Les feuilles, quelque brève leur vie,
Jamais ne parurent si loin de leur chute aujourd’hui,
Et semblaient tamiser pour nous
La lumière même, frémissante, d’où tombait le temps.
L’averse d’un feu, que nous pensions perdu
À jamais, ravive l’air. Où se rencontrent les amis,
Ils parlent les langues du Saint-Esprit.
Les temples d’or bordent la rue dans son éblouissement.
Ce n’est qu’une lumière d’érables, qui s’éteindra,
Non sans laver l’œil et le cerveau
D’une couleur, d’un éclat sanguin,
À laisser une trace durable.
Ainsi le manteau de Marie, mis à sécher
(Selon la légende, comme toutes les jolies légendes, peut-être vraie),
Sur le romarin, humectait les fleurs
Pâles et légères, à les rendre si bleues,
Au point de les vouer à jamais à l’azur.
*
October Maples, Portland
The leaves, though little time they have to live,
Were never so un£allen as today,
And seem to yield us through a rustled sieve
The very light from which time fell away.
A showered fire we thought forever lost
Redeems the air. Where friends in passing meet,
They parley in the tongues of Pentecost.
Gold ranks of temples flank the dazzled street
It is a light of maples, and will go;
But not before it washes eye and brain
With such a tincture, such a sanguine glow
As cannot fail to leave a lasting stain.
So Mary’s laundered mantle (in the tale
Which, like all pretty tales, may still be true),
Spread on the rosemary-bush, so drenched the pale
Slight blooms in its irradiated hue,
They could not choose but to return in blue.
***
Richard Wilbur (1921–2017) – Poems Of Richard Wilbur (Harcourt Brace, 1963) – Le beau qui change (La Différence, 2001) – Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Alain Bosquet.
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