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12 janvier 2010, 16 h 53 : à Port-au-Prince, une gigantesque explosion retentit, un vacarme étrange, comme le bruit d'une locomotive. Le monstre sans nom vient d'arrêter net la vie, dans un nuage de poussière la ville a été pratiquement rasée.
L'écrivain Dany Laferrière, qui vit le plus souvent au Québec, se trouvait justement, à ce moment-là, à l'hôtel Karibe. Sans le moindre pathos, dans de courts paragraphes d'une grande sobriété, il nous raconte la stupeur des premiers instants, le désarroi des gens soudain éloignés des leurs et dans l'incapacité de savoir s'ils sont vivants ou écrasés sous les décombres, les premiers morts...
Et puis la dignité infinie des Haïtiens, leur amour de la vie malgré tout, leur courage...
" Ces gens qui portent leur douleur avec une telle grâce possèdent un sens de la vie qu'il serait dommage d'ignorer. À les voir si sereins, on se doute bien qu'ils savent des choses à propos de la douleur, de la faim ou de la mort. Et qu'une joie violente les habite. Joie et peine qu'ils transforment en chant et en danse. [...] Tout le secret de ce pays est là. Et non dans le vaudou bon marché qu'on sert aux touristes et aux Haïtiens qui ont quitté le pays depuis trop longtemps." ( p. 169)
Malgré la tragédie, ce livre n'est pas triste ; il refuse l'idée même de malédiction, malgré les dictatures et les cyclones. Il montre au contraire que la vie l'emporte toujours, et que dans ce pays qui s'est construit lui-même, qui s'est libéré seul de l'esclavage, les hommes restent toujours debout.