Robert Castel, (pas le comédien Pied Noir, l'autre) qui est directeur d'études à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, a de la suite dans les idées. Voilà ce qu'il dit depuis des années:
http://multitudes.samizdat.net/Et-maintenant-le-precariat.html avril 2006
"Depuis une vingtaine d’années s’est constitué dans notre société un volant, représentant de l’ordre de 10 % de la population active, qui n’a pas d’emploi et qui...n’aura pas d’emploi. En effet, le régime actuel du capitalisme, qui crée beaucoup de richesses, est incapable de produire le plein emploi.
Il produirait plutôt un déficit d’emplois assurés de leur durée (CDI), garantis par le droit du travail et donnant accès à toutes les prérogatives de la protection sociale."
"Le but est de promouvoir une société de pleine activité ..., très différente d’une société de plein emploi : tout faire pour ne pas être un «mauvais pauvre»,
disqualification séculaire attachée à tous ceux qui, étant aptes au travail n’arrivent pas à travailler. Pour ne pas être un mauvais pauvre », il faut accepter de travailler à n’importe quelle condition, quitte à devenir un working poor."
http://www.actuchomage.org/modules.php?op=modload&name=paged&file=index&topic_id=10&page_id=169
"La réponse libérale n'est pas de partager le temps de travail, ni de créer des emplois véritables au sens plein du mot mais de développer ce type d'activités qui, comme elles n'obéissent pas au principe économique de l'offre et la demande, nécessitent qu'on mette de la morale par dessus : alors on culpabilise, et on force. Cette tendance inquiétante à une contrepartie travaillée pour toute allocation ou toute aide sociale risque de se traduire par une redéfinition de la notion même d'emploi, et aussi de chômage...
En dépit du discours sur l'entreprise créatrice d'emplois que l'on nous sert depuis vingt ans, on est obligés d'en conclure que ces entreprises ne sont pas capables de créer de l'emploi... Alors à cela les libéraux répondent en toute logique que c'est parce que le marché du travail est trop rigide."
Et finalement dans le Monde de la semaine, il enfonce le clou dans un article intitulé "Travailler plus, pour gagner quoi ?"
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/07/08/travailler-plus-pour-gagner-quoi-par-robert-castel_1067614_3232.html
"primo, il y a du non-emploi, c'est-à-dire une pénurie de places disponibles sur le marché du travail susceptibles d'assurer le plein-emploi ; deuxio, il y a une survalorisation du travail qui en fait un impératif catégorique, une exigence absolue de travailler pour être socialement respectable ; tertio, il y a cette stigmatisation du non-travail, assimilé à l'oisiveté coupable, à la figure traditionnelle du "mauvais pauvre" vivant aux dépens de ceux qui travaillent.
De contrats aidés en services ponctuels à la personne en passant par la montée en puissance des formes dites "atypiques" d'emplois qui représentent aujourd'hui plus de 70 % des embauches, se met en place une large gamme d'activités qui institutionnalisent la précarité comme un régime de croisière dans le monde du travail. L'insécurité sociale est de retour, et un nombre croissant de travailleurs vivent à nouveau "au jour la journée", comme on disait autrefois.
l'institution de formes dégradées d'emploi au nom de l'exigence de travailler à tout prix et à n'importe quel prix conduit aussi à la dégradation du statut de travailleur et, finalement, de la qualité de citoyen."
Je conseille à tous de lire ces articles et les ouvrages de Robert Castel: il dit la même chose que moi en mieux !