Festival Blues des Deux Rivières ( scène off) avec The Beanshakers et Trio Iku à Belle-Isle-en-Terre, le 6 octobre 2018
Pour sa dix-septième édition, les programmateurs du Festival Blues des Deux Rivières de Belle-Isle-en-Terre ont élaboré une affiche de choix avec comme têtes d'affiche de la première soirée Dani Wilde et Mike Vernon, le fondateur du label Blue Horizon, t'as manqué ça, tu étais au concert de Hugh Coltman à Saint-Brieuc.
Le samedi, le menu était encore plus copieux, Trudy Lynn et Steve Krase accompagnés par des mercenaires d'Outre-Rhin (The Ozdemirs), Lisa Mills et le Jimmy Reiter Band étaient appelés à fouler la scène de la Salle Polyvalente à partir de 20:30'.
Les Deux Rivières, c'est aussi un festival off, gratuit, pour ceux dont la fin de mois, ou même le début de mois, est synonyme de portefeuille vide.
Comme ton carrosse trouve à garer dans le centre de Belle-Isle peu avant 18h, tu décides d'aller faire un tour aux Halles, ce que tu entendais, de loin, plaisait à tes pavillons.
Sur scène, un quintet, The Beanshakers, a entamé la dernière partie de son exercice du jour du sabbat.
Ces malmeneurs de fèves ne sont pas originaires de Paimpol, où les cocos ne sont pas communistes, mais de Douarnenez, plus connu pour ses sardines.
En 2017, peu de temps après avoir été baptisé par un curé sportif, les Beanshakers se voient décerner le prix Soul Bag au tremplin des Rendez-vous de l'Erdre (Nantes) , sur la lancée Guillaume Feuillet : guitare et chant/ Geoffrey Chaurand : guitare/ Thierry Perron : harmonica/ Jonathan Caserta : basse et Tsunam : batterie, enregistrent l'EP ' The Keeper' qu'ils n'ont pas dédié à Hugo Lloris.
Au moment où tu prends place, les Shakers ont déjà bien entamé leur labeur dans le potager, ça turbine sec sur le podium, en mode Chicago Blues, OK, le Calumet n'est probablement pas aussi propice à l'agriculture que le fertile Delta du Mississippi, mais les légumineuses y sautillent joyeusement.
Ces braves gens annoncent ' Tigerman' ( King of the jungle) , on nous a toujours parlé de Tarzan l'homme singe, mais Rufus Thomas ne jure que par Tigerman.
Des petits soli soignés, un harmonica pas souffreteux et une rythmique solide, sans oublier le timbre viril de Monsieur Feuillet, l'assemblée savoure!
'Anxious Man Blues' est repris sur leur Extended Play, le mec a beau être angoissé, avoir plein de soucis, travailler pour payer les impôts, le blues remue salement.
On appuie un peu plus sur le champignon pour ' Baby I don't care', ces flageolets voltigent comme des marrons chauds grillant sur le brasero.
On embarque tous dans le 'Freedom Train', direction le Sud, a place where there ain't no rain, il est vrai que ça drache vilain aujourd'hui.
C'est déjà la fin du set, un rappel se négocie.
Vous insistez, d'accord.
Buddy Guy et son savoureux 'Let me love you baby' termine une prestation dont tu as entendu les 25' dernières minutes, c'est assez pour te rendre compte que ce groupe est à revoir pour un concert complet.
A 250 mètres des Halles, se trouve le Bar de l'Union, il est 18:30', le Trio Iku est prêt à en découdre. Le troquet est sérieusement farci, se commander un demi relève de l'impossible!
Non, Iku ne vient pas de Wakayama, ni de Yokosuka, Anaïs, une jeune bretonne d'origine nigériane, a opté pour cette identité afin de se lancer dans l'enfer musical, depuis quelque temps. Secondée par des requins/guitaristes moins juvéniles ( Roll Pignault et Gwen Roux), la demoiselle écume les scènes des Côtes-d'Armor ou d'autres départements du Breizh pour chanter son blues, aux forts accents soul.
On te signale qu'elle a été finaliste du festival Blues-sur-Seine 2017 et qu'elle vient de sortir une rondelle ( six titres), baptisée 'Seventeen's heart', elle n'a pas encore 18 ans, donc!
Iku démarre seule, au piano, en interprétant une de ses compostions intitulée ' Freak'. Tu refiles cette ballade nu soul à Adele et c'est un tube monstrueux, la voix est limpide et émouvante, mais qui est ce serpent à qui elle demande de la fermer, ce beautiful bastard qui se fout d'elle?
L'acoustique ( Roland Pignault) et l'électrique ( Gwen Roux) entrent en action, le trio entame une étonnante version, empreinte de blues, de 'Glorybox' de Portishead.
La casquette a déniché un harmonica, c'est parti pour le gospel énervé ' Get right church'.
C'est pas que le bistro ressemble à un édifice religieux mais les paroissiens apprécient le sermon.
La frêle Iku n'a pas le look, ni le coffre, des chanteuses de negro spirituals , mais le talent dégouline de ses pores.
Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années.
Ajoutons que le jeu de Gwen n'est pas du style pingouin et que la base rythmique ajoutée par son copain est solide et tu comprendras aisément que ce trio peut voir l'avenir en rose.
Toujours en mode gospel/blues, Iku reprend Ruth Brown, 'Sweet Baby of Mine'.
CCR, 'Run through the jungle', voit arriver un sagouin qui, déjà lors du concert précédent, s'exerçait au yodel pendant les moments les plus paisibles d'un morceau, il a réussi à se faufiler comme une anguille beurrée à travers la foule pour se poster à 25 cm de la chanteuse et reprendre ses hurlements de putois.
Chantal, qu'il avait bousculée indélicatement, n'apprécie pas des masses, elle espère qu'un saurien peuplant cette jungle vienne le bouffer tout cru.
Retour derrière les touches pour 'Imagine' de Lennon, un second joyeux, titubant, rapplique, il est à la recherche d'une cavalière pour entamer un slow sensuel, les candidates ne se bousculent pas au portillon, Don Juan s'énerve et énerve, va-t-on assister à un pugilat?
La chèvre, elle, s'est remise à bêler, trébuche et manque d'échouer sur l'orgue.
Folklorique, ce concert!
Le trio a embrayé sur une superbe version, toute personnelle, de 'Miss You' des Stones pour terminer un premier set, précédant une pause de 15', par un shuffle archaïque ( Early Every Morning) qu'ils ont dépoussiéré .
Tu profites du break pour quitter le zinc et te rendre vers la salle polyvalente et y avaler une frite/merguez.