing, on ne regarde plus sur les bords de la scène. C’est le drame ;-), les antennes sont coupées (et les pétales de fleur aussi).
Autant il est, à mon avis, tout a fait possible de choisir un point de vue en plongée pour défendre une intention photographique, autant, couper une partie du corps d’un animal n’est pas « défendable » artistiquement. Sauf à faire un portrait très très serré, auquel cas, couper les oreilles d’un mammifères ou les antennes d’un insecte est faisable.
Je vous rassure, ça m’arrive aussi souvent. Pourtant vous le ne voyez pas dans mes publications comme sur mon compte Instagram. Pourquoi ? Parce que ces photos ratées vont direct’ à la poubelle.
Voici d’autres photos qui utilisent à mauvais escient la plongée (enfin, c’est comme ça que je l’interprète, je me trompe peut-être)
Photo #2 – La photo naturaliste
Peut-être n’ai-je pas été assez clair dans la description de mon concours photo. Il s’agissait d’un concours de belles photos. Comprenez de photos dont le seul et unique but est de rendre compte de la beauté du monde animal.
Ce genre de photos est l’exacte contraire d’un autre genre, celles dites naturalistes. Celles qui servent à décrire une espèce vivante ce sont des images-outils.
Elles ont parfaitement leur place dans la photo animalière … mais dans une sous-section qu’on pourrait appeler : photo animalière scientifique.
Toutes les images que j’ai reçues entrant dans cette catégorie étaient éliminées très vite. Et que je sache, tous les concours de photos animalières font la même chose. En gros dès vous participez à un concours photo, le jury attend des photos animalières artistiques, pas naturalistes.
Comme celle-ci par exemple.
Vous voyez, un scientifique ne peut rien faire de ça. Mais un jury de concours, oui ! 🙂
Voici à présent trois photos (et il y en avait d’autres) que j’ai d’emblée rangées dans la catégorie photos naturalistes.
Photo #3 – La photo « c’était pas le bon jour »
Il est évident que mon humeur du moment me fait choisir une photo plutôt qu’une autre. Et si vous vous dites « je ne comprends pas pourquoi ma photo n’a pas été prise » il y a de grandes chances pour qu’elle soit concernée par ce paragraphe !
Que voulez-vous … vous pourrez faire la plus belle photo du monde et avoir tout mis en oeuvre pour maitriser tout ce qu’il était possible de maîtriser, il reste des éléments sur lesquels vous n’aurez jamais la main.
Comme la journée que je viens de passer juste avant la sélection. Ou des évènements particuliers que j’ai vécus quelques jours avant. Toutes ces petites choses de la vie qui influencent les décisions d’un jury. Et ce d’autant plus s’il est tout seul !
Tenez, je vous raconte ma vie. Nous avons adopté un jeune chaton le mois dernier. Il est craquant, tout mimi, tout rigolo. Alors quand je vois passer la photo des deux lionnes encadrant un lionceau, j’y suis très sensible ! Et en toute franchise, je suis quasi certain, en prenant du recul, que je ne l’aurais pas gardé il y a de ça deux mois. Ce qui n’enlève rien à la beauté de cette image hein !!!
Je peux aussi en avoir assez de voir 150 photos de cerfs et de chevreuils en ce moment quand je fais ma veille photo. Ce qui explique pourquoi je n’ai gardé qu’une seule photo de cervidés alors que j’en ai reçu une trentaine (dont certaines ne déméritaient franchement pas !)
C’est donc un conseil que je vous donne si vous participez souvent à des concours photos. N’envoyez pas un sujet qui correspond au sujet photo de la période de l’année. Aux mois de septembre-octobre, je suis prêt à parier qu’une photo sur quatre est un brame de cerf. Sortez du lot, surprenez le jury avec un sujet qui détonne !
Tout ça pour vous dire qu’il n’est pas nécessaire de vous remettre en question totalement. 🙂 Peut-être est-ce ce qu’on appelle le « destin », ou la réussite …
Voici quelques photos qui sont très bonnes, que j’aurais parfaitement pu garder en d’autres temps, circonstances.
Photo #4 – La photo avec des éléments gênants
J’aime que mon regard soit attiré comme un aimant au sujet principal de la photo. J’aime que mes yeux soient guidés, pris par une espèce de main virtuelle et amenés pile là où l’auteur le souhaite.
Je dois être fainéant. Je ne supporte pas d’avoir à fournir un effort pour chercher où il faut regarder. Si c’est le cas, pour moi la photo est ratée : l’auteur n’a pas su communiquer son message. Il n’a pas réussi à me montrer ce qu’il avait derrière la tête (ou le viseur, du coup).
C’est précisément ce que je ressens quand des éléments gênants dans le cadre viennent contrarier ma lecture de l’image.
Tout détail secondaire qui ne sert en rien le sujet principal est une cause supplémentaire d’élimination possible.
Une tige qui part dans le sens opposé au regard d’un animal est un exemple. Ou encore un gros point rouge de fleur floue en fond qui fait tâche.
Comment remédier à ça ? Pas d’autre choix que d’y être hyper attentif dès la prise de vue. On revient au coup des pattes coupées de la sauterelle en début d’article. Une petite erreur d’inattention lors de la composition et de l’agencement des élément de la scène peut ruiner une photo.
On fait souvent ces erreurs là parce que le cerveau est saturé de choses à faire sur l’instant : cadrer, régler, mise au point, zoomer/dézoomer, profondeur de champ, déclencher … ça fait beaucoup de trucs à faire en quelques secondes !
Vous devez donc vous délester de toute la partie technique, des réglages de base à faire en photo animalière. Quand la technique est automatisée, alors vous pouvez vous concentrer sur le cadrage, la composition et le choix d’intégrer, sciemment, tel ou tel élément.
Voici des photos non retenues pour ces raisons.
Photo #5 – La photo « sans sujet apparent »
Je ressors à nouveau mon coté fainéant.
Quand je regarde une photo, il faut que le sujet choisi par l’auteur me saute aux yeux. Si ça n’est pas le cas, je passe mon tour. Dites-vous qu’un jury de concours photos, où même un spectateur à qui on soumet de nombreuses photos pour avis, au bout d’un moment, son esprit est saturé d’images. S’il doit faire une effort pour trouver le sujet, ça l’embête.
C’est exactement ce qu’il se passe quand un correcteur entame sa 102 ème copie de bac philo et trouve sous ses yeux une écriture de cochon.
Quand vous prenez une photo, vous devez toujours vous débrouiller pour que votre sujet soit clair, net et précis. Peu importe ce sujet : votre enfant, votre chat, un renard, un paysage, une église, …
C’est ce qu’on appelle l’intention photographique, et c’est essentiel en photo.
Voici quelques photos où le sujet n’est pas apparent au premier coup d’oeil (encore une fois, d’après mon interprétation).
Les 7 photos qui auraient dû en être
Non, vraiment, pour certaines photos, je ne saurais dire pourquoi je ne les ai pas prises.
Enfin si. Je sais. En accord avec mes collègues de Nikon Passion et de Photo Passion, je ne pouvais en garder que 20 … et j’ai dû négocier ferme pour en avoir 3 de plus.
Pour tout vous dire, en accord avec mes critères de sélection, il y avait réellement 30 photos sélectionnables. Donc 7 de plus.
C’est du très haut niveau, et en les intégrant à cet article, je ressens à nouveau la même frustration pénible qu’au moment où j’ai fini par les mettre de coté.
Mon message perso aux auteurs de ces superbes photos : « votre oeuvre est magnifique, vous n’avez rien à vous reprocher, c’est la dure loi des concours photos ».
Les voici.
© Jacques Trognko © Yvan Cauvez © Bertrand Bayer © Philippe Drues © Rémi Giguet © Annik Marin Stéphane LebretonDites-moi en commentaires si cet article vous a aidé ! 🙂
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