J'ai eu le plaisir d'interviewer Délia Figueira , consultante en customer care.
Lors cette interview, elle nous livre les clés pour apporter un effet WOW dans son service clients digital.Vous trouverez à la fin de l'article l'enregistrement complet de son interview avec des conseils inédits, et ci dessous une synthèse de cet entretien.
Est ce que tu pourrais te présenter ?
Je m'appelle Délia Figueira. Je suis consultante en Customer Care & Customer Success pour des entreprises digitales (pure players) et pour des startups qui ont besoin qu'on leur prête main forte.
2 - De nombreuses entreprises veulent proposer une expérience client Exceptionnelle (l'effet "Wow") quel est ton point de vue ?
Le client de son côté se dit désormais " J'achète un produit ou un service, c'est normal que je demande à en être content et satisfait ".
C'est ce que pense le client quoiqu'il en soit, c'est le strict minimum.Certaines entreprises misent tout sur le produit qu'elles vendent (sans penser au client), et elles en oublient que le client est tout de même celui qui fait financièrement tourner l'entreprise...
Il ne faut donc plus vendre un produit, mais bien répondre à un besoin ou à un problème client.
L'effet Wow ne peut arriver que lorsque l'on va au delà des attentes (qui peuvent être totalement différentes d'un client à l'autre).
En quoi l'optimisation de l'Expérience Client diffère entre une activité Web et une activité 100% physique ?
Dans le web, la plupart des pure players vendent du service.
Même dans une market place comme Mano Mano, Sarenza, ou Blablacar le produit provient d'une autre marque, ou d'un consommateur.
Ce qui va différencier l'expérience c'est surtout la facilité pour commander (le site) et l'aide apportée au client.
Pour une entreprise "physique", de nombreux autres facteurs peuvent entrer en ligne de compte :
Sur le web, tout se passe en ligne avec un prospect seul devant son écran : il faut lui faciliter la vie, réduire les freins, fluidifier le parcours client, le rassurer... et optimiser le service rendu.
Attention au niveau de la promesse : personnellement , je n'aime pas forcément l'avantage concurrentiel souvent présenté sur le web : "rapide" / "plus brefs délais"... car ça ne s'applique pas à tout, et on se rend compte que le toujours "tout plus vite" commence à faire des dégâts au niveau de l'expérience client.
Par exemple, Just Eat communiquait sur la livraison à partir de 30 minutes. Ils ont arrêté de le faire.
Il faut savoir que la première source de réclamation chez eux était le délai de livraison, quelque soit le canal (téléphone à la hotline, chat, e-mail, appel direct au restaurant avis), mais ce qui est paradoxal, c'est que le "trop en avance" était aussi sanctionné !
Chez Disney, l'expérience client est un facteur clé.
Chaque employé (employé, cadre..) passe par une ou plusieurs journées "traditions".
Ce programme est très complet car il comprend :
- l'histoire de Disney & Walt Disney,
- les valeurs de cette entreprise si unique,
- la visite des parcs,
- les tests de produits
- ...
J'ai vu des gens pleurer en regardant les vidéos présentées lors de ces journées.
Tout ceci permet de vivre émotionnellement l'expérience client, connaitre ce qu'est un "magical moment" (ou moments de vérité dans la relation client).Ainsi, comment est-il possible qu'un conseiller clientèle résolve bien un souci client dans le digital, s'il n'a pas lui même testé le produit , ou au moins passé une commande test, ou si ses superviseurs lui imposent une cadence de traitement de tickets et d'appels sans personnalisation et sans possibilité de sortir du cadre ?
De même, dans certains sites de e-commerce, plateformes Cloud... je vois encore assez souvent le numéro de téléphone bien caché au fin fond du site ou il faut passer par une base de connaissances indigeste.
Certaines marques hésitent à déployer le chat car elles ont peur d'augmenter le taux de contact (nombre de contacts, appels, mails... / nombre de commandes), et de devoir déployer une armée de chargés de clientèle.
Donc oui il faut rendre autonome le client afin de lui permet de chercher l'information sur un site mais cela doit se faire sans devoir fournir un gros effort (cf indicateur taux d'effort comme le CXi).
Mais c'est une mauvaise idée si c'est un parcours du combattant pour être aidé lorsque l'on a besoin.Il y a énormément de leviers, d'outils, d'actions à mener... mais il faut le faire AVEC ses employés, et si c'est bien pensé, on peut commencer à parler de WOW dans l'expérience client dans le digital.
Disney est souvent cité comme une des référence dans l'Expérience Client, est ce que tu pourrais nous donner quelques piliers de cette stratégie ?
J'adore la marque Disney, et ce que Walt Disney a construit via ses parcs mais aussi en culture d'entreprise.
En terme d'expérience client, ils ont un rôle de modèle.J'ai travaillé à Disneyworld en Floride pendant un an (car c'était un rêve) , et à Disneyland Paris pendant 7 ans.
C 'est vrai que les américains ont une tendance plus naturelle au sourire, au service qu'en France.
Aux États-Unis, nous avions de la part des managers plus de remarques positives et plus de remarques extrêmement positives que n'importe quelle culture au monde. Et c'est particulièrement vrai en comparaison à la France.
Par exemple, les managers américains vous feront trois remarques positives pour chaque remarque négative.
Ils utiliseront des termes comme "fantastique" ("fantastic") et "génial" ("awesome").
En France, même le merci a parfois du mal à être dit.
On râle longtemps d'abord, et après la courtoisie arrive.
Mais, je pense que les temps changent.
Les entreprises qui s'intéressent vraiment à la QVT (qualité de vie au travail) comme Disney, peuvent vraiment se démarquer dans l'expérience client.
Pour moi Expérience Client (CX) et Expérience Collaborateur (EX) sont intimement liés.Disney a par exemple un cast "regonition day".
La formation pour "empower" chaque employé à prendre des décisions au service des clients (les guests) est très importante aussi.
On ne parle pas de Customer Experience mais de guest expérience. Cela veut tout dire !D'autres pilliers de la stratégie différenciante de Disney sont dans les "Fours keys of service"
- La Sécurité : mais ça ne s'applique pas aux entreprises digitales.
- Je le remplacerais par la confiance en la marque, la réassurance.
- La courtoisie, incluant le sourire, le respect de tous les guests quelque soit l'âge et l'handicap.
- Il y a encore de la marge de progression en France, mais nous y arrivons petit à petit !
- Le spectacle : Disney fait attention à chaque détail même ceux imperceptibles aux yeux des visiteurs.
- Par exemple chez Frichti pour chaque commande , ils envoient une petite carte de visite de remerciement avec un mot écrit à la main.
- Efficiency : réduire le temps d'attente au téléphone, dans la queue, faire en sorte qu'on crée de la valeur pour le client...
- Par exemple "J'ai faim et je veux que ma pizza arrive à temps, chaude, pas renversée". Ou, "je teste un panier Too Good To Go, et je veux m'assurer que je n'aurais pas des produits complètement périmés, sachant que c'est un panier surprise", ...
On parle souvent aux USA de "Customer Care", quelle est la différence avec la notion de "Service Client " ?
Au fur et à mesure de toutes mes expériences, que cela soit chez Disney, à la Redoute, chez Just Eat ou dans de plus petites startups, je préfère parler de customer care, d'happiness hero, de customer happiness expert, de customer delivery helper... que de conseiller clientèle, d'agent ou de superviseur dans la relation client !
C'est un détail... mais ça change tout !
Si une startup ou une toute jeune PME se lance sur un marché concurrentiel, la satisfaction clients n'est pas suffisante.Si je vais sur Google Translate : happiness = bonheur
C'est pourquoi, je préfère le mot "Customer care" à service clients. "Care" en anglais, c'est notamment "prendre soin de".Donner du bonheur (des émotions) au client est bien plus différenciateur et permet de faire de la rétention avec ses clients, surtout dans le e-commerce, le digital.
Un client, on le chouchoute. Chaque entreprise devrait se dire que son service clients est le plus attentionné du monde, que sa communauté est tellement importante à ses yeux.
Construire un département customer care de choc n'est pas une question de gros budgets, messieurs mesdames les chefs d'entreprises.
J'ai vu de nombreux chargés de clientèle être saoulés par les réponses types, de parler comme des robots au téléphone et ils avaient raison.
Pour les traitements par e-mail, les macros font gagner du temps, certes, mais on peut utiliser des GIF, des emoji, ou prendre son téléphone pour résoudre un problème de manière plus efficace et humaine, au lieu de faire des vas et vient d'e-mails.
Un client est un être humain avant tout, avec ses émotions, ses désirs, ses envies quelque soit son budget.La personnalisation est importante.
Et c'est encore plus le cas avec les jeunes de la nouvelle Generation Z, où la quête de sens et la communication priment.
Aussi, le bonheur, le "care", cela se partage.
Selon une étude de l'Institut Gallup, seuls 9% des salariés français se disent " engagés ", c'est à dire impliqués, proactifs, créateurs de valeur pour leur entreprise .
Une grande majorité des actifs (65%) effectuent leurs tâches sans s'impliquer outre mesure.
Ils sont physiquement présents mais leur cerveau et leur cœur sont ailleurs.
Quand on a le titre d'agent de service clients, ou de chargé de clientèle, cela voudrait dire qu'on ne se charge que des clients, et on applique des process.
Il y a un vrai team spirit à avoir quand on travaille sur ces postes là et la reconnaissance de l'humain est ultra importante.
Autre exemple , Calcul du "taux de merci" : la marque Michel Et Augustin qui elle calcule désormais son " taux de merci ".
C'est à dire le nombre de personnes qui les ont remerciés pour avoir pris en compte et solutionner leur problème. Il avoisine aujourd'hui 18% en moyenne.
Vous voulez en savoir plus ?
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Voici son interview complète :
Vous pouvez aussi lcontacter Délia Figueira sur Linkedin .
Délia est passionnée par l'expérience client dans le digital, et toutes les startups qui ont un impact social et solidaire. Ella a été formée à l'école Disney où le travail d'équipe, la réactivité et la créativité centrée sur l'excellence de l'expérience du guest (client), étaient les maîtres mots. Elle a travaillé un an en Floride et 7 ans à Paris en tant que business development manager à l'international.
Elle a offert ses services et compétences pendant 4 ans chez Allo Resto (Just Eat France), en aidant la startup à devenir Just Eat sur les problématiques d'expérience client et de customer success
Ses autres références sont rueducommerce, La redoute, M6 boutique.