Comme une balle dans la tête

Je ne l’ai pas vu venir. Elle m’a cogné la tête et s’est insinuée en moi. Elle a pénétré mon cerveau comme une balle. Un projectile mécanique froid et fulgurant qui viendrait plonger entre les deux lobes de mon crâne, s’y logerait pour de bon et laisserait la douleur s’installer à son tour. Je ne l’ai pas vu venir. Et comment aurais-je pu ? Je ne fais que suivre mon chemin sans mot dire, sans poser les questions qui fâchent. Va là. Oui, j’y vais. Assieds-toi ici. Pas de problème. On ne peut pas faire plus docile que moi. Alors pensez donc, comment aurais-je pu la voir venir.

Je me suis assis par terre et j’ai pris ma tête entre mes mains. Ma tête avec la balle dedans. Le sol était froid. Mon front était brûlant. Je voulais faire le point, ou quelque chose comme ça. Mais faire le point sur quoi ? Je n’avais pas d’objectif précis, pas de cible sur laquelle focaliser. Rien. A part la douleur logée dans mon crâne. Putain de douleur.

Je me suis remis à marcher. Comme un réflexe. Comme le genou qui se tend lorsque le médecin frappe dessus avec son petit marteau ridicule. Je me suis remis à marcher donc. Sans bien réfléchir. Le décor a changé. Le climat aussi. Mes jours ont passé comme des nuits sans sommeil. La balle toujours logée entre les deux lobes de mon cerveau. Un corps étranger comme le témoin glacial du choc de sa rencontre. C’est dur d’extraire le projectile. Impossible en fait. Il prend sa place. Et puis il reste. La douleur aussi.

Avec le temps, je me suis habitué à sa compagnie.