Farhad Showghi a reçu cette année en avril le grand prix de poésie allemande, le Peter Huchel Preis 2018, décerné pour son nouveau livre, dont sont traduits ici 3 extraits.
Après le travail. Le ciel comme il est ressenti.
Lumière à Sasel, dis-je. Début décembre.
Par endroits à égalité : un avant, un après,
stase et branches à bourgeons précoces,
bois clair, bois de cœur,
au-delà du soleil, ainsi qu’en deçà, déposé sur les yeux
le ciel, comme il est ressenti,
avec la réserve des nuages qui s’estompe à vue d’œil,
agit déjà sur la vision,
sur une langue de forêt, sur du ventilé,
un rêve raconté à neuf,
un acte résiduel.
Tout ce qui s’accorde au visage.
Je pourrais me souvenir,
m’appliquer aux ébauches, contours, à la terre lessivée.
Et entends plus facilement la bouche avec le doigt :
avoir lèvres, dire des choses –
un sommeil mobile vers l’odeur des armoires et oreillers à secouer,
vers l’air de mère, son insistance à aérer,
pièce après pièce – le bruit n’augmente pas,
écrire les sourcils.
Appeler une clarté plutôt que des noms.
Vent du nord-ouest,
en chimère du possible autour des buissons,
réflexion sur une pâleur.
Horizon synchronisé sur une pâleur.
Jusqu’à ce que la mère s’ancre dans sa singulière aération.
Son effort pour donner forme, secouer, garder cadence.
Elle a besoin d’un peu de temps,
de son manteau brun clair,
pour d’elle-même tomber.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreißprobe, Kook 2017. Traduit de l’allemand par Jean-René Lassalle
Nach der Arbeit. Der Himmel, wie er sich anfühlt.
Licht in Sasel, sage ich. Anfang Dezember.
Stellenweise gleichauf ein Vorher und Nachher,
Stillstand und früh knospendes Geäst,
Hellholz, Kernholz,
jenseits der Sonne, auch diesseits ins Auge gelegt,
der Himmel, wie er sich anfühlt,
mit zusehends verwischter Wolkenreserve,
wirkt gleich auf Umschau,
auf Waldzunge und Hingewehtes,
ein neu erzählter Traum,
ein restliches Tun.
Alles, was ins Gesicht passt.
Ich könnte mich erinnern,
um Rohformen, Konturen, Orterde kümmern.
Und höre mit dem Finger leichter den Mund:
Lippen haben, Sachen sagen –
einen beweglichen Schlaf zum Geruch der Schränke und Schüttelkissen,
zu Mutters Lüften, ihrem fortgesetzten Lüften,
Zimmer für Zimmer - es wird nicht lauter,
die Augenbrauen schreiben.
Helles statt Namen rufen.
Nordwestlicher Wind,
wie ein Möglichkeitsgespinst um die Sträucher herum,
der Gedanke an Blässe.
Mit Blässe synchronisierter Horizont.
Bis die Mutter sich festbeißt ins eigene Lüften.
Ihr Versuch zu formen, schütteln und Schritt zu halten.
Sie braucht etwas Zeit,
ihren hellbraunen Mantel,
um ganz von alleine zu fallen.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreißprobe, Kook 2017.
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La ressemblance, en discuter. Oui, parler du processus de ressemblance. Le faire commencer par soi. Considérer le taux de dispersion, l’influence de la matérialité. Par exemple devant le buisson de symphorine à perles. Intégrer quelque marge de liberté. Et d’autres visages devant d’autres buissons. Parler du hasard, d’ombre et de souhait. Plus tard flâner vers un banc où s’asseoir, et passagèrement accélérer quand quelqu’un s’approche. Poser les pieds sur des gravillons, sur les dalles gazon alvéolées. Peut-être ensuite dire : avec le temps ma ressemblance gravite autour de ma tête en la visant ; et : voilà ma situation prochaine. Regarder vers le haut, apercevoir à gauche différents nuages. Interrompre brièvement sa propre ressemblance. Faire une pause au milieu du visage. Laisser le climat conclure et le vent souffler. En ce même plein jour encore. Utiliser cette distraction pour une confusion et répéter : maintenant je me confonds avec vraiment qui je veux. Ou bien : ici je me plais à lever une autre main, mais je l’ouvre d’abord comme toujours. Dans cette manière productive tout continuer, même observer les arbres, qui sont presque déjà châtaigniers.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreißprobe, Kook 2017. Traduit de l’allemand par Jean-René Lassalle
Vom Ähneln reden. Ja, vom Ähneln reden. Es mit sich selbst beginnen lassen. Den Streuwert berücksichtigen, das Wechselspiel mit Stofflichkeit. Zum Beispiel neben dem Schneebeerenstrauch. Einige Freiheitsgrade mit einbeziehen. Und andere Gesichter neben anderen Sträuchern. Vom Zufall reden, von Schatten und Wunsch. Später zu einer Sitzbank schlendern und vorläufig schneller werden, wenn jemand kommt. Die Füße auf Rollsplit setzen, auf den Betonrasenstein. Vielleicht noch sagen: Mit der Zeit kreist mein Ähneln zielstrebig um meinen Kopf; und: das ist demnächst meine Situation. Nach oben schauen und links verschiedene Wolken erblicken. Das eigene Ähneln kurz unterbrechen. Mitten im Gesicht eine Pause machen. Das Wetter ausreden, den Wind wehen lassen. Noch am selben helllichten Tag. Diese Ablenkung für eine Verwechslung nutzen, nochmals sagen: Ich verwechsle mich nun, mit wem ich auch will. Oder: Ich hebe jetzt gern eine andere Hand, aber öffne sie vorerst wie immer. Auf diese brauchbare Weise alles fortsetzen, auch Bäume betrachten, die beinahe schon Kastanien sind.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreißprobe, Kook 2017.
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Aux rangs d’ombres des platanes de Hamadan
Une inclinaison vers la pierre. L’herbu pâtis des aigneaux n’établit aucun horizon. Excède le corps. Corps d’herbe rupestre. Ici l’imagination poursuit un moment. Des voix jaunes introduisent les couleurs. Rien d’étouffé. Rien d’arrimé. Plutôt un extérieur rajouté. Certaines ressemblances se transforment en présences, comme des échos dans des trouées de contre-jour : relations activées. Par l’eau. Par la pensée à l’eau. Un son de cueillette resté en suspens. Prolongé vers le doigt même et vers le mot vendeur-de-chatons-de-saule. Voulant continuer à vendre. En rapport, en rapport avec l’avant-goût du sommeil. Plus tard dans le rêve dire encore : un cri d’hirondelle au bout de la langue, quelque œil qui ne ferme jamais la bouche.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreissprobe, Kook 2017. Traduit de l’allemand par Jean-René Lassalle
Den Platanenschattenreihen von Hamadan
Ein Bücken zum Stein. Die grasichte Waide der Schaafe legt keine Entfernung fest. Sprengt den Körper. Den Felsgraskörper. Jetzt folgt eine Weile die Vorstellungskraft. Gelbe Stimmen führen die Farben an. Nichts Abgewürgtes. Nichts verzurrt. Eher ein Nachgelegtes Außerhalb. Manche Ähnlichkeiten wechseln zu Anwesenheiten, wie Echos in Gegenlichtschneisen: vorangetriebene Zusammenhänge. Mit Wasser. Mit Gedanken an Wasser. Ein offengebliebenes Pflückgeräusch. Verlängert zum Finger selbst und zum Wort Weidenkätzchenverkäufer. Will weiter verkaufen. In Verbindung, in Verbindung zum Vorgeschmack des Schlafes. Später im Traum noch sagen: Ein Schwalbenschrei meint die Zungenspitze, irgendein Auge schließt nie den Mund.
Source : Farhad Showghi : Wolkenflug spielt Zerreißprobe, Kook 2017.
Farhad Showghi dans Poezibao :
Extrait 1 et Biobibliographie
On trouvera une autre traduction de « Nach der Arbeit. Der Himmel, wie er sich anfühlt.» de Farhad Showghi dans le numéro spécial de la revue La Mer Gelée sur le thème de la « maman », paru à l’été 2017 aux éditions du Nouvel Attila. Comme la poésie a un aspect musical, les interprétations différentes sont plus que justifiées. Cette revue est de toute façon un beau trait d’union entre les littératures française et allemande, dirigée par Alban Lefranc et Aurélie Maurin.
Jean-René Lassalle