Franz Wright – Chute de neige sans nuages

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

De grands et gros flocons comme des cendres blanches
à la tombée de la nuit qui descendent
partout soudainement
et qui fondent
dans cette main comme l’hostie
sur une langue tendue, elle
me présente le crucifix encore tiède
de la chaleur de sa main deux ans après
et merci,
me dis-je à moi-même –
Un vaste battement d’ailes déployées
me réveille et je lève les yeux
vers un chapelet d’oies noires qui s’étire l’espace d’une minute
et suivent, volant bas près de la lune, le cours
blanc de la rivière enneigée et
au fait je Te remercie de
ne pas montrer Ton visage c’est à peine si je
parviens à supporter la beauté de ce monde.

*

Cloudless Snowfall

Great big flakes like white ashes
at nightfall descending
abruptly everywhere
and vanishing
in this hand like the host
on somebody’s put-out tongue, she
turns the crucifix over
to me, still warm
from her touch two years later
and thank you,
I say all alone—
Vast whisp-whisp of wingbeats
awakens me and I look up
at a minute-long string of black geese
following low past the moon the white
course of the snow-covered river and
by the way thank You for
keeping Your face hidden, I
can hardly bear the beauty of this world.

***

Franz Wright (1953-2015)Walking to Martha’s Vineyard (Knopf, 2003)Le nouveau recueil N° 78 (Champ Vallon, 2007) – Traduit de l’américain par Laure Katsaros.