Chaque année en juin-juillet se renouvèlent les fêtes du Heiva dans les îles de Tahiti.
Avant l’arrivée des missionnaires, à la fin du 18e siècle, les Polynésiens se vêtaient d’un cache-sexe (maro), et les femmes ajoutaient un grand morceau de tissu appelé tapa qu’elles nouaient pour se faire une robe (ahu). Les missionnaires, gens de robe eux-mêmes, mais protestants - ont imposé aux femmes, impudiques selon leurs canons, des robes dites « missionnaires », qui devaient couvrir les bras et tout le corps. C’était inconfortable et trop chaud, mais le Dieu des Chrétiens semblait l’avoir « voulu » ainsi, selon ses interprètes venus à voile.
Qu’est-ce que le tapa ? C’est une étoffe végétale obtenue d’une écorce battue. Le mûrier à papier (Broussonetia papyrifera) donnera une étoffe blanche, l’arbre à pain (Uru Artocarpus altilis) ou le Ficus prolixa donneront une étoffe rouge-brun. L’écorce est prélevée par bandes. Elle est trempée pendant deux ou trois jours pour l’assouplir. On la gratte pour ne conserver que le liber. Elle est ensuite battue sur une enclume : soit une pierre, soit un tronc d’arbre dur. Le battoir a une section carrée et ses faces sont gravées de rainures de différentes finesses. Ce travail est long, fastidieux. L’écorce est repliée plusieurs fois sur elle-même durant cette opération. Le résultat forme une sorte de feutre végétal où la fibre est entrecroisée et affinée.
Dans le tapa ainsi préparé seront créés les costumes des danseurs et danseuses, des musiciens et de leur chef, pour les spectacles du Heiva. Les costumes sont contrôlés par le jury car le Heiva est un concours. Ainsi tout costume déjà présenté lors d’un Heiva précédent ne pourra l’être de nouveau.
De nombreuses règles régissent le concours du Heiva : utilisation exclusive de matières végétales, inspiration artisanale. Place Toat’a, lieu où se produiront les groupes en concurrence, vous y verrez des groupes de chants et des groupes de danse. Pour l’otea, on porte la jupe de fibres végétales (moré). Les danseurs sont disposés en plusieurs rangées et exécutent diverses figures. Pour l’aparima, ils portent le paréo (paréou) qui habille les danseurs. Le pa’oa est une danse traditionnelle où, vêtu de tapa blanc, l’on chante et tape des mains sur les cuisses. Dans le hivinau, les danseurs tournent par couple autour de l’orchestre.
Les sports et jeux du Heiva reprennent les activités traditionnelles polynésiennes.
Le lancer de javelot (teka) s’effectue en tenue locale (paréos, couronnes et colliers en végétaux). Le but est de toucher un coco placé en haut d’un mât de 9m50 situé à 22 m avec un javelot en bois. Il faut savoir maîtriser l’engin pour diriger la trajectoire flottante. C’est la discipline majeure des sports traditionnels.
Le lever de pierre (amoraa ofai) réclame de soulever une pierre du sol, le plus rapidement possible, et de la stabiliser sur l’épaule. Cette épreuve de force est originaire de l’île de Rurutu dans l’archipel des Australes. Autrefois, la pierre était enduite de monoï afin qu’elle soit plus difficile à attraper et à garder ! Les femmes portent une pierre d’environ 60 kg ; les hommes de 80 à 150 kg, en fonction des catégories dans lesquelles ils s’inscrivent.
La pirogue à voile (vaa taei) est l’attraction principale du ballet sur l’eau. Il faudrait plus de pirogues à voile car il n’en reste que peu à Papeete et à Bora Bora. Les mauvaises langues parlent de 10 dont 3 seulement seraient neuves et fiables ! Difficile à manier, il faut beaucoup d’habileté au barreur pour maintenir l’équilibre de cette Belle, avec un seul balancier et beaucoup de risques de chavirage.
Le décorticage des cocos est une épreuve individuelle ou par équipe de 3 femmes ou 3 hommes. Tous sont en tenue traditionnelle pour ce concours. Il leur faut fendre, ouvrir, extraire et mettre en sac la pulpe de noix de coco avec, comme seuls outils, une hache (opahi), un instrument pour décortiquer (paaro), un tabouret (parahiraa) et des sacs en toile de jute (puté). Tout cela en un minimum de temps. Trois catégories sont distinguées : individuel homme : 50 noix, équipe de trois hommes : 150 noix, équipe de trois femmes : 100 noix.
La course de porteurs de fruits est toujours pratiquée de nos jours par les cueilleurs d’oranges de la Punaaru à Punaauia. L’épreuve du concours consiste dans le portage d’une charge de produits agricoles d’un poids déterminé, sur une distance de 1800 m pour les hommes et 1100 m pour les femmes. Elle attire toujours beaucoup de monde au Heiva, peut-être parce qu’elle est pratiquée pour le travail et donne à admirer la vigueur des concurrents en pagnes. Ces épreuves sont réalisées pieds nus, avec deux charges de fruits ou tubercules aux extrémités d’un bambou porté sur l’épaule. Là encore, il faut être en tenue locale et tout doit être végétal. Les charges sont de 15 kg pour les femmes et de 20 à 50 kg pour les hommes suivant les catégories.
Les courses de vaa sont depuis quelques années le plus grand évènement du Heiva et le plus prisé du public. Après le football, c’est le sport le plus populaire au fenua. Il montre le lien ancestral qui unit les Polynésiens à la mer. Il existe des épreuves de vitesse dans le lagon avec des vaa dites V3, V6 et V16 (le chiffre donne le nombre de rameurs) sur une distance de 3500 m. Il existe aussi des courses en haute mer dans des vaa à 6 rameurs. Cette année encore, on a pu constater que la rade de Papeete est bien étroite pour assurer un départ correct de tous les vaa et leurs rameurs engagés !
Sabine
Programme du Heiva en juillet sur le Tahiti traveler
Présentation du Heiva en anglais
Abcédaire fenua
Radio-France Outremer
Le blog Pacifac d’Annie vahiné sur lemonde.fr
Le blog Tahiti va’a parau sur lemonde.fr
Le portail du Ministère de la Culture sur le patrimoine polynésien