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"Bactérie-boom" dans l'intestin du bébé
CATHERINE PETITNICOLAS.
Publié le 26 juin 2007
Juste après la naissance, l'intestin du tout-petit est colonisé par des bactéries d'origines très différentes, provenant notamment du contact corporel avec les proches qui l'ont manipulé ou
caressé.
Fineberg/AP.
Des chercheurs américains ont analysé la très rapide colonisation bactérienne du tube digestif de 14 nouveau-nés.
LORSQU'UN bébé vient au monde, son tube digestif n'héberge rigoureusement aucune bactérie. Il est totalement stérile. Mais très vite, il va être colonisé par une
extraordinaire flore bactérienne intestinale dont le nombre dépassera très vite la centaine de milliards !
Des chercheurs du Centre médical de l'université de Stanford et du Howard Hughes Medical Center aux États-Unis se sont intéressés à la façon dont ces micro-organismes vont s'installer dans ce
milieu au cours de la première année de vie dans une étude publiée hier dans le journal PLoS (Public Library of Science Biology). Cette étude montre, grâce à l'utilisation de micropuces
génétiques permettant de détecter très vite tel ou tel type d'espèce microbienne, comment chaque bébé a un profil bactérien qui lui est propre. Et ce à différentes étapes de sa première année. Il
existe donc de très fortes variations dans la composition d'une flore intestinale saine chez un nourrisson, insistent les chercheurs. Mais à l'issue de ces douze premiers mois très chaotiques,
cette colonisation bactérienne se rapproche d'un profil calqué sur celui de l'adulte. Car très vite se mettent en place des micro-organismes absolument essentiels au bon développement de
l'espèce.
Indispensables au système immunitaire
Extraordinaire usine à transformer les aliments en nutriments vitaux, notre tube digestif abrite des centaines de milliers de milliards de « bonnes » bactéries qui participent
certes à la digestion. Mais aussi à la régulation de l'absorption des graisses, à la protection de l'organisme, à la stimulation de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins et probablement
encore à de nombreuses autres fonctions inconnues.
« Je ne sais pas à quoi un être humain ressemblerait si son tube digestif n'était pas envahi par ces milliards de bactéries » s'amuse la généticienne Chana Palmer, l'auteur
principal de cette publication, alors étudiante dans le département de biochimie du Pr Patrick Brown à Stanford. « Non seulement elles nous aident à extraire l'essentiel des
nutriments des aliments, mais elles sont indispensables au système immunitaire en nous protégeant contre les bactéries nuisibles. »
Ces chercheurs ont analysé l'écosystème intestinal de 14 nouveau-nés en bonne santé, nés à terme et nourris au sein, en se basant sur l'étude de leurs selles à des moments clés de leur
évolution (introduction d'une nourriture solide, prise d'antibiotiques, etc.) ; 26 échantillons en moyenne ont été récupérés de la naissance à l'âge de un an, comparés à ceux de leur
mère et de leur père, et analysés à l'aide de micropuces d'ADN.
Juste après la naissance, l'intestin du tout-petit est colonisé par des microbes d'origines très différentes, provenant des muqueuses vaginales de la mère lors de l'accouchement, du mamelon
lors de la tétée, ou d'un contact corporel avec tous les proches qui l'auront manipulé ou caressé. Tant et si bien que le bébé héberge très vite des colonies bactériennes florissantes. Sauf ceux
nés par césarienne sans contact avec les muqueuses maternelles. À la première semaine de vie, leur flore est moins riche que celle des bébés nés par les voies naturelles.
Mais ces colonies subissent des changements très importants, des hauts et des bas entre espèces au fil des mois. « Nous n'avons pas d'explication valable au fait qu'une famille
bactérienne en remplace une autre », reconnaît Chana Palmer.
En revanche, cette étude apporte une surprise de taille à propos du groupe Bifidus, une espèce réputée pour ses effets bénéfiques. Certaines études avaient montré que l'intestin d'un
bébé nourri au sein en contenait de plus grandes quantités. Ce qui n'a absolument pas été mis en évidence par Palmer et Brown. Il a fallu plusieurs mois avant que cette famille de bactéries ne
finisse par apparaître. Mais au final, il ne faut que douze mois au petit homme pour être pourvu d'un écosystème intestinal proche de celui de l'adulte.
Source : http://www.lefigaro.fr/