Si les algorithmes actuels sont doués d'extraordinaires capacités de calcul et d'analyse, dont il ne fait plus de doute qu'elles dépasseront totalement celles de l'humanité à relativement court terme, notre cerveau conserve l'avantage sur 3 domaines : la curiosité, la créativité et la communication. On peut contester la notion, avancée par C. Nunn, que cette exclusivité soit éternelle, mais il faut bien admettre que, pour l'instant et dans un avenir immédiat, notre domination sur ces terrains ne paraît guère menacée.
La curiosité est ce qui nous incite à poser des questions, à remettre en cause des systèmes établis, à rechercher des raisons profondes à toutes sortes de faits, de situations, d'actions… La créativité est son complément naturel, qui nous pousse à imaginer de nouvelles solutions à partir de nos constats et de nos observations. Enfin, la communication, ou, plutôt, l'empathie, nous permet d'établir un lien entre les deux qualités précédentes, en appréhendant les besoins d'autrui, client ou employé.
À l'énoncé de cette définition, il ne peut faire aucun doute que de telles aptitudes sont plus que jamais indispensables dans une institution financière afin d'accompagner les mutations du monde qui nous entoure, qu'il s'agisse de fournir les services ultra-personnalisés qu'attendent les clients ou de rendre plus efficaces les modèles historiques, avec leurs processus et leurs plates-formes informatiques. Si l'objectif de HSBC est de conseiller ses collaborateurs sur les compétences à développer pour continuer à progresser et prospérer dans leur carrière, elle tape incontestablement dans le mille.
En revanche, il resterait à aborder la nécessaire transformation de la culture de la banque, sans laquelle ces qualités seront absolument inutiles. Quel intérêt de demander aux employés d'être curieux si la tradition et le management étouffent toute tentative de questionnement sur les pratiques en vigueur ? Pourquoi exiger de la créativité si le moindre projet est soumis à des méthodes d'un autre temps et des délais qui se mesurent en années ? Que faire de l'empathie et à quoi bon exercer son jugement s'il faut en toutes circonstances se conformer à des procédures inflexibles et parfois incohérentes ?
En d'autres termes, les qualités fondamentalement humaines ne peuvent apporter de valeur que dans des entreprises dont le fonctionnement n'est pas lui-même robotisé. Si l'organisation persiste à ne laisser aucune autonomie aux collaborateurs et leur impose de suivre constamment les règles strictes édictées « en haut », il vaut certainement mieux les remplacer par des automates. Mais ce n'est pas ainsi que la banque pourra répondre aux besoins de ses clients et il s'agit donc d'une voie assurée vers l'obsolescence.