Sorti ce jeudi 23 aout, chez Belfond, du premier roman de de l’écrivaine nigériane-américaine Chinelo Okparanta, Sous les branches de l’Udala.
Sous les branches de l’udala s’ouvre sur fond de guerre civile du Biafra au Nigéria, on y suit une jeune fille igbo Ijeoma qui tombe amoureuse d’Amina, une haoussa. Leur amour sera découvert et qualifié d’ « abomination » par le poids des traditions familiales et religieuses. Elles devront selon leur entourage se soumettre au bon ordre des choses. Dans ce premier roman, Chinelo Okparanta nous conte avec une prose simple, précieuse et incisive les tourments et les espoirs d’Ijeoma à travers la découverte de ses désirs, de sa sexualité, sa quête de liberté et d’amour d’elle-même. Dans une langue habile, douée d’une vérité émotionnelle elle nous happe dans l’histoire de sa protagoniste reflétant les fractures et les tabous de la société nigériane.
L’udala est un fruit (le préféré de l’auteure), il fait référence à la fertilité féminine. Dans le roman, il est raconté une légende selon laquelle si une fille ou une femme s’assoit sous un arbre d’udalas les esprits qui y habitent la rendraient fertile. Le roman est d’ailleurs rythmé par une riche tradition orale avec des proverbes, des contes populaires, des légendes mêlée à l’écriture biblique. Les rêves et leur interprétation sont également très présents dans le cheminement interne de la protagoniste.
L’intime est politique
L’udala symbolise les interrogations du roman sur la féminité, sur ce que doit être une femme, sur qui a le pouvoir de le décider ou pas. Et on voit Ijeoma évoluer sur ces questionnements pour définir sa féminité à elle au-delà des schémas normés et restrictifs.
C’est avant tout un roman qui nous fait ressentir dans la sincérité des images évoquées, dans l’évocation d’une intimité. Cependant, l’intime est politique. Comme il est dit dans une note de l’auteure à la fin du roman, une loi a été votée en 2014 au Nigéria pour criminaliser l’homosexualité avec peine de prison ou lapidation. Malgré la violence dans laquelle elle vit, Ijeoma garde l’amour comme espoir, trouve une conciliation entre sa foi et sa sexualité. Ce personnage est très fort. Avec ce roman, Chinelo Okparanta veut donner aux communautés LGBTQ leur place dans l’histoire nationale du Nigeria, sans un regard occidental sur la question.
Le roman a déjà reçu de nombreux prix dont celui de la Lambda Literary pour une fiction lesbienne en 2016. Chinelo Okparanta a 37 ans, elle est née au Nigéria à Port Harcourt, elle a émigré avec sa famille aux États-Unis à l’âge de 10 ans. Elle a été primée pour son recueil de nouvelles Le Bonheur, comme l’eau qui traversait de nombreux thèmes qu’on retrouve dans ce premier roman comme l’homosexualité féminine, la violence domestique, la quête du bonheur au sein de familles nigérianes. Elle est également enseignante.