L’œuvre, complète à ce jour, entre 1983 et 2017, de Hanne Bramness, née en 1959, poète très reconnue en Norvège, nous parvient ainsi « in extenso ».
Avant toute chose, il convient de saluer la qualité de l’édition de ce livre, 88O pages rythmées par les eaux-fortes de Florence Barbéris, chaque titre de chaque recueil imprimé sur papier calque. Le tout forme ainsi un ensemble important sans aucune lourdeur, une sorte de prodige d’équilibre, présenté en fin de volume par la traductrice, dans le détail de chaque recueil (douze au total).
Les poèmes quant à eux sont souvent très beaux, très puissants, en particulier à mon sens ceux du « Sel sur l’œil », âpres et directs.
Anne-Marie Soulier est poète et traductrice du norvégien (Øyvind Rimbereid chez BF, déjà Hanne Bramness et Olav H. Hauge chez Erès dans la collection PO&PSY dirigée par Danièle Faugeras.
Elle a bien voulu répondre à nos questions :
Isabelle Baladine Howald : Anne-Marie Soulier, dans quelles circonstances avez-vous rencontré le travail de Hanne Bramness, et décidé de le traduire ?
Anne-Marie Soulier : Fin 2010, j’ai reçu un appel de David Demartis, éditeur du Murmure : il préparait avec Yves-Jacques Bouin le festival « Salut, poète ! » de mars 2011, consacré cette année-là aux pays scandinaves. Le festival avait lieu une fois par an à Dijon, et à cette occasion David éditait chaque année un recueil réunissant des extraits de l’œuvre de trois poètes d’un même pays. Est-ce que je voulais bien me charger des « Trois poètes norvégiens ? ». J’avais six semaines pour établir un recueil d’environ 200 pages : choix des textes, traductions, biographies et présentation des auteurs. Ah, une dernière consigne : que deux poètes sur les trois, si possible, soient des femmes. Comment résister ?
Je connaissais bien Øyvind Rimbereid, avec qui j’avais partagé plusieurs lectures bilingues à Strasbourg et à Paris, ce qui avait déjà donné lieu à un premier recueil, « La Pluie en janvier », paru en 2004 chez BF, la maison d’édition du Strasbourgeois Armand Peter - que je tiens à saluer au passage, car c'est l’exemple parmi d’autres d’un « petit » éditeur qui ne rechigne pas à prendre d’énormes risques sur la foi d’un premier coup de cœur.
Øyvind m’avait recommandé le travail de Torild Wardenær, également rencontrée à Paris, dont l’univers m’a immédiatement conquise. Restait le troisième poète, « de préférence une femme » … J'ai tout simplement cherché sur internet et, me fiant entièrement à mon intuition, choisi un visage qui semblait avoir quelque chose à me dire.
Le recueil des « Trois poètes norvégiens » a été épuisé très vite, mais l’éditrice de la collection PO&PSY, Danièle Faugeras, avait eu le temps de le feuilleter lors d’un Marché de la poésie de Paris, et m’a contactée en vue de la traduction de quelques poèmes pour enfants de Hanne, sous le titre « Le Blues du coquillage », en reprenant les dessins pleins d’humour de l’artiste écossaise Laurie Clark. De fil en aiguille, Danièle a décidé de consacrer l’un de ses volumes « in extenso » à l’œuvre de Hanne.
IBH : Comment avez-vous travaillé avec elle, qui vit en Norvège, ce pays que vous connaissez bien pour y avoir vécu ?
AMS : Effectivement, à 20 ans j’ai eu la chance extraordinaire d’obtenir une bourse d’études à l’université d’Oslo. Je ne me suis jamais remise de la découverte de ce pays, qui continue d’exercer sur moi un fort tropisme et où je retourne chaque fois que je le peux.
Hanne vit sur la côte ouest du pays, dans la région de Bergen, la région des plus beaux fjords. Les possibilités d’internet nous ont permis de communiquer très rapidement ; de plus, les Norvégiens sont d’un abord très simple, la politesse consiste à se tutoyer d’emblée… Hanne est elle-même traductrice, mais s’est toujours refusée à me donner le moindre conseil ou à émettre la moindre critique, d’autant plus qu’elle ne parle pas du tout français - ce qui n’arrête pas certains de mes auteurs ! Bref, elle m’a laissée entièrement libre, mais aussi entièrement responsable. En revanche, j’ai pu lui poser toutes les questions que je voulais, sans craindre de la lasser ou de paraître stupide.
IBH : Comment définiriez-vous sa langue, qui d’ailleurs change, entre le premier et le dernier recueil ?
AMS : Il faut savoir que la Norvège est le pays d’environ deux cents dialectes, pour un peu moins de 5 millions d’habitants. Contrairement à ce qui se passe en France, où l’on va jusqu'à faire la chasse aux accents régionaux, chaque dialecte local est non seulement encouragé, mais protégé comme un trésor national, y compris au Parlement, à l’université, ou dans les médias.
Il y a deux langues officielles : celle de la région d’Oslo, qui au goût de certains ressemble encore trop au danois (la Norvège a fait partie du Danemark durant 400 ans), qu’on appelle aussi « bokmål » ou langue des livres ; et le « nynorsk » ou néo-norvégien, né des mouvements d’indépendance nationale du XIXème siècle, concocté à partir de certains dialectes considérés comme plus typiquement norvégiens. Bien sûr, tout le monde se tolère et se « traduit » continuellement ! Et les gouvernements craignent par-dessus tout l'extinction de leurs langues face à l’omniprésence de l’anglais (les bourses et les résidences de traducteur sont d’ailleurs octroyées non par le ministère de la Culture, mais par celui des Affaires étrangères).
Hanne parle et écrit généralement dans son dialecte natal d’Oslo, celui que j’ai appris durant mon premier séjour et qui me posait donc peu de problèmes. Mais elle pratique aussi le dialecte de Bergen, proche du néo-norvégien, qui est celui de son mari, l’excellent poète et romancier Lars Amund Vaage. C'est pourquoi on peut observer ces variations linguistiques dans son œuvre. Les poèmes destinés aux enfants et à la jeunesse sont en général écrits dans le dialecte de Bergen, ceux de type plus déclamatoire dans la langue d’Oslo.
IBH : le norvégien et le français sont extrêmement différents, quelles sont les difficultés de traduction, d’une part entre ces deux langues, d’autre part y a-t-il une difficulté particulière à traduire la langue d’Hanne Bramness ?
AMS : Passer de l’un à l’autre de ces dialectes a demandé à la fois une grande souplesse d’écoute (leur musique n’est pas la même) et une grande rigueur dans le travail, afin de ne pas se laisser happer par des proximités trompeuses. Fort heureusement, il existe d’excellents dictionnaires et manuels de nynorsk, y compris en ligne. Et j’avais toujours la ressource d’aller me renseigner auprès du lecteur ou de la lectrice du Département d’études scandinaves de l’université de Strasbourg, et bien entendu auprès de Hanne elle-même.
La grande difficulté au moment du passage en français tient à la morphologie radicalement différente des deux langues : au-delà du sens, au-delà des sons, il faut se résoudre à renoncer à un rythme. Le norvégien dispose d’un grand nombre de mots brefs, voire de monosyllabes, que l’on reçoit directement sous forme d’émotions, là où le français prend son temps, veut se faire comprendre, selon l’héritage rhétorique hérité d’Athènes et de Rome. Que l’on compare « nå » ou « til » avec « maintenant » et « jusqu'à », des mots qui ne peuvent guère être remplacés par d’autres plus courts ! Mais ce sont surtout les verbes qui vont perdre de leur fulgurance : bli/devenir, få/obtenir, be/demander, huske /se souvenir, glø/rougeoyer, gi/donner, ha/avoir, le/rire, stå/être debout, må/devoir, nå/atteindre, ri/chevaucher…
IBH : Il me semble que sa langue souhaite à la fois montrer et cacher, êtes-vous également de cet avis et que s’agit-il alors de nommer ou de taire ?
AMS : Il y a bien évidemment un jeu incessant de caché-montré, puisque la langue elle-même joue à cache-cache avec son histoire, avec les époques et les lieux…
D’un poème à l’autre, la langue joue à l’infini sur les intermittences de la lumière. C'est pourquoi j’ai d’emblée proposé de reprendre le titre « Le poids de la lumière », de préférence aux titres des autres recueils de Hanne. De la veille au sommeil, en passant par les glissements crépusculaires des retours du jour et de la nuit, sa poésie s’efforce de saisir les contours d’apparitions et de disparitions, entre mirages et effacements, entre les irisations du verre d’eau posé une table de nuit et les éblouissements trompeurs d’un séjour dans le désert.
L’œil est d’ailleurs souvent envisagé comme organe purement physique : Hanne n’hésite pas à mettre sur le même plan le regard et l’œil traité comme instrument d’optique, à mêler dans le même poème le désir d’un homme et la possibilité de flotter sur son humeur aqueuse, par exemple. En cela elle rejoint d’autres poètes norvégiens qui passent avec la même aisance du visible à l’invisible, du monde physique à l’univers métaphysique, sans trébucher sur une frontière étanche.
IBH : J’imagine que vous avez été sensible au fait que Hanne Bramness est une femme.
Considérez -vous pour autant qu’il s’agisse d’une poésie qu’on pourrait qualifier de « féminine », pour autant que cette catégorie soit pertinente ?
AMS : Oui, bien sûr !
IBH : Le corps, le lait, les enfants, les poèmes spécifiquement pour les enfants (merveilleusement édités, avec de fins dessins d’objets propres à l’enfance) qui émaillent le recueil évoquent évidemment sa nature de femme, d’autres thèmes, le désir, la demande d’amour, la forte présence de la nature – norvégienne, fjord, neige, froid - sont universels, quelle est alors d’après vous la spécificité de sa poésie ?
AMS : Je dirais que les intermittences de la lumière et les jeux de caché-montré sont une illustration du tangage, de l’insécurité fondamentale qui semble caractériser la psyché féminine dans l’œuvre de Hanne, depuis les appels lancés par la toute jeune femme de « Correspondances » (1983), incertaine de l’amour de l’homme qu’elle aime, sa peur de l’abandon, jusqu'aux textes en prose des derniers recueils : comment ne pas ressentir une empathie profonde avec l’athlète somalienne et sa course éperdue devant des dangers bien réels et non pas vaguement « poétiques » ? Là non plus il n’y a pas de hiérarchie entre les périls qui menacent à tout instant l’équilibre et l’intégrité de la femme, à la fois du dehors et sur l’écran intérieur, indiscernables, peut-être imaginaires, et d’autant plus effrayants.
La poésie de Hanne est cependant typiquement norvégienne pour une raison qui paraîtra sans doute inattendue au lecteur francophone, dont les références culturelles sont encore souvent issues des monothéismes : pour les Norvégiens, la nature n’est pas seulement un paysage, une occasion de promenades agréables, mais avant tout un lieu de ressourcement où l’on communie avec des créatures divines. Tout étranger à la culture nordique aura fait l’expérience d’accepter innocemment une invitation « på tur », voire « på skitur », croyant qu’il s’agit d’aller « faire un tour », peut-être une balade à skis, alors que la randonnée peut durer des heures, voire toute une journée, tandis que votre ami se retournera souvent afin de s’assurer que vous partagez son enthousiasme !
Il faut dire que le pays n’a été christianisé que vers l’an 900, parfois beaucoup plus tard, voire au XVIe siècle pour certaines régions reculées, qui de ce fait sont passées directement du polythéisme à la Réforme. Plus de mille ans après, on retrouve des traces du paganisme jusque dans les prénoms donnés aux enfants : à côté des Kristin, Anne, Olaf, Fredrik ou Christian, on rencontre couramment des noms d’animaux sauvages (Ulf/loup, Bjørn/ours, Arne/aigle), des noms empruntés à la nature (Sten), des noms de dieux et déesses nordiques ou de héros de sagas (Thor, Sigurd, Ingrid, Idunn…). La vie quotidienne continue à être imprégnée de la mythologie païenne, ce qui n’exclut nullement la présence de créatures bibliques, comme ces anges prisonniers d’un sapin enneigé dans le poème « Captifs ».
IBH :
« Entre les omoplates ou bien au creux du cou
s’est installé l’œil, voyant aveugle en forme de
pomme de pin… (…)
Il pulse au rythme du cœur en
un flux silencieux, je plane au-dessus et tout autour de lui »
Quel est cet « œil » qui surgit, implacable, dans le poème ? Est-il un surveillant, un veillant ?
AMS : Les deux à la fois, sans doute ! Il veille et surveille, rassurant et menaçant à la fois… « voyant aveugle » qui témoigne encore du tangage perpétuel entre le dedans et le dehors.
IBH : L’amour, le rapport amoureux à l’autre et de l’autre à soi touche beaucoup à l’impossibilité :
« celle que tu aimes
n’existe que par rapport à toi-même »
Mais certains poèmes sont aussi d’une grande sensualité :
« Mes lèvres gonflent, ma bouche fond plus
ton haleine, qu’est-ce que ma tempe, ma hanche,
qu’est-ce que le haut, le bas »
Il y a dans ce moment fusionnel quelque chose qui évoque le sentiment océanique qu’elle décrit très bien ?
AMS : C’est vrai, la sensualité fait en quelque sorte écho à la peur de l’abandon, inséparable du désir fusionnel - désir lié bien entendu à l’être aimé, mais plus largement à la nature tout entière, y compris au cours des planètes : l’astronomie scientifique s’envisage comme le reflet de toute une cosmogonie intérieure, à moins que ce ne soit l’inverse…
IBH :- Une sorte de figure du double, ou un écho de soi peut-être, apparaît souvent chez Hanne Bramness, un leitmotiv « parle d’elle » ?
Il agit souvent d’une altérité (Rosa Luxembourg par exemple) mais peut-être aussi d’un écho de soi, d’un effort de se ressembler à soi-même ?
AMS : Il y a, c’est vrai, des héroïnes, comme Rosa Luxembourg, auxquelles Hanne semble prête à s’identifier par empathie. Mais pour ma part, j’ai surtout été frappée par le personnage récurrent de la femme qui surgit tout à coup d’un passé dont on ne saura rien, mais dans lequel Hanne nous invite à entrer comme si l’on partageait, par un autre miracle d’empathie, le souvenir d’une relation qu’on devine autrefois fusionnelle et devenue insupportable. Le plus souvent l’auteur n’a pas pu éviter cette rencontre, mais pire encore, elle s’est vue contrainte (par qui, sinon par elle-même !) de la prolonger par une invitation regrettée trop tard : situation à la fois douloureuse et cocasse, comme si l’on ne pouvait échapper à sa propre sottise, tant est vivace le besoin de s’identifier à une autre femme, fût-elle dangereuse.
IBH : Je dirais qu’il y a quelque chose du témoignage, ou de la position du témoin, dans la poésie de Hanne Bramness, qu’il s’agisse d’autres poètes qu’elle inclut souvent dans son travail, ou des anonymes migrants qui traversent le dernier recueil ? Qu’en pensez-vous ?
AMS :
Ah oui, c’est bien une œuvre politique, qui n’hésite pas à s’éloigner de l’univers des sentiments amoureux, etc. Les dangers et les menaces, elle les nomme, mieux, elle les dénonce.
IBH : Je considère qu’il y a de grands poèmes dans ce livre, comme le presque heurté « DANS CE TEMPS-LÀ », long poème hanté, en quelque sorte « géographique » en même temps que portant l’histoire (évocation de Mandelstam), sinon un pessimisme qui affleure plus le livre avance, au moins une interrogation grave :
Que devient
le corps
dans l’exil ?
forcée de rendre son propre arrêt de mort
sur ses pensées
que devient la langue
en opposition constante
aux lois »
Comment voyez-vous l’évolution de sa poésie sur plus de trente ans ?
AMS : Ce qui me frappe, c’est que déjà à 23 ans ses préoccupations, ses choix politiques et esthétiques étaient largement en germe. « Correspondance (s) » n’est pas seulement une histoire de lettres et d’attente. C’est déjà une œuvre prometteuse, qui pousse ses racines dans des « correspondances » avec d’autres auteurs nordiques ou étrangers, sans oublier le monde de la musique (Corelli, Beethoven…) ni l’univers de la peinture (Helene Schjerfbeck, Miró, Matisse…). C'est pourquoi il m’a semblé pertinent, d’accord avec mon éditrice, de mettre le titre français au pluriel.
Les recueils suivants reprennent volontiers des formes brèves, lignes jetées sur la page comme des poignées de runes, avec un ton prophétique, voire visionnaire qui est allé en s’affirmant tandis que les lignes se regroupaient plus volontiers en strophes : « Dans ce temps-là », « Le continent de la nuit » (répétitions de « Tu m'as montré », « Je vois » …), « Élégies de la révolution » … « La pluie à Buenos Aires » apostrophe une nouvelle fois le temps, la nuit, les percées de lumière, dans des textes qui tentent de plus en plus d’effacer les frontières entre prose et poésie, des vignettes où l’auteure va encore à la ligne, mais moins par nécessité syntaxique que pour imprimer un rythme à la phrase. Ce travail se poursuit avec « Le poids de la lumière » et « Fragments d’espoir » : le ton n’est plus celui d’une prophétesse comme dans les recueils plus anciens, plutôt celui d’une devineresse, dont les visions gardent leur pouvoir d’énigmes : au lecteur de méditer sur la part de la monstration et celle du secret.
IBH : Au fil des années, la forme des poèmes change, de petits poèmes à des vers plus longs, voire à des proses, avec quelque chose d’un peu plus sombre, un peu plus violent, comment interprétez-vous cette évolution et en quoi peut-elle intéresser la traductrice que vous êtes ?
AMS : C’est vrai, mais il n’empêche que le dernier recueil publié s’intitule « Fragments d’espoir », littéralement « Emprunts à l’histoire de l’espoir », ce qui n’était guère possible en français. L’obscurité n’y est plus aussi périlleuse, elle peut même éclairer. Et la promeneuse que l’auteure rencontre tous les jours au parc, une femme qui lui ressemble, en tout cas « du même âge », n’est plus un objet de crainte ou de colère, un double menaçant, mais l’incarnation d’un passé aux possibilités multiples.
De même, le recueil qui devrait être publié cette année s’intitule « Håp bygger huset », c’est-à-dire « Les espoirs construisent la maison » - là aussi, il faudra ruser pour déjouer la proximité phonétique de « Les espoirs » et « Désespoir », peut-être tout simplement en revenant au singulier, « L’espoir bâtit la maison » … mais d’abord, bien sûr, s’imprégner des textes !
IBH : Vous avez déjà traduit Rimbereid et Hauge, et maintenant Bramness, quelles sont les proximités et les écarts entre eux ?
AMS : Encore un beau sujet de mémoire ou de thèse ! J’ai aussi tout un corpus de traductions de Torild Wardenær, qui ont déjà paru dans des revues (Décharge, Europe, Terre à ciel…), mais pas encore en recueil. Elle est d’ailleurs invitée cet automne au festival de Trois-Rivières, au Québec.
Le point commun entre Hanne Bramness, Øyvind Rimbereid, Torild Wardenær et Olav H. Hauge, c’est bien entendu la connivence dont nous avons parlé avec la nature norvégienne. Chacun en tire une inspiration et des visions différentes.
IBH : Comment avez-vous travaillé avec Florence Barbéris ? Comment l’avez-vous connue ? En quoi son travail est-il proche pour vous de celui de Hanne Bramness ?
AMS : C'est Danièle Faugeras, l’éditrice de PO&PSY, qui a découvert Florence Barbéris, qui vit également dans la région de Nîmes, et que j’ai rencontrée lors d’une exposition à Uzès. Danièle m’a d’abord demandé mon avis, mais j’ai été très vite séduite par son approche des poèmes, qu’elle a d’abord lus intégralement. Je trouve l’image de couverture, avec cette silhouette qui semble errer sous la pluie, d’une sensibilité et d’une justesse époustouflantes.
IBH : Un prochain chantier pour vous ?
AMS : Oui, il s’agira cette fois d’un nouveau PO&PSY « in extenso », toujours grâce à Danièle Faugeras, qui tient beaucoup à éditer l’œuvre complète d’Olav H. Hauge, un poète hors normes qui vivait des récoltes de ses pommiers et de ses cerisiers, un autodidacte qui ne parlait et n’écrivait que le dialecte de son fjord mais avait appris assez d’anglais, de français, d’allemand et même de chinois pour lire dans le texte Blake, Nerval, Goethe, les poètes T’ang… et s’imaginer converser avec eux. J’ai déjà débroussaillé une centaine de textes, la plupart sont assez brefs mais très denses, et il en reste au moins trois fois autant.
IBH : Anne-Marie Soulier, merci d’avoir répondu à nos questions.
AMS : Merci de m'avoir donné l’occasion de parler de l’œuvre de Hanne Bramness et d’autres poètes norvégiens !
Entretien mené par Isabelle Baladine Howald
Hanne Bramness, le poids de la lumière, poèmes 1983-2017, présenté et traduit du norvégien par Anne-Marie Soulier, eaux-fortes de Florence Barbéris, collection Po&Psy, éditions Erès, 2018, 880 p., 25€.
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