Avec un nouveau record de fréquentation (145 000 personnes) et du soleil à ne plus savoir quoi en faire, le Garorock 2018 s’est parfaitement bien déroulé… Du moins jusqu’au dimanche midi, moment où les autorités ont décidé d’annuler la dernière journée de concert en raison des menaces orageuses. Retour donc sur trois (et non quatre) jours de festival.
Indochine était LA tête d’affiche du jeudi soir. Deux heures de concert, un Nicolas Sirkis qui ne tient pas en place, et des tubes qui s’enchaînent, le groupe a séduit tout le monde. « Canary Bay », « 3 nuits par semaine », « Tes Yeux Noirs » pour les vieux, « Paradize », « J’ai demandé à la lune », « Alice and June », « College Boy » pour les moins vieux. Quant aux fans nés après l’an 2000 (oui, ça y est, ils sont là), le dernier album était bien représenté : « 2033 », «Station 13 », « 13 ème vague », « La vie est belle », « Suffragettes bb ». Le visuel sursaturé donne des airs à la Warhol. Nicolas Sirkis s’arrête un moment pour annoncer qu’il a reçu un message d’un partisan du FN. Il nous le partage : « A l’anarchiste Nicolas Sirkis, qui est venu sur France 2 pour dégueuler sur ceux qui défendent la nation, incapable de chanter ni de faire une phrase, etc.». La foule hue. Et Nicolas de déclarer « Je ne suis peut être pas capable de faire une phrase mais on est capables de faire des morceaux, voici « Un été français » » ! Une introduction plutôt originale, on doit l’avouer. Nicolas Sirkis reprend la parole sur « College Boy » : « contre le harcèlement sexuel, contre le harcèlement moral, au travail, merci de votre tolérance ! » La foule approuve largement. Pour la fin, Nicolas Sirkis choisit (évidemment) « L’aventurier » qui fêtera ses 40 ans dans 4 ans. Tiens, claque dans la gueule.
Equipe de Foot ouvre le festival vendredi après-midi. Impossible de les rater après notre coup de cœur pour leur premier album. Forcément, ils sont habillés en joueurs de l’équipe de France, par contre, contrairement aux joueurs, ils ne font pas semblant. Une demi-heure (seulement) pour prendre son pied sur scène, le duo n’en perd pas une miette. Les gars commencent avec « IDWYTDT/Retard ». De la douceur, de la poésie en intro avant d’envoyer des gros riffs qui attaquent. Ensuite « Faking Poetry », et encore une feinte de chanson presque innocente qui dérape sur du trash ! Avec eux, on se marre. Le batteur annonce la prochaine chanson ainsi : « la prochaine chanson parle d’Alex qui se fait larguer et qui le prend très très mal. » Et le chanteur de crier « Chantaaaaaaaaaaal » (la preuve en photo). Les gars enchaînent sur « Une chanson d’amour qui parle d’un chat », autrement dit « Chapka ». Le concert se finit par un riff supervénère (oui je sais ca ne se dit pas) et le chanteur qui crie « allez bisouuuuuuuuuu ». Si on n’était pas réveillé, c’est fait. Et il vaut mieux, puisque quelques heures après, c’est Marilyn Manson qui va (on espère) égorger des poussins sur scène. Le voilà. Bon, la scénographie n’est pas extraordinaire. Un peu de fumée, un peu de déco, on est loin de Rammstein. Pas de maquillage, un simple trait noir grossier sur le visage. C’est un peu décevant, mais Marilyn Manson est une bête de scène et compense largement. Le chanteur entame « Irresponsible Hate Anthem ». Et Marilyn de scander « I hate psychiatry, it’s for pussies ! ». Pour introduire sa prochaine chanson, il fait monter deux jeunes filles du public, qui portent une banderole « We’d kill 4 you ». Il leur glisse un petit mot à l’oreille, et les filles s’empressent de retirer débardeur et soutien-gorge. Il faut croire que la cinquantaine réussit à certains. Marilyn Manson fait monter encore quelques personnes sur scène, dessine sur le torse de filles dénudées, récupère une culotte qui a atterri sur scène pour la mettre sur la tête de son guitariste… Il joue avec le public, improvise et s’en délecte. Marilyn termine son show par les classiques : « I dont like the drugs (but the drugs like me) », « The Dope Show », « Sweet dreams », et « Say10 ». Le show était propre et efficace, mais on est un tout petit peu déçus par les transitions parfois longues et vides (de simples noirs), et la scénographie réduite. Par contre, rien à redire, Marilyn Manson sait faire le show.
Le café de la Sunrise Session du samedi matin, c’est devant Lewis Evans. Un réveil folk, en douceur et en poésie. Mais c’est loin d’être facile pour le groupe. Ce matin, certains sont encore saouls, parfois irrespectueux, et montent sur la scène. « C’est le show le plus difficile de ma vie en France à 8 heures du matin. Ok les gars je perds le contrôle. Personne sur scène, je ne suis pas Kurt Cobain ! ». Lewis enchaîne sur « Spring », et chante aussi en français sur « Besoin d’ailleurs ». Il partage avec nous de belles émotions. Et là, le drame. Plus d’électricité. « Je joue sur la grande scène du coup ? » tente Lewis. Pendant que les techniciens s’affairent, le chanteur ne perd pas ses moyens, débranche sa guitare, et improvise un concert acoustique dans la pelouse, au cœur d’un petit cercle d’irrésistibles alcooliques. Le moment est beau, tout le monde écoute, Lewis demande une clope, un festivalier saoul lui en donne une, les blagues fusent, les imprévus rendent le moment unique. Après un rapide retour sur scène, deuxième coupure. Le chanteur rebondit tout de suite : « En fait c’est comme ça qu’on arrive à jouer 60 minutes. On n’a que cinq chansons, mais grâce à ce secret, on peut jouer bien plus longtemps ». Lewis Evans ne perd pas ses moyens, garde son sang froid, interagit avec un public difficile à gérer, toutes ces aventures ont ajouté un peu de pep’s à sa musique. C’était parfait comme ça (enfin peut être pas pour le groupe, faudrait leur demander). Après une sieste indispensable, on démarre la dernière soirée avec Fat White Family. Torse nu, pieds nus, sarouel, bière à la main, le chanteur a un air arrogant. Et ça le fait carrément. Les sept membres du groupe britannique délivrent un rock expérimental ultra efficace. Quelques airs psychédéliques rappellent Unknown Mortal Orchestra. Clairement une des meilleures découvertes de ce festival. On enchaîne avec Black Rebel Motorcycle Club. Avec autant de nonchalance que le groupe précédent, les BRMC ont confirmé la règle que le rock, c’est quand même vachement sexuel. Avec le chanteur qui jette son pied de micro, qui se prend un bain de foule, on sent la pointe de punk dans l’âme de ce groupe qui allie sagesse, grain de folie et charisme. Les classiques sont de sortie : « Beats the Devil’s Tattoo », « Berlin », « Red eyes and tears », « Spread your love », et bien sûr leur punk song « Whatever happened to my Rock’N’ Roll ».
The Vaccines clôturent le côté rock du festival. On ne les connaît pas, on y va sans vraiment savoir à quoi s’attendre. Le groupe entre en scène sur « Waterloo » de ABBA. Une bonne énergie se dégage de la scène, et le chanteur fait le show. Le public semble un peu jeune, et effectivement si la voix ressemble à celle des Strokes, et que certains riffs sont bien agités, on sent quand même une vague pop-rock adolescente. D’ailleurs, le batteur le confirme : « c’est une chanson d’amour, du coup les câlins, c’est maintenant ». Le groupe joue entre autres « Dream Lover » et « Turn My Radio for the Babies ». Bon, c’est pas mal, sans être vraiment original.
Finalement, merci bien Garorock ! On s'est régalé, et même l'évacuation le dernier jour c'était Rock'N'Roll !