Après le Texas, Bilbao et les Açores, la dixième édition du Red Bull Cliff Diving World Series 2018 se tenait ce weekend dans le cadre idyllique du Lac des Quatre-Cantons, à Sisikon, en face de la prairie du Grütli. Ici, près d’une trentaine de plongeurs étaient en compétition pour s’élancer d’une plateforme haute de 27m pour les hommes, 21m pour les femmes, avant d’atterrir près de trois secondes plus tard à une vitesse de 85km/h dans une eau fraîche. Autour du point d’impact s’époumonait la foule des spectateurs, répartis entre bateaux, canoës et licornes gonflables.
Pour rappel, débutée en 2009, la compétition des plongeurs en milieu naturel s’est vue soutenue, puis pérennisée, grâce au partenariat avec la marque autrichienne Red Bull. Très active en matière de sponsoring et marketing, c’est tout naturellement que la société aux taureaux ailés s’est penchée sur le sport extrême qu’est le cliff diving. Après cinq ans où seuls les hommes étaient en compétition, les femmes ont eu droit à leur propre catégorie. Hommes et femmes sont ainsi jugés au travers de leur position de départ, le nombre de twists effectués ou encore leur arrivée dans l’eau, censée produire le moins d’éclaboussures possibles sur les juges, présents à quelques mètres, à l’affût du moindre détail. Cette saison, « nouveautés et innovations sont au programme », nous révèle presque secrètement Greg Louganis, cinq fois champion du monde de plongeon, qui a repris cette année le poste de directeur sportif laissé vacant par le départ de Niki Stajkovic. « Nous avons crée d’absolues mesures de protection pour nos athlètes et donnons les meilleures conditions de pratique afin d’atteindre le succès escompté par tous », enchaîne-t-il avec le sourire tout en nous emmenant vers le plongeoir afin de nous offrir les sensations fortes que ressentent les plongeurs avant de s’élancer dans le vide.
Pour cette dixième édition, c’est donc depuis une passerelle flambant neuve que s’élancent les athlètes. Sous le regard des juges, chacun et chacune cherche à démontrer l’essence-même du cliff diving : concentration, aptitudes et contrôle physiques. Hauteur 27 m, temps de chute trois secondes, pointe de vitesse 85 km/h. Envoûtantes et pleines de créativité, les pirouettes originales qu’offrent les plongeurs cherchent à surprendre et éblouir juges et public. Pousser les limites du sport et de son propre corps, quoi de meilleur comme challenge ?!
Il reste encore trois étapes en Europe avant la fin du championnat Red Bull Cliff Diving Wolrd Series 2018: Copenhague, Mostar et Polignano a Mare. Encore de grands moments de sport en prévision. Que le meilleur gagne !
La Suisse dignement représentée
Parmi les plongeurs, un seul Suisse en lice : le prodigieux Matthias Appenzeller. Nous avons eu l’occasion de rencontrer ce plongeur de l’extrême au destin prometteur, étudiant en droit au quotidien. Ce jeune homme de tout juste vingt-quatre ans était avant tout un nageur et plongeur en bassin, plein d’ambition. Mais, entre sept à neuf entraînements par semaine, le gymnase et la vie trépidante d’étudiant, le jeune zurichois s’affaiblissait sous une pression trop écrasante pour son âge. A dix-neuf, il décide donc de quitter le monde de la natation pour le plongeon en milieu naturel, le cliff diving. Il estime que la pression y est moins présente, alors que les techniques sportives nécessaires sont les mêmes qu’il avait déjà apprises auparavant. Quant à l’adrénaline, elle, elle est à son comble. Il prend vite goût à ce sport extrême et démontre des performances spectaculaires. C’est après avoir posté une vidéo de ses exploits sur Youtube il y a tout juste quelques mois que Matthias Appenzeller a été remarqué et par la suite convié au Red Bull Cliff Diving World Series 2018. Wild Card en poche pour cette première compétition, l’athlète est tout ce qu’il y a de plus enthousiaste. Et pour cause…Rencontre.
Interview du plongeur suisse Matthias Appenzeller
Isabelle Guignet – Qu’avez-vous ressenti comme sensations lorsque vous étiez sur le plongeoir aujourd’hui, prêt à sauter ? Matthias Appenzeller – Cette compétition à Sisikon est une grande première pour moi. Tout est nouveau! En plus, pour ma première participation à une manche du Red Bull Cliff Diving, je jouais à domicile! J’ai ressenti de ce fait beaucoup de nervosité, entre autres parce que ma famille et mes amis étaient là pour me voir. Mais après quelques sauts, tout est rentré dans l’ordre. Quel plaisir j’ai eu ! J’ai hâte de la suite.
Quel est votre plus grand vice ? Je n’en ai pas vraiment. Je n’ai jamais fumé ou pris de drogues. Quelques verres d’alcool étant plus jeune avec des amis ou en réunion de famille, mais maintenant, il faut un mode de vie stricte pour les compétitions, donc…
Qu’est ce qui vous fait peur ? De ne pas avoir de plan pour le futur. J’ai réellement besoin de me fixer des objectifs, de savoir où je vais, ce que je dois faire l’année à venir et d’avancer jour après jour.
Vous êtes plutôt Facebook ou Twitter ? Instagram avant tout ! Ahah, sinon Facebook.
Qu’est-ce que vos parents vous ont légué de plus précieux ? Leur soutien inconditionnel depuis mon plus jeune âge. Mais aussi d’apprécier ce que l’on a sans être continuellement dans la quête de plus, de mieux, encore et encore. Être heureux avec ce que l’on possède, tout simplement.
Quelle serait la bande-son de votre vie ? « Fly away » de Lenny Kravitz
Où vous voyez-vous dans dix ans ? Etant actuellement en étude de droit, je dirais que j’ai envie d’atteindre un poste de procureur ou diplomate. Sans pour autant mettre de côté le sport et les compétitions de plongeon, car j’aimerais rester dans ce milieu-là le plus longtemps possible !
Merci Matthias!
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Les Résultats
Au final de cette manche helvétique du championnat Red Bull Cliff Diving, c’est le Britannique Gary Hunt qui s’est imposé avec un total de 411,35 points chez les hommes, tandis que la Canadienne Lysanne Richard l’emportait dans l’épreuve féminine. Et qui de notre brave Matthias Appenzeller? Pour sa première participation à une compétition du genre, le local de l’étape s’est classé à une très honorable 10ème place.
– Isabelle Guignet
Photos Isabelle Guignet / Dean Treml / Romina Amato / Lucho Vidales