Critique des Mandibules, de Louis Calaferte, vu le 18 juillet 2018 au Grenier à Sel
Avec Toni D’Antonio, Sophie Delogne, Patrick Pelloquet, Hélène Raimbault, Didier Royant, Robin Van Dyck, Cécile Van Snick, dans une mise en scène de Patrick Pelloquet
J’ai découvert Patrick Pelloquet il y a 2 ans, lors du Festival d’Avignon 2016 : il montait alors un Labiche que je ne connaissais pas, L’affaire de la rue de Lourcine, avec une patte noire et un sens du rythme très particuliers qui m’avaient alors beaucoup plu. J’ai eu plaisir à le retrouver par la suite au Théâtre 14, déjà pour un Louis Calaferte, et je guette depuis son nom sur le programme du OFF. Le rendez-vous fut donc pris dès que je l’y ai repéré !
On est quelque part dans une futur proche. On suit deux familles, les Walter et les Wilfried, et leurs enfants, Baby et Babett. Enfin, on suit surtout leurs habitudes alimentaires… voraces. Chaque soir, les enfants reprennent plusieurs fois de chaque plat et dessert disposé sur la table. Lorsque les Walter invitent les Wilfried à dîner, c’est pas moins de 8 plats qui sont préparés pour l’occasion. Manger bien, c’est synonyme de confort. Alors ils s’empiffrent de manière démesurée… jusqu’à causer une extinction de viande.
Avant toute chose, je dois dire que Calaferte traite là d’un sujet qui m’intéresse beaucoup. C’est un vrai sujet. Si la consommation des familles présentées dans le spectacle est évidemment caricaturale, elle est cependant fortement inspirée de notre surconsommation actuelle. Nous mangeons trop de viande par rapport à nos besoins, et, de manière générale, nous avons tendance à nous gaver à chaque repas, sans limite, comme des « bons vivants ». Mais des bons vivants ne respecteraient-ils pas mieux le monde qui les entoure ?
Pour mon deuxième Calaferte, je dois dire que j’ai toujours un peu de mal avec son écriture. Il y a quelque chose proche de l’absurde, beaucoup de répétitions, un peu de caricature. Sa plume n’est pas de celles que je préfère. Mais il faut bien reconnaître qu’il ne pourrait être mieux mis en scène que par Patrick Pelloquet, qui sert au mieux le texte et en fait ressortir toute la cruauté, le vice, et la part d’humour noir.
Le spectacle est rythmé au cordeau, les comédiens sont excellents, le jeu de miroir entre les deux familles est très réussi. Cela demande une minutie incroyable de parvenir à faire entendre si bien le texte à partir d’une scénographie aussi codée et stricte, parvenant ainsi à mettre en valeur le rôle de la nourriture dans les liens sociaux. Le spectacle n’est que nourriture et rien qu’en entendre parler durant toute la pièce nous rend l’estomac lourd et l’impression de satiété bien présente. Digestion du spectacle… difficile.
A consommer sans modération.