Gamin je montais déjà avec les parents au refuge de Sales. Puis j’ai découvert l’escalade, l’alpinisme, gravi mon premier 3000 avec le Buet. Jamais je n’ai cessé de me tortiller dans ce Haut Giffre que je surnomme affectueusement ma déchetterie (#dechettery) depuis une soirée décalée au refuge du Folly. J’ai poncé et re-poncé le livre “100 sommets” de François Labande, d’ailleurs les pages se détachent depuis bien longtemps. La course 8 est l’arête nord de la Pointe de Sales, dont il a ouvert la sortie en 1971 avec deux amis. Ca faisait tellement longtemps que je l’avais en tête cette course, dans un tiroir. Il faut dire qu’elle intimide. La cotation n’est pas élevée (D seulement), mais la qualité du rocher n’attise pas les convoitises. Et surtout on n’évolue pas toujours sur du rocher, loin de là. Entre pentes d’herbes, éboulis et gradins de schiste, il faut trouver sa voie. J’ai ouvert le tiroir, et en cherchant plus d’infos sur l’itinéraire je suis tombé sur ces photos de Nicolas Annereau. Le topo Camptocamp imprimé dans la poche, nous avons passé une sacrée journée vivifiante, une belle aventure bien loin des standards actuels.
L’arête vue d’en hautSi vous êtes prêts à lâcher prise, à pousser plus que tirer sur les prises, et que vous avez une expérience solide dans la grimpe en terrain d’aventure je ne peux que vous conseiller de parcourir cette arête. Mais attention c’est une course délicate, parsemée de quelques sangles et pitons, où la chute est interdite à de très nombreux passages, où il faut savoir et accepter de grimper à corde tendue assez souvent. Néanmoins ce n’est jamais difficile… si on est au bon endroit.
Prévoyez une corde de 50m (nous avions 40 mais j’ai trouvé ça un peu court), une jeu de coinceurs et Camalots petits à moyens, un casque (quand l’énorme bouquetin est coincé sur la vire au dessus de toi et qu’il s’échappe à fond la caisse, il fait le ménage), pas mal de sangles dont au moins une de 240 pour coiffer des gros blocs.
Nous avons grimpé en baskets d’approche et avons sorti les chaussons pour quelques passages plus grimpant. On peut aisément se passer des chaussons. Par contre je déconseillerais d’éviter un temps humide car beaucoup de passages en herbe sont bien raides.
Parlons de l’itinéraire.
Trouver l’attaque est assez simple et on arrive échauffé. Au début du couloir on voit un piton avec un maillon rapide à 5 mètres environ. Ne pas essayer de monter à gauche au début en espérant trouver une bonne terrasse pour s’équiper, c’est un leurre. Je n’ai vraiment pas aimé ce premier couloir, raide et improtégeable même si c’est facile. Mal réveillé, tendu, je n’ai pas trouvé le deuxième relais, raté quelques pitons, et nous l’avons sorti en corde tendue.
L’arête est ensuite plaisante en herbe facile puis on arrive sur 2 belles longueurs en beau calcaire, belle ambiance raide. On trouve un relais sur un très grand anneau en corde noire.
On retrouve ensuite du terrain à chamois agréable et tellement sauvage pour éviter les tours par la gauche. Le contournement de la dernière tour ne nous inspirait pas alors nous sommes descendu à droite dans un couloir puis nous avons rejoint l’itinéraire normal plus loin, au “mur plus raide de 15 m”. Cette variante passe bien mais il faut traverser plus loin après avoir descendu, logique. C’est là que le bouquetin nous a accueilli. Nous verrons alors un relais à l’envers de cette dernière tour.
Ce “mur plus raide de 15 m” demande un peu de précaution vu la qualité du rocher, je l’ai assuré du haut avec un super relais norme “ISO-dechettery”, calé derrière un bloc. Il y a une bonne fissure plus haut pour faire un relais béton mais la corde peut faire tomber des pierres. Le petit mur suivant est joli et on fait relais sur un bloc avec une sangle de 240. Reste plus qu’à traverser à droite pour une dernière longueur de IV+ en bon calcaire gris.
La bascule sur le plateau sommital est un moment délicieux. C’est tellement bon de relâcher la pression dans l’herbe grasse et de courir sur les lapiaz. Mais celui qui ne va pas au vrai sommet et qui ne s’arrête pas pour boire un coup au refuge de Sales, je lui coupe les doigts! Pour moi la Pointe de Bellegarde était le plus beau point de vue du Haut Giffre jusqu’à présent, mais la Pointe de Sales a également de sacrés arguments. Entre massif du Mont Blanc et Buet, dominant les alpages d’Anterne, c’est dur de se décider à redescendre vers la vie moderne (j’écris ça car je suis en vacances).
Faut y aller à cette Arête Nord de la Pointe de Sales! Et si vous y allez, racontez nous car c’est le genre d’aventure dont on peut parler des heures et des heures en buvant des canons. Et puis comme ça vous pourrez dire “j’ai grimpé aux Fiz”. Même si ce n’est pas “Les Yeux dans le Bleu“… c’est autre chose…
Le compte-rendu de la sortie sur Camptocamp, arête nord de la Pointe de Sales:
www.camptocamp.org/outings/1024730/fr/pointe-de-sales-arete-n
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