Champagne ! (what else ?) Amélie Nothomb est de retour et personne ne dira que c’est une surprise. Il ne faut pas aller bien loin dans Les prénoms épicènes, un des romans vedettes de la vingt-septième rentrée littéraire d’Amélie Nothomb, pour déboucher la première bouteille. Dominique a vingt-cinq ans, elle (oui, cela aurait pu être « il », la faute à un prénom épicène, précisément) est assise à une terrasse de café, un homme la regarde, il lui propose un verre et hop ! c’est parti : « Garçon ! Du champagne. » Il s’appelle Claude (et oui aussi, cela aurait pu être elle, vous avez compris, et compris le titre du même coup), il se prépare à organiser son avenir : « Je monte à Paris créer une société », ce qui vaut bien, avec la rencontre en sus, une bouteille de champagne, et du supérieur : du Deutz. Je ne suis pas spécialiste du champagne, je ne connaissais pas. Après l’avoir rencontré trois fois dans le roman (un parrainage ?), je ne l’oublierai peut-être pas. En tout cas moins vite que le roman lui-même, lu il y a trois ou quatre semaine et dont le souvenir disparaît comme les bulles d’un champagne éventé (par exemple). Mais un roman d’Amélie Nothomb sans champagne ne serait pas à la hauteur de la mythologie que l’écrivaine s’est constituée à la force du poignet (pour autant qu’elle rédige à la main, ce que j’ignore, en fait). En le servant d’abondance, elle fournit à ses lecteurs et lectrices des points de repère utiles pour ne pas s’égarer. Tandis qu’un cœlacanthe, sauf erreur, c’est la première fois qu’elle en fait remonter un des profondeurs grâce à Épicène – c’est le prénom pour le moins inhabituel qu’elle a donné à son héroïne, mais un roman d’Amélie Nothomb sans un prénom original serait comme une dinde farcie sans farce. Elle a onze ans quand elle réalise qu’elle a encore sept ans à tirer dans la prison qu’est le couple de ses parents – Dominique et Claude, faut-il le préciser ? Et hop ! champagne ? Non, cœlacanthe ! « Il existe un poisson nommé cœlacanthe qui a le pouvoir de s’éteindre pendant des années si son biotope devient trop hostile : il se laisse gagner par la mort en attendant les conditions de sa résurrection. Sans le savoir, Épicène recourut au stratagème du cœlacanthe. » Voilà pour quelques anecdotes en surface d’une lecture qui, au contraire du poisson auquel on vient de faire allusion, peine à plonger plus loin. Une fois encore, Amélie Nothomb a succombé au charme d’une idée étirée sur la longueur d’un roman – court, certes, mais que cela devient fatigant !
Citation
Il lui faisait l’amour chaque soir. Ce n’était pas le verbe qu’elle employait dans sa tête, tant cette activité lui était devenue pénible : il n’était question que de l’engrosser, elle le savait bien.Son ventre lui inspirait désormais de la terreur : on attendait de lui une dynastie qu’il refusait de produire. Sans le savoir, elle connaissait les angoisses de Marie-Antoinette aux premiers temps de son mariage.
Les prénoms épicènes AMÉLIE NOTHOMB Albin Michel, 154 p., 17,50 €, ebook, 11,99 €