Magazine Culture

(Anthologie permanente) Marina Tsvetaeva, Grands poèmes

Par Florence Trocmé

Tsvetaeva  grands poèmesL’anthologie permanente de Poezibao salue aujourd’hui un évènement éditorial, la publication par les Éditions des Syrtes des Grands poèmes de Marina Tsvetaeva, dans une traduction et une présentation de Véronique Lossky* et en édition bilingue.
Le livre sera en librairie le 27 septembre
RÊVES (1)
Chapitre deux
Dans d'autres villes,
Les miennes (villes débordantes),
Les époux rêvent de filles
Des mers, les épouses de Byron,
Les petits enfants — de diables,
Les servantes — de cavaliers.
Dis voir, Morphée
De quoi rêvent les habitants de Hameln,
Sans péchés, — alors, dis ?
— Oui, forts — mais pas trop !
L'époux voit sa femme,
La femme voit l'époux,
Le bébé — le téton,
La belle aux joues rondes —
La chaussette de son père
Qu'elle a reprisée.
Le cuisinier — goûte,
Le supérieur — exige,
Tout est comme il faut,
Tout — comme il faut,
Le long de l'aiguille, la maille —
Chez eux tout est lisse.
Paul rêve de Pierre
Et Pierre de Paul (2).
Certes, de petits-enfants
Le grand-père (d'un point — le prosateur),
La servante — d'un foyer
Avec de bons maîtres.
Le nigaud (3) — d'un commandement,
Le pasteur — de son prêche.
On ne va pas dormir pour rien,
N'est-ce pas, le sommeil sert !
De tonnes de saucisses
(Avec du lard), le charcutier,
Le juge rêve de balance,
Le pharmacien aussi.
Le maître voit la baguette,
Le fruit de son labeur —
Le tailleur ! Le chien — son os ?
Je fais erreur — son collier !
La cuisinière — le plumé,
La lavandière — le plissé.
Comme c'est écrit !
Tout est écrit.
— Et lui-même, le bourgmestre ?
— En vrai comme en rêve.
Puisqu'il est bourgmestre
Que peut-il voir d'autre
Que ses administrés,
Ses vassaux ?
Le bourgmestre lui-même —
Ses propres serfs (4).
Affaire réglée,
Robe bien pliée,
 —Tout comme il faut,
Bien comme il faut !
(Espiègle — Mon intonation :
L’ancien a du bon!)
D'ailleurs ne gaspillons
Pas nos rimes, allons
Visiter pendant qu’il dort
Son palais (Tsar solide !)
Il tient bon et fort
Et sûrement mérite
Notre attention…
Marina Tsvetaeva, Grands poèmes, édition bilingue, traduit du russe et annoté par Véronique Lossky, 1120 pages, 29€. En librairie le 27 septembre.
Extrait du poème « Le Preneur de rats », pp.734 à 739
Ce volume comprend 21 poèmes : les grands poèmes épiques, les contes folkloriques et les œuvres « inachevées » selon Marina, c’est à dire terminées, mais non abouties. Ils correspondent à des étapes importantes de sa biographie.
TsvetaevaN’étant pas en mesure de transcrire la version originale ici, Poezibao propose une photo de la première page du poème (On peut cliquer sur l'image pour l'agrandir).
1. Le russe est clair, il s'agit des choses que l'on voit dans son sommeil, tandis que le français est ambigu à. cause des deux sens du mot.
2. Les apôtres
3. Probablement de l'allemand Kasper: « imbécile ».
4. Note de Tsvetaeva : « En allemand burg signifie forteresse, explique le jeu de mots des racines communes qui disparaît en français (on peut le comprendre si on remplace serf par forçat pour garder l'idée de force dans les deux mots). »
*Poezibao rappelle la disparition de cette éminente traductrice du russe et en particulier de l’œuvre de Marina Tsvetaeva le 17 mars 2018.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Florence Trocmé 18683 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines