L'évolution de l'idée du bonheur avec Frédéric Lenoir (4)

Publié le 18 août 2018 par Eric Acouphene

Vous venez d'employer le mot joie, une autre façon de parler du bonheur ? 
La joie est une incarnation concrète du bonheur. Dans certains courants spirituels, comme le christianisme ou le taoïsme, mais aussi chez Spinoza et chez Nietszche, on privilégie l'idée de joie. Les confucéens, les stoïciens ou les bouddhistes préfèrent la notion de paix intérieure, de sérénité. Ils cherchent avant tout la paix de l'âme (ataraxie), le fait de ne pas être troublé.
Avons-nous besoin de joies collectives, dont la victoire de l'équipe de France de football serait un exemple ? 
Les Français se disent à 80% heureux à titre individuel, mais déclarent à 80% que tout va mal en France ! Notre pays a une vision très négative de lui-même. Vivre une expérience de victoire collective permet de créer du bonheur ensemble. C'est excellent pour le moral du pays. On a le sentiment de partager les mêmes valeurs. On appartient à une même entité supérieure, la République. Mais cela ne dure pas...

Pourquoi l'idée du bonheur est-elle associée à l'enfance – on parle d'« âge heureux » ?

Jusqu'à 5 ans, les enfants vivent l'instant présent. Quand il vit une expérience de satisfaction, l'adulte va parasiter ce moment avec des projections du futur ou des souvenirs du passé. En outre, les enfants n'arrêtent pas de grandir, quand ils apprennent quelque chose de nouveau, ils sont dans la joie. Cela corrobore le lien que fait Spinoza entre la joie et la croissance de l'être. Enfin, les plus jeunes sont spontanés. Ils ne sont pas pris dans tous les méandres de l'ego ou du mental. L'Évangile nous dit : « Laissez venir à moi les petits enfants, parce que le royaume de Dieu appartient à ceux qui leur ressemblent » (Matthieu 19, 14). Et le royaume de Dieu, c'est la joie parfaite, c'est l'enfant qui garde la capacité de s'émerveiller et de grandir face à chaque expérience nouvelle.


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source: La Vie