La vie, parfois, fait joliment les choses (porter des lunettes roses bien au-delà de l'âge de raison peut évidemment aider). Je me suis posée là où la vie m'a portée, avec pour seule règle d'or de ne jamais revenir en arrière. Adelante, vous vous souvenez ? Un pas devant l'autre, toujours.
Ainsi nous voilà rue du Ruisseau. Son clapotis la nuit, son petit pont, ses débordements, ses méandres. La vie, fluide, et toujours recommencée. L'eau douce en souvenir de l'eau salée, la mer si loin.
Et puis le chemin qui longe le ruisseau, à la fraîcheur de l'aube, baskets aux pieds avant le tourbillon du matin. En traînant nos sandales, le soir, apercevoir la cigogne - et lui rappeler en riant que nous sommes au complet. Quand la chaleur retombe enfin, sauter sur les vélos avec nos robes à fleurs qui prennent le vent, céder le passage à une biche et trouver d'autres boucles, d'autres ponts, une promesse de baignade dans l'eau claire, on reviendra demain. Demain on y pensera, bien sûr, et puis on aura trop chaud, sans doute, pour ressortir les vélos, envie de faire la sieste à l'ombre en observant les chatons du jardin jouer, alors on dirait après-demain?
Je n'ai pas vraiment choisi de vivre là, c'est vrai, mais j'en suis reconnaissante. Quelques mois, quelques années, tisser un nouveau cocon, laisser s'envoler un à un les papillons. Je ne sais pas ce que la vie me réserve, mais j'accepte ses cadeaux.