Leonard Cohen – Les poèmes ne nous aiment plus

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Les poèmes ne nous aiment plus
ils ne veulent plus qu’on les aime
ils ne veulent plus être des poèmes
Ne nous appellent plus, ils disent
Nous ne pouvons plus vous aider

On ne pêche plus
dans la rivière Généreuse
Laissez-nous
Nous devenons quelque chose d’autre

Ils sont revenus dans le monde
pour être ceux
qui travaillent avec la totalité de leur corps
qui n’ont aucun projet pour le monde
Ils ne furent jamais comiques

Je vis près d’une rivière à Miami
dans des conditions que je ne peux décrire
Je les vois parfois
à demi pourris à demi nés
entourant un muscle
comme une manche relevée
allongés dans leur gelée
pour faire l’amour avec une dent de scie

*

The poems don’t love us anymore
they don’t want to love us
they don’t want to be poems
Do not summon us, they say
We can’t help you any longer

There’s no more fishing
in the Big Hearted River
Leave us alone
We are becoming something new

They have gone back into the world
to be with the ones
who labour with their total bodies
who have no plans for the world
They never were entertainers

I live on a river in Miami
under conditions I cannot describe
I see them sometimes
half-rotted half-bornsurrounding a muscle
like a rolled-up sleeve
lying down in their jelly
to make love with the tooth of a saw

***

Leonard Cohen (1934-2016)The Energy of Slaves (McClelland And Stewart, 1972)L’énergie des esclaves (10/18, 1974) – Traduit de l’anglais par Dashiell Hedayat (Jack-Alain Léger).