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Cristina Castello – Le devoir de la Beauté

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Cristina Castello – Le devoir de la BeautéNous ne sommes nés ni pour des fracas de missiles
Ni pour des sons de voix infraternelles
Nous ne sommes nés ni pour des sommeils ravagés
Ni pour des pleurs ― les nôtres, ceux d’enfants ou d’anciens
Ni pour noyer l’âme dans les larmes avec des pleurs en dedans
Nous ne sommes pas nés pour étouffer l’abandon dans la gorge
Nous sommes nés pour que la Vie soit éclat et non vide
Pour la soif et pour l’eau

Je pense que les sons du terroir
Ont permis à Mahler d’expliquer la polyphonie
Il pleut sur Buenos Aires
J’écoute des solos pour piano de Debussy
Des mains qui transmutent en musique
Ou des papillons qui dansent sur le clavier?
Musique d’eau cristalline dans le silence
Malgré le gris et malgré la bruine
Et Girondo me survient
Resurgi de l’abîme
Où le vécu a fait de lui oubli
Provisoire
Il me dit que
Nul autre que Debussy n’a écouté avec autant d’avantage
Les arpèges que les mains translucides de la pluie
Improvisent contre le clavier des jalousies

La Beauté est debout
Il pleut et Debussy.
Et à la veille de cette nuit grise
Gabriel Fauré et Sainte-Colombe.
Et avant et après
Di Lasso et Bach et Chopin.
Et avec la délicatesse d’un colibri
Qui danse sur les lavandes
La musique émeut nos êtres
Comme des latences de la nature
Et de l’amour.

Le Pouvoir nie la Musique.
Et il y a de la Musique
Parce que l’Art.
Parce qu’ils ne pourront pas.
Parce que nul ne tuera la musique.
Ni la poésie.
Ni la peinture.
Les artistes dans ce…pays?
Ils vivent à l’abandon
Nous tous, nous sommes à l’abandon.
Sans art il n’y a point de joie.
Sans art il n’y a point de lumière.
Sans art il n’y a point de dignité.
Sans art il n’y a pas de vie.
Et le Pouvoir porte un toast avec les larmes d’Orphée.
Mais il ne pourra rien contre l’insaisissable,
La musique et l’Art.

Mon amour et mon cœur étaient de grands oiseaux
qui volaient parmi une multitude d ‘astres
écrivit Robert Desnos
Et si nous volons ainsi
Unis
Dieu
Unis
Tous dans le Monde dans l’Univers entier
Nul ne tuera la musique.
Nul ne tuera la vie.

J’ai honte et je suis lasse
Pour les sans-cœurs.
Mais la force intérieure est plus forte
J’ai Soif.
Soif bénie
Qui anticipe l’eau.
Eau. Musique. Art. Vie. Égalité. Justice. Liberté.
Transparence.

Soif.
Soif comme un oiseau qui vole
parmi une multitude d ‘astres
Pour le devoir de la Beauté.

*

El deber de la Belleza

No nacimos para estruendos de misiles
Ni para ruidos de voces infraternas
No nacimos para sueños devastados
Ni para llantos propios, de niños ni de ancianos
Ni para ahogar en lágrimas el alma con llantos hacia adentro
No nacimos para sofocar el desamparo en la garganta
Nacimos para que la Vida sea esplendor y no vacío
Para la sed y para el agua

Pienso que los sonidos de la campiña
Permitieron a Mahler explicar la polifonía
Llueve en Buenos Aires
Escucho unos solos de piano de Debussy
¿Manos que transmutan en música
O mariposas que danzan sobre el teclado?
Música de agua cristalina en el silencio
Aunque el gris y aunque la llovizna
Y Girondo me acontece
Resurgido del abismo
Donde la vivencia lo convirtió en olvido
Provisorio
Y me dice que
Nadie escuchó con mayor provecho que Debussy
Los arpegios que las manos traslúcidas de la lluvia
Improvisan contra el teclado de las persianas

La Belleza está en pie
Llueve y Debussy.
Y en víspera de esta noche gris
Gabriel Fauré y Sainte-Colombe.
Y antes y después
Di Lasso y Bach y Chopin.
Y con la delicadeza de un colibrí
Que danza sobre las lavandas
La música conmueve nuestro ser
Como latencias de naturaleza
Y de amor.

El Poder niega la Música.
Y hay Música.
Porque el Arte.
Porque no podrán.
Porque nadie matará la música.
Ni la poesía.
Ni la pintura.
Los artistas en este ¿país?
Están a la intemperie.
Nosotros todos estamos a la intemperie.
Sin arte no hay alegría.
Sin arte no hay luz.
Sin arte no hay dignidad
Sin arte no hay vida.
Y el Poder brinda con lágrimas de Orfeo.
Pero no podrá contra lo inasible.
La música y el Arte.

Mi amor y mi corazón eran grandes pájaros
que volaban en medio de una multitud de astros
escribió Robert Desnos.
Y si así volamos
Unidos
Dios
Unidos
Todos en el Mundo en el Universo todo.
Nadie matará la música.
Nadie matará la vida.

Siento vergüenza y hastío
Por los desalmados.
Pero es más grande la fuerza del adentro
Siento Sed
Sed bendita
Que anticipa el agua.
Agua. Música. Arte. Vida. Igualdad. Justicia. Libertad.
Transparencia
Sed
Sed como pájaro que vuela
Entre la multitud de astros
Por el deber de la Belleza.

*

The obligation of Beauty

We weren’t born for the clamor of missiles.
Nor for the noises of unbrotherly voices.
We weren’t born for devastated dreams
Nor for the crying of children and elders.
Nor to drown in tears the soul, crying on the inside
We weren’t born to suffocate the hopelessness in our throat.
We were born for our Lives to be splendor and not emptiness.
For thirst and for water.

I think that the sounds of the countryside
allowed Mahler to explain the polyphony.
It rains in Buenos Aires.
I listen to some piano solos by Debussy.
Hands that transmute in music
or butterflies dancing on the keyboard ?
Crystalline water music in the silence.
Although the gray and although the drizzle.
And Girondo happens to me.
Returning from the abyss
Where the experience turned him into oblivion.
Provisory.
And tells me that
« Nobody ever listened with greater benefit than Debussy
the arpeggios that the rain’s translucent hands
Improvise on the keyboard of the blinds »

Beauty is on its feet.
It rains and Debussy.
And in the eves of this gray night
Gabriel Faure and Saint Colombe.
And before and after
Di Lasso and Bach and Chopin.
And.
With the delicateness of a humming bird
That dances above the lavenders
Music moves our being
Like beats of nature
And love.

The Power denies the Music.
And there is Music.
Because of Art.
Because they’ll never be able to.
Because no one will ever kill the music.
Neither the poetry.
Nor the painting.
The artists in this… country ?
are unsheltered.
We are unsheltered.
Without art there is no joy.
Without art there is no light.
Without art there is no dignity.
Without art there is no life.
And the Power makes a toast with Orpheus’ tears
But nothing they’ll obtain against the ungraspable.
Art.

« …My love and my heart were great birds
that flew among a multitude of stars »
Wrote Robert Desnos.
And if we fly this way
Together
God
Together
Everyone in the World in the Universe.
Nobody will kill the music.
Nobody will kill life.

I feel shame and disgust.
For the inhuman.
But its greater the strength inside
I feel my Thirst.
Blessed thirst.
That anticipates water.
Water. Music. Art. Life. Equality. Justice. Freedom. Republic.
Transparency.
Thirst.
Thirst like a bird flying.
Among a multitude of stars
For the obligation of Beauty

Buenos Aires, 2000

***

Cristina Castello (née en Argentine) – Soif

(L ‘Harmattan, 2004) – Traduit de l’espagnol par Pedro Vianna et Cristina Castello – Translated by Gabriel Bernstein.


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