Critique de Deux fois rien, de Grég Allaeys et Benoît Dendievel, vu le 19 juillet 2018 à l’Albatros
Avec Grég Allaeys (les mots), Benoît Dendievel (le piano), dans une mise en scène de Angélique Catel
Essayer de varier les plaisirs : si je vois très peu de classiques dans le OFF, j’essaie quand même parfois de revenir à la base, c’est-à-dire aux mots. J’aime les spectacles qui jouent avec les mots, les propositions littéraires un peu barrées comme pouvait l’être le Pourquoi ? de Michaël Hirsch présenté à plusieurs reprises au Festival. Sur un style qui semble très différent, ce spectacle m’a interpelée : non, on ne peut pas dire que je n’aime pas la poésie, mais oui, c’est vrai que je m’y connais peu car ce n’est pas le genre littéraire vers lequel je me tourne lorsque j’ai un moment. Alors, j’ai hâte de savoir ce que ces deux messieurs ont à me dire sur le sujet.
J’ai d’abord été très déçue. Déçue car finalement moi qui venais retrouver de grands classiques de poésies, c’est de la poésie contemporaine qu’on me présentait – ça m’apprendra à ne pas lire les résumés. Déçue aussi parce que la trame me semble bien superflue : les deux compères se prétendent en conflit sur le sujet du spectacle, un spectacle ou un concert ? A mon avis, cette fausse dispute est un prétexte à ne pas juste dire de la poésie, mais elle est inutile.
En effet, malgré ma déception première, je ne me braque pas. J’écoute les textes qui me sont proposés. Et je me laisse emporter. Voilà un moment bienvenu dans la folie avignonnaise, un moment de douceur, de pureté, de partage total. Un moment juste entre nous. Les textes sont parfois un peu naïfs mais ils me bercent. Et la poésie est des deux côtés : tant du bout de la plume de Greg Alleys que du bout des doigts de Benoît Dendeviel. Ses harmonies musicales sont un plaisir à écouter.
Alors la vie, la mort, le quotidien, l’amour, les naissances, mais aussi quelques sujets plus sociétaux avec Amour Akbar, autant de thèmes abordés dans les poésies de Greg Alleys. Beaucoup de jeux de mots, aussi ; certains un peu gros, d’autres plus raffinés, qui provoquent un sourire le temps que le cerveau dénoue la subtilité (« la super ficelle dans un monde d’artifice… »). Je n’aurais mis ni ce titre ni cette trame ; j’aurais juste écouté la poésie et la musique. Et c’est tout.
Retrouver le plaisir de se laisser porter à un tempo plus lent. Rare, en Avignon.