Recueil autobiographique - 100 pages
Editions Signes et Balises - juin 2018
Nikos Kavvadias est un jeune homme de 22 ans, né de parents grecs. Nous sommes en 1932 et par nécessité financière, il s'engage comme marin sans cesser d'écrire, en tenant un journal de bord. Il y raconte les difficultés du quotidien, l'envers du décor des voiliers, les parenthèses enchanteresses des escales, les ports qu'on aperçoit, les intempéries et les drames.
Malgré son jeune âge, l'écriture de Nikos Kavvadias est frappante de maturité, très assurée et poétique, elle nous emmène au gré de ses observations, de ses divagations, des ses voyages, du vent et des flots….Mais malgré ses voyages et sa maturité, on pourra regretter sa misogynie, décrivant les femmes comme faites pour regarder sagement par les fenêtres ou pour lire des romans à l'eau de rose, mais bien incapables d'apprécier l'écriture des marins aventuriers !
Extrait :"Je ne suis pas descendu du bateau à Port Saïd. Je suis resté des heures à regarder le bout du canal, du côté de la mer Rouge, m’imaginant des ports avec mes yeux aveuglés par le soleil. Et lorsque, à la tombée de la nuit, j’ai entendu qu’on levait l’ancre, j’ai eu l’impression d’être le modeste héros du conte qui reste des heures devant la porte ouverte d’un jardin enchanté, en se contentant de respirer le parfum enivrant des fleurs et en écoutant gazouiller des oiseaux invisibles, sans pouvoir pénétrer dans le jardin, parce qu’on l’a attaché. Et quand le bateau est reparti, je suis resté à l’arrière, près du loch, en regardant clignoter l’œil énorme du phare, submergé par un chagrin semblable à celui qu’on éprouve quand on laisse passer une occasion de s’enfuir.”
On regrette aussi que soit resté inachevé le récit consacré à "l'incroyable aventure du chef d'équipage Nakahanamoko".Journal d'un timonier est un très beau recueil de récits, tant sur la forme par son petit format si léger, sa couverture graphique qui se déplie sous nos yeux pour lancer le voyage, si élégante…. que sur le fond par la qualité des textes que l'on savoure comme autant d'escapades dans le temps, hors du temps, sur les mers.Quel souffle, quelle plume !! J'ai très envie de lire le seul roman de ce poète des mers : Le Quart, paru en 1954.