Abdellah Taïa a publié sur Facebook ce texte :
« Une chanson politique qui ébranle le Maroc et interpelle directement le pouvoir. Du Gruppo Aquilè. Publiée il y a sept mois, elle est en train de devenir le HIT du moment grâce aux supporters (très politisés) du club de football casablancais RAJA, les Ultras Eagles, qui en ont fait leur hymne: très courageux, ils la chantent d'une manière totalement bouleversante dans les stades (voir vidéo en cliquant sur la photo ci-contre). On pourrait traduire le titre ainsi: Dans mon pays on m'a maltraité; Dans mon pays on m'a méprisé; Dans mon pays on m'a fait subir l'injustice. Le "On" réfère au pouvoir, bien sûr. Les paroles, simples, directes, sont extrêmement politiques, extrêmement accessibles: elles pointent du doigt les vrais responsables au Maroc de l'abandon de la jeunesse et, sans peur, les critiquent ouvertement. Je dois avouer que, quoique j'écrirai, je n'arriverai jamais à atteindre la puissance de cette chanson, le souffle de cette chanson. J'ai l'impression que la littérature devrait être cela: cette chanson marocaine désespérée, lucide, vraie, tellement vraie. Sans aucune fioriture. Des mots de la réalité impitoyable écrits-chantés-criés-vomis sans les laver. Des mots révolutionnaires. Des mots sans espoir. Des voix qui retrouvent le sens et l'âme en allant qu'au bout de la révolte. Vous voulez nous tuer? Nous sommes déjà morts. Et même dans la mort, nous continuerons de chanter et de vous maudire... Je me sens rempli d'une fierté incroyable pour le peuple marocain en écoutant cette chanson politique. Je vibre. J'ai la chair de poule. Et je pleure. Je pleure. Ceux qui croient que l'esprit du Printemps Arabe est mort se trompent largement. Courage et courage aux pauvres, aux faibles et aux abandonné-e-s au Maroc. Leur lutte est notre/ma lutte. Je m'inspire d'eux-elles et je les salue fort fort fort… » (Abdellah Taïa - 11/10/2018)
On trouve une partie de cette chanson traduite sur internet.
Oh oh oh oh oh oh oh
febladi delmouni
Oh oh oh oh oh oh oh
lmen nchki 7ali
Oh oh oh oh oh oh oh
chekwa lreb l3ali
Oh oh oh oh oh oh oh
ghir howa li dari
fhad lblad
3aychin fghmama
talbin salama
nsarna ya moulana
sarfo 3lina
7chich fktama
khlawna kilyatama
nt7asbo fel9yama
mawahib daya3touha
bdoukha herestouha
kif bghito tchofouha
flous blad ga3 klitouha
l’l’berani 3titouha
generation 9ma3touha
Oh oh oh oh oh oh oh
À qui pourrais-je me plaindre ?
Oh oh oh oh oh oh oh
Je ne peux me plaindre qu’à dieu tout puissant
Oh oh oh oh oh oh oh
Lui seul qui comprendra ma souffrance
Dans ce pays on vit dans un nuage sombre
On ne demande que la paix sociale
Ils nous ont drogués avec le haschisch de Ketama
Ils nous ont laissés comme des orphelins
À attendre la punition du dernier jour
Des talents ont été détruits
Détruits par les drogues que vous leur fournissez
Comment voulez-vous qu’ils brillent ?
Vous avez volé la richesse de notre pays
Les avez partagés avec des étrangers
Vous avez détruit toute une génération
Cela me fait penser à certains textes publiés dans l’anthologie JIL LKLAM (Poètes urbains) :
« À nos soucis ils nous ont abandonnés et ils sont sortis festoyer »
« Le quartier est délaissé, sous-estimé, blâmé, opprimé et toujours accusé »
« Oui nous sommes la génération qui est arrivée quand il y a eu des problèmes
Et ces problèmes sont toujours là »