Critique de Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty, de Eric Bu et Elodie Menant, vu le 15 juillet 2018 au Théâtre du Roi René
Avec Céline Espérin, Élodie Menant, Marc Pistolesi, et Cédric Revollon, dans une mise en scène de Johanna Boyé
Chaque année à la sortie du programme du OFF, c’est la même routine : rechercher les noms des comédiens, compagnies, metteurs en scène que je suis depuis quelques années. Et parmi eux, Marc Pistolesi, découvert lorsqu’existait encore Les Carboni (depuis recréée partiellement sous le nom de La Team Rocket Cie). J’avais découvert son Léonard il y a deux ans, il était également metteur en scène du merveilleux Ivo Livi, et c’est donc avec joie que je vais découvrir le nouveau spectacle dans lequel il joue, et qui ouvrira mon Festival 2018 !
Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty fait évidemment référence à la réplique culte prononcée par Arletty dans Hotel du Nord. A travers la pièce, c’est donc la vie de la comédienne dans le Paris des années folles qui nous est retranscrite. C’est d’ailleurs le personnage d’Arletty elle-même qui choisit de nous raconter les épisodes choisis – enfin, jusqu’à ce que son passé la rattrape et que certains moralisateurs décident de s’incruster dans son propre spectacle…
C’est globalement un très bon moment proposé au Théâtre du Roi René. La plongée dans les années folles est réussie : le Charleston, les paillettes, l’accent parisien, tout est fait pour nous suggérer qu’une faille temporelle nous a transporté dans une autre année. Participent à cette ambiance revigorante des comédiens en grande forme : si on retrouve avec joie l’entrain, le charme et la justesse de Marc Pistolesi, je découvre en Élodie Menant une Arletty fidèle, respirant une liberté sur laquelle les années ne semblent avoir d’emprise. Une Arletty qu’on aurait envie de suivre, d’imiter, de retrouver dans le Paris d’aujourd’hui, mais une Arletty définitivement ancrée dans le début du siècle. Une super Arletty.
Cependant je reste un peu sur ma faim, et je soupçonne une petite faiblesse au niveau du rythme d’en être la cause. Si l’histoire de la vie d’Arletty est menée avec ferveur, elle s’amenuise avec le temps, lorsque les soupçons de collaboration font leur apparition. Ce changement brusque d’atmosphère casse le rythme et peine à trouver sa place dans le spectacle. Comme si les auteurs avaient voulu en dire trop, sans parvenir à introduire chaque élément avec pertinence. Par ailleurs, j’aurais espéré davantage de chants, de danse, de moments de groupe pour rythmer le spectacle. Mais ce bémol est aussi dû aux nombreux problèmes techniques survenus lors de ma représentation, et le spectacle récupère probablement un meilleur tempo en temps normal.
Un petit saut dans le Paris des années folles. Conseillé !