Par Jérémie Lorrain : Dans son dernier ouvrage "Nouveaux propos sur le bonheur", Georges Botet Pradeilles aborde le thème tant mystérieux de la plénitude de l'être humain. Il décrypte la place du bonheur dans une société toujours plus matérialiste et de moins en moins spirituelle. Comment décrocher le bonheur et orienter son développement personnel dans la "bonne" direction quand les valeurs et les relations deviennent de plus en plus floues?
De son analyse, l'auteur retient que la nouvelle génération a tendance à se lasser de chaque situation et moins profiter de ce qu'elle possède. S'enfermant dans une psychose permanente, l'être humain moderne devient hypocrite et pervers. Se pose alors la question de savoir comment atteindre cet état tant désiré de bonheur? L'auteur fait état des situations passées et actuelles pour confronter les problèmes présents face à ce dilemme. L'abondance de nouveautés n'entraînerait-elle pas un éloignement toujours plus marqué vis-à-vis du bonheur ?
Toutes les possibilités qui s'offrent à nous ne font que compliquer les choses. Bien loin sont les histoires d'amour d'antan. On ne se marie plus avec la fille ou le jeune homme du quartier. Les relations sont maintenant multiples et courtes. L'être humain devient capricieux et complexe.
L'accélération certaine du déroulement de nos vies nous pousse à nous installer dans de petits moments de joie éphémères. C'est à celui qui se fait le plus remarquer, en recherche de reconnaissance, de séduction et de pouvoir. Nous sommes pressés et n'allons plus au bout de nos projets. Beaucoup prétendent alors avoir atteint le bonheur alors qu'ils en ont juste l'apparence.
Ce que l'on retient dans cette œuvre, c'est la capacité de l'auteur à proposer une réflexion interne sur sa quête du bonheur. Il nous offre une vision de notre société et de ses individus perdus à travers tous les choix qui se présentent. Est-on seul sur le navire ? Est-on réellement heureux ou est-ce uniquement une façade projetée envers la société ? Cette dernière nous apporte-t-elle le soutien que l'on nécessite ou joue-t-elle simplement de notre méconnaissance du bonheur?
Il est aussi important de ne pas considérer le bonheur comme un sentiment acquis mais bien au contraire un état à poursuivre constamment. Aussi, se contenter des choses simples facilite l'adoption d'une mentalité plus apte au bonheur durable.
Autre constat intéressant fait par cet ouvrage : le bonheur des uns ne fait pas celui des autres. Être heureux et le montrer fait des envieux. Est-il alors judicieux de partager son bonheur avec autrui ou faut-il le protéger des malveillants? Georges Botet Pradeilles aborde la question de manière détaillée et nous fait part de ses compétences psychologiques pour expliquer ses comportements étranges de l'être humain. De plus, son analyse s'étend à travers l'évolution de notre société moderne et s'appuie sur des réflexions philosophiques du bonheur pertinentes.
À quel point doit-on désirer le bonheur ? Et une fois atteint, que faire de ce plaisir instantané ? Toute cette agitation du monde moderne ne vient-elle pas gâcher notre plénitude plutôt que de l'agrémenter ? Être aimé et avoir du succès est-il suffisant ? " Nouveaux propos sur le bonheur " apporte un condensé de connaissances sur le sujet que peu des centaines d'ouvrages disponibles peuvent nous fournir.
La bonne nouvelle: l'accès au bonheur est gratuit.
Le titre " Nouveaux propos sur le bonheur " fait référence à la réflexion philosophique et littéraire d'Emile Chartier dit " Alain " qui écrivait en 1928 " Sur le bonheur " avec cette conception de l'homme dans une spiritualité toujours présente au-delà de ces réductions comportementalistes ou psychologisantes qui semblent nous satisfaire aujourd'hui...
Comment peut-on encore poser la question du bonheur dans notre époque matérialiste où l'individu lui-même devient un objet d'usage quasi consommable que l'analyse scientifique tente de réduire par une modélisation de ses conduites ? Le bonheur, il suffirait de recettes et d'un bon vouloir... Ou de l'un de ces thérapeutes dont la profusion et la diversité étonnerait nos anciens.
Mais l'acteur économique, l'être social, l'individu engagé dans sa vie affective, semble pourtant parfois désemparé malgré toutes les excellentes leçons dans un monde dont les repères symboliques traçant les appartenances et les partages de vie et de mort s'effacent peu à peu.
Que reste-t-il des bonheurs d'antan ? Que nous réserve cet avenir moins guerrier mais porteur de violences sournoises souvent destructrices ? Alfred de Musset prétendait que les deux grands secrets du bonheur étaient le plaisir et l'oubli.
Georges Botet Pradeilles ouvre sans cesse un questionnement sur cette nature intime du bonheur qui échappe au souci d'apparences de ce Moi que notre époque voudrait beau, fort et quasiment éternel. Peut-on vivre heureux dans cette illusion où il importe davantage de paraître que d'être ?
Chacun pourra trouver là ses repères au fil d'une lecture où l'acuité de la réflexion laisse souvent place aux déconstructions salutaires de l'humour. Rester désirant et serein avec cette intelligence de plus en plus nécessaire qu'exige notre époque trace au fil des propos une ligne entre pragmatisme et sagesse. L'auteur nous rassure et nous encourage en professionnel averti de l'accompagnement d'autrui...
Il n'y a ni méthode ni leçon à retenir, mais peut-être seulement une écriture décapante qui permet de mieux lire le monde déroutant d'aujourd'hui...