Derrière, se dessinent sans surprise des enjeux de souveraineté face auxquels l’Europe tarde à réagir, surtout à se donner les moyens. Le vieux continent a en effet manqué suffisamment de virages technologiques pour ne pas laisser passer celui-là. Comme l’a très justement dit Victor Hugo, « En temps de révolution, qui est neutre est impuissant. » En 2016, la Commission Européenne annonçait une enveloppe de 50 milliards d’euros à destination de l’industrie 4.0 dont à peine 1 milliard dédié à la recherche quantique.
Autres articles
-
Quelles technologies feront l'expérience mobile de demain ?
-
Loi ELAN : réelles opportunités pour le marché de l'immobilier mais… à quel prix ?
-
Marchés : les stratégies «overlay» sont à même de répondre aux défis actuels
-
Barrières à l'entrée : attention aux lignes Maginot
-
Le recul des dépréciations de Goodwill du CAC 40 s’est accéléré en 2017
Reste qu’in fine, l’alternative européenne n’existe pas. Actuellement, c’est ce même schéma qui se reproduit avec l’ordinateur quantique, technologie d’avenir qui risque d’occuper une place considérable. Comme l’avait notifié la sénatrice Catherine Morin-Desailly, dans un rapport délivré à la Commission Européenne, « l’Europe est en passe de devenir une colonie du monde numérique, à la fois parce qu’elle devient dépendante de puissances étrangères et parce qu’il n’est peut-être pas exagéré de dire que le sous-développement la guette. » Depuis deux ans, Microsoft se livre à une véritable course contre la montre avec IBM et Google pour être le premier à sortir son ordinateur quantique et a annoncé début mai qu’il sera prêt d’ici… 5 ans ! Il est même envisagé de mettre cette technologie à disposition du plus grand nombre dans son cloud Azur.
De son côté, la Chine n’est pas en reste sur la question puisqu’elle annonçait en 2017 la mise en service du super ordinateur Sunway TaihuLight, considéré sur le moment comme le plus rapide du marché et voué à accélérer les recherches sur le quantique. L’université de Hefei s’est vu attribuer un budget de 10 milliards pour avancer sur la technologie. Pendant ce temps, l’industrie 4.0 annoncée par la Commission Européenne devait voir ses premiers projets lancés en 2018 et à échéance 2020. A ce jour, aucune actualité n’est arrivée jusqu’à nous. Côté français, le Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA) annonçait le 3 mai dernier un projet de coopération avec la société australienne Silicon Quantum Computing (SQC) pour créer un ordinateur profitant de cette technologie. Le 22 mai, le Commissariat s’associait également à Atos pour créer une chaire industrielle dédiée à l’informatique quantique. Financée par l’Agence Nationale de la Recherche, la structure bénéficiera d’un budget de… 1,2 millions d’euros. Une initiative encourageante mais insuffisante.
Pourtant, le danger d’un décrochage, que l’on risque de payer durant des décennies en termes de souveraineté et de retombées économiques, est flagrant. Il est urgent que l’Europe investisse massivement dans l’élaboration de son propre ordinateur quantique ! La France, en retard en matière de constitution de consortiums destinés à mutualiser les forces européennes, aurait tout intérêt à s’emparer du sujet. Nous éviterions ainsi aux startups de l’Union de devoir nécessairement migrer dans le Cloud du GAFAM pour rester dans la course. Un défi technologique incontournable, relevons-le !
A propos de l'auteur : Mickaël Réault est dirigeant-fondateur de Sindup.