Critique de L’année de Richard, d’Angélica Liddell, vu le 17 juillet 2018 à l’Artéphile
Avec Azeddine Benamara, Lauriane Durix et Alexis Sébileau, dans une mise en scène de Anne-Frédérique Bourget
L’un des principes du OFF, c’est quand même d’écouter les conseils de son voisin. Et lorsque vous faites une confiance aveugle à votre voisin, c’est encore mieux : j’ai échangé avec Le Théâtre Côté Coeur peu avant le Festival, lors de la dernière émission de Radio Mortimer de l’année et la conversation a rapidement dévié vers les compagnies que nous suivions et que nous attendions pour le OFF18. Connaissant déjà la Compagnie Maskantête, elle m’a donc parlé de L’année de Richard qui se joue à l’Artéphile, et qui signe donc ma deuxième rencontre avec un texte d’Angélica Liddell.
« Je veux un parti ». Quelque part entre un enfant capricieux et un dictateur, Richard prononce cette phrase sans honte. Il ne masque pas son désir de pouvoir. Qu’importe les moyens, il obtiendra ce qu’il est venu chercher. Il sait manier les mots, manier les idées, manier les foules pour arriver à ses fins. Il nous montre une campagne où tous les moyens sont mis au service de son ultime désir. Et tant pis pour le programme.
Étonnant texte. Écrit au début des années 2000, il pourrait passer pour visionnaire tant il fait écho à des événements récents. J’ai été étonnée de découvrir Angélica Liddell dans pareil registre, moi qui ne la connaissais que par ses performances. Assurément son texte accuse autant qu’il dénonce. Il met le spectateur dans une situation délicate en lui tendant un miroir, déformé car caricatural, certes, mais tout de même révélateur.
Azeddine Benamara s’est presque trompé de spectacle. Il est Richard III plus que le Richard moderne que dénonce le texte. S’il crie beaucoup pour captiver, on pourrait lui conseiller de baisser le son, de ralentir la cadence : il n’a pas besoin de ça. Sur scène, il séduit, il envoûte, il captive. Une sorte d’aura. Ça lui va bien. A ses côtés, Lauriane Durix est assurément l’atout-charme du spectacle. Peut-être finalement le détail le plus manipulateur. On s’en veut presque de ne pouvoir détacher notre regard de son corps, mais ses gestes, ses danses, ses oeillades d’un bleu clair, malicieux, et déterminé ont quelque chose d’hypnotisant.
Angelica Liddell se donne des airs de Shakespeare. Le mélange est intéressant.