" C'est plutôt la loi du plus fort qui s'impose, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux, qui a pris la place de la République. Alors, il faut à nouveau assurer la sécurité dans ces quartiers. " (Gérard Collomb, le 3 octobre 2018 à Paris).
Nouvelle semaine surréaliste pour le Président Emmanuel Macron qui n'est plus maître d'aucune horloge. Après François Bayrou et Nicolas Hulot, son troisième Ministre d'État l'a lâché. C'était d'ailleurs prévisible qu'il ne pourrait pas aller jusqu'en juin 2019. Malgré le rejet présidentiel de la démission, le Ministre d'État, Ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a finalement démissionné dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 octobre 2018. La passation de pouvoirs a eu lieu en début de matinée le 3 octobre 2018, place Beauvau, avec le Premier Ministre Édouard Philippe qui a été chargé d'assurer l'intérim du Ministre de l'Intérieur en attendant son remplaçant.
Édouard Philippe lui a bien fait comprendre son agacement, lui qui n'était au courant de rien. La veille encore, à la séance de questions au gouvernement, il avait été incapable de dire aux députés de l'opposition pourquoi Gérard Collomb était absent et malgré tout, il devait le défendre face aux demandes de démission. Confusion totale. Résultat, Gérard Collomb a attendu un quart d'heure devant son ministère l'arrivée du Premier Ministre.
La passation fut très rapide. Édouard Philippe était pressé, devait aller à l'Élysée, il avait un rendez-vous avec le Président puis le conseil des ministres. Pendant que Gérard Collomb parlait, Édouard Philippe, droit et raide, attendait avec un certain énervement visible par le mouvement de ses doigts. Poignée de main on ne peut plus glaciale : les regards ne se croisaient pas. Ou à peine.
Qui pour succéder à Gérard Collomb ? Évitons les plaisanteries, comme proposer Yann Moix (il a un avis sur la police) ...ou encore Manuel Valls (expérimenté). Imaginons celui qui voulait l'être sous François Hollande, François Rebsamen... ou son double bourguignon, beaucoup plus macrocompatible, François Patriat (le président du groupe LREM au Sénat, rescapé du destin). Ou Julien Dray, qui, un moment, s'était préparé à la fonction. Ou Martine Aubry qui découvre enfin (le 28 septembre 2018) qu'il y a des problèmes à Lille, Laurent Fabius (qui n'a pas ce ministère dans sa collection). Ou Richard Ferrand pour libérer encore une fois le perchoir ? Ou alors Frédéric Péchenard (il est du métier), ancien directeur général de l'UMP, maintenant proche de Valérie Pécresse et vice-président LR du conseil régional d'Île-de-France. Encore Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin, François Bayrou, Jean-Louis Borloo (pour appliquer son plan banlieue), François Baroin (déjà à ce poste), Christophe Castaner (mais responsable de LREM)... On a même parlé de Jean-Yves Le Drian et de Christian Estrosi, mais les deux ont déjà rejeté l'idée. Dans les supputations, on parle aussi du surdoué de la Macronie, celui qui pourrait même succéder à Édouard Philippe à Matignon, à savoir Gérald Darmanin, mais il a une réforme du prélèvement à la source à assurer...
Ce qui a été sans doute le plus surréaliste de la journée, ce fut la déclaration d'adieu de Gérard Collomb. Une déclaration qu'on a du mal à imaginer venant d'un ministre sortant après seize mois d'exercice de la fonction. Il semble découvrir seulement aujourd'hui que la situation de certaines banlieues est catastrophique, alors que cela fait plus de vingt ans que le problème est là.
L'islamisme radical qui prendrait la place de la République : " Monsieur le Premier Ministre, si j'ai un message à faire passer... Je suis allé dans tous ces quartiers, les quartiers nord de Marseille, au Mirail à Toulouse, à la périphérie parisienne, Corbeil, Aulnay, Sevran. C'est que la situation est très dégradée. Et le terme de reconquête républicaine prend dans ces quartiers tout son sens. Parce que, oui, aujourd'hui, c'est plutôt la loi du plus fort qui s'impose, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux, qui a pris la place de la République. Alors, il faut à nouveau assurer la sécurité dans ces quartiers. Mais je crois qu'il faut fondamentalement les changer. Quand les quartiers se paupérisent, se ghettoïsent, il ne peut y avoir que des difficultés. Et donc, nous avons souvent parlé avec monsieur le préfet d'Île-de-France, je crois vraiment que dans la périphérie parisienne, on ne peut plus continuer à travailler communes par communes. Il faut une vision d'ensemble pour recréer de la mixité sociale. Parce que, aujourd'hui, on vit côte à côte et je le dis toujours, moi, je crains que demain, on vive face à face. Et donc, nous sommes en face de problèmes immenses. ".
S'il y avait bien un mot qui pourrait caractériser son action de ministre, ce serait l'impuissance. L'impuissance à ne pas avoir assuré son autorité au sein d'un ministère qui nécessite justement autorité. L'impuissance d'un ancien maire de Lyon qui n'a jamais aspiré qu'à le redevenir, dont l'esprit n'a jamais été qu'à Lyon et très rarement à Paris. Cela n'empêche pas quelques résultats, comme l'arrestation d'un évadé en cavale (qui se cachait sous une burqa quand il sortait à Creil) ou des interpellations dans une enquête sur des attentats. Mais c'est aussi l'autorité du Président de la République qui est mise en défaut quand autant de ministres quittent ainsi le navire gouvernemental.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (03 octobre 2018)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
La démission de Gérard Collomb.
Gérard Collomb se prend-il pour le Président de la République ?
Emmanuel Macron.
Édouard Philippe.
Richard Ferrand.
L'affaire Benalla.
Le premier gouvernement d'Édouard Philippe.
Le deuxième gouvernement d'Édouard Philippe.
La réforme des institutions, côté Place Beauvau.
http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20181003-gerard-collomb.html
https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/gerard-collomb-la-desertion-d-un-208235
http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2018/10/04/36756294.html