Au fil des ans, j’ai essayé et accumulé plusieurs types d’orthèses. La plupart sont pour les blessures. J’ai aussi des orthèses plantaires ainsi que des bagues pour prévenir les hyperextensions de mes doigts. Comme rien n’est simple avec le syndrome d’Ehlers-Danlos, même les meilleurs orthèses, même celles que j’ai dans un but préventif, je ne les porte pas toujours.
Premièrement, parce que c’est impossible de tout porter en même temps (comme en fait foi cette photo).
©Photo Shanny 2017
Deuxièmement, parce qu’en général, porter une orthèse crée des problèmes secondaires. Quelques petits exemples : porter l’orthèse de genou bleue rigide me blesse la peau des deux jambes, me force à marcher et m’assoir différemment, et je finis donc par me blesser à l’autre jambe aussi. Après quelques heures à porter mes bagues, je finis habituellement par enfler et devoir les enlever. Supporter mon bras en écharpe suite à une dislocation me blesse au poignet (sans compter les blessures en raison de la compensation de l’autre bras).
Au printemps et à l’été 2017, j’ai entendu parler des vêtements compressifs. Très populaires en France pour traiter le syndrome d’Ehlers-Danlos, présumés aider avec nos problèmes de proprioception et soulager les douleurs également. Une dame que je connais via Facebook m’a fortement recommandé de les essayer, car elle en avait depuis peu.
Au printemps 2017, donc, je me suis acheté des gants compressifs génériques à la pharmacie, dans l’espoir de soulager mes douleurs dues à l’arthrose. Il s’agit de petits gants aux bouts des doigts coupés…. mais ils ne sont pas très serrés. J’ai cru ressentir un soulagement lors de grosses crises, mais minime. Évidemment, même si peu serrés, si j’ai une crise de douleur neuropathique, je n’arrive pas à les tolérer.
Quelqu’un m’a recommandé CDRM, une compagnie québécoise, pour des gants de meilleure qualité. Ils sont spécialisés dans les vêtements pour grands brûlés, mais ont eu plusieurs clients avec le SED, alors j’avais bon espoir. J’ai pu discuter au téléphone avec quelqu’un qui m’a aidé à choisir le bon produit. C’était près de 85$ pour une paire de gants noirs à bouts ouverts (ce n’est pas couvert par le gouvernement bien sûr, car ce n’est pas essentiel, rien que pour soulager la douleur).
Malheureusement, c’est bien trop serré pour moi et si, lors d’une crise de douleur arthritique, ça me soulage sur le coup, après quelques minutes le bout de mes doigts est bleu/mauve et froid (le syndrome de Raynaud n’aide en rien), et si je décide d’endurer malgré tout… la douleur neuropathique se réveille rapidement et je dois les enlever au plus vite. J’ai essayé de les porter plusieurs fois, depuis plus d’un an, et c’est chaque fois un échec, à ma grande déception.
Je dois ajouter que porter des gants comme ça tout le temps n’est vraiment pas pratique ni hygiénique. Quand on a un système immunitaire pourri, comme moi, qu’on doit souvent se laver les mains, c’est pas idéal d’avoir du tissu qu’on ne peut pas laver souvent (même si je les lave tous les jours… même si je les enlève avant d’aller aux toilettes… j’aurai serré la main de quelqu’un, touché au panier d’épicerie, flatté le chat, etc.) C’est vraiment pas pratique pour préparer les repas non plus. En prime, j’ai déjà de la difficulté avec ma motricité fine, mais si en plus j’ai ces gants compressifs, j’ai de la difficulté à bouger mes doigts, alors j’échappe tout. Et si je force pour serrer les doigts, ça me coupe la circulation (syndrome de Raynaud, encore et toujours).
Encore un exemple où les conditions s’auto-pelure-de-bananisent.
Toujours au printemps 2017, j’ai aussi décidé de réessayer les bas de compression. Un médecin me les avait prescrits il y a longtemps, alors qu’on croyait que je faisais des chutes de pression (et non un syndrome de tachycardie orthostatique postural), dans l’espoir d’éviter que je m’évanouisse à rester debout. (note : même avec le POTS, les bas de compression sont souvent une bonne idée).
Je n’avais vu aucune amélioration à l’époque et je tolérais mal les bas… sans compter que j’avais énormément de difficulté à les enfiler avec mes doigts hyperlaxes. Cette fois-ci, je voulais surtout les essayer pour m’aider avec ma proprioception et ma douleur, et EN PLUS, peut-être que ça aiderait avec mon POTS. Comme je devais porter une botte de marche sur mon pied gauche (et donc, un bas au genou en dessous pour raison d’hygiène et pour ne pas m’irriter la peau), je pensais combiner l’utile à… l’utile.
J’en ai commandé quelques sortes différentes, des plus serrés, des moins serrés. Jolis, si possible. Je savais que si c’était des bas beige au look de grand-mère je ne les porterais simplement pas. Y a assez de trucs que je fais parce que je suis responsable et tout, j’ai mes limites, ha!
Certains bas étaient tout simplement trop serrés, ou un peu trop longs, roulaient un peu derrière le genou et causaient un garrot et me coupaient la circulation.
D’autres étaient très confortables… trop. Pas assez serrés!
J’en avais quelques paires qui étaient parfaites. Je ressentais une sensation de soutien, et je jurerais que j’avais moins mal… cependant, après quelques heures, inévitablement, mes douleurs neuropathiques prenaient le dessus et je devais les enlever en vitesse, incapable de les supporter plus longtemps!
Puis j’ai eu la chance de rencontrer Carine de chez EC3D, une autre compagnie québécoise. Mon physiatre m’avait recommandé leur stabilisateur d’épaules il y a déjà plusieurs années, mais comme c’est très cher et que mes épaules n’allaient pas trop mal, on attendait un meilleur moment. Parce que ces vêtements compressifs non plus, ne sont pas remboursés par le gouvernement. Les orthèses rigides, oui. Mais pas ce qui est en tissu (sans baleines de métal, par exemple), ni ce qui est préventif. Sauf les fameux bas de compression…
La connaissance de FB dont je parlais plus haut m’a également parlé de EC3D, et a mentionné qu’ils étaient très intéressés à aider les personnes avec le syndrome d’Ehlers-Danlos. Alors j’ai appelé, et pris rendez-vous avec la même personne.
Ce fut un rendez-vous super agréable. Effectivement, Carine avait fait ses devoirs, avait bien retenu ce qu’elle avait appris de ses rencontres avec les autres zèbres, et était très intéressée par le SED. Elle posait les bonnes questions et jamais je n’ai senti qu’elle était là pour me vendre des produits : elle voulait M’AIDER, sincèrement. D’ailleurs, il est arrivé qu’elle me suggère des produits d’autres compagnies, quand elle pensait que c’était ce dont j’avais besoin.
Elle m’a fait essayé quelques produits, m’en a montré quelques autres.
J’ai acheté un corset (bande abdominale… que je vois comme un soutien dorsal… 80$) et deux “manchons” de compression pour les poignets. Ça ressemble aux trucs que portent les joueurs de tennis pour la sueur, haha! C’était vraiment pas cher, à peine 10$ chacun.
Ça fait un an que je les ai, et sincèrement, c’est ce que j’utilise le plus! Il arrive souvent que je sente une douleur aux poignets, que j’aie une subluxation. Quand ça arrive, j’enfile un ou les deux manchons, et c’est juste assez pour me donner une petite stabilité supplémentaire. Ce n’est pas encombrant, ça ne m’empêche pas de me laver les mains, ne coupe pas ma circulation. Bien sûr, ça aussi, après un certain nombre d’heures, je dois les enlever, car ça finit par m’irriter la peau (un peu comme la taille d’un pantalon trop serré ou un bandage élastique). Mais je les tolère beaucoup mieux que le reste.
©EC3D
Pour ce qui est du corset, il est presque bien. Il est très difficile pour moi de l’enfiler, parce que c’est un tissu élastique, et que comme c’est compressif, il est très serré. Donc il faut tirer très fort sur le matériel pour arriver à l’attacher. Avec mes poignets et mes doigts aussi faits en élastique, c’est pas génial. Une fois attaché, le corset va des hanches jusque sous les seins. Évidemment il a tendance à rouler (de bas vers le haut, du haut vers le bas). Idéalement, on le met avant les pantalons et le soutien-gorge. Ce qui n’est pas un gage de stabilité. C’est pourquoi ils ont placé deux petites bretelles… qui ne sont pas élastiques du tout, très minces, et dans un drôle d’angle (sur mon corps en tout cas). Elles m’irritent la peau comme c’est pas possible et me font mal aux épaules. Donc soit je les endure un certain temps, puis je regrette de les avoir utilisées, soit je ne les utilise pas, et ça roule, et je finis par l’enlever. Je suis convaincue que Carine pourrait ajuster le tout, changer les bretelles; elle m’avait indiqué qu’ils pourraient faire des modifications au besoin. Ce n’est malheureusement pas le seul problème.
Quand je le porte, je trouve en général que mes maux de dos sont un peu moins intenses et je me sens plutôt bien. Je ne me sens pas étouffée, comme je craignais.
Par contre, je ne tolère pas le corset longtemps, le zipper et les coutures marquent ma peau de façon horrible. Et, bien sûr, ça ajoute une couche sous mes vêtements, moi qui passe l’hiver avec une simple camisole et une veste parce que je passe mon temps entre «trop chaud» et «trop froid». Quand j’ai le corset sous ma camisole ou mon t-shirt, j’ai souvent trop chaud, et ça augmente le risque de syncope.
J’ai aussi décidé d’acheter le fameux stabilisateur d’épaules, l’item principal pour lequel j’avais décidé d’aller chez EC3D!
©EC3D
Ça fonctionne comme une veste (à manches longues), encore une fois, très difficile à attacher en raison du fait que ça doit être très serré pour être efficace. L’avantage est que c’est totalement ajustable en plusieurs façons (on déplace les différents velcros pour avoir l’ajustement désiré). Il existe aussi des stabilisateurs pour une seule épaule à la fois, mais on ne peut pas, par exemple, acheter deux stabilisateurs simples et les porter ensemble (c’est ce que j’aurais voulu pouvoir faire). Mais on peut ajuster la «veste» de façon à ce qu’un côté limite beaucoup le mouvement, et l’autre pas du tout.
L’idée était que j’aie un stabilisateur pour éviter les subluxations ou dislocations lors d’activités, idéalement pour m’éviter les subluxations en dormant, mais aussi, quelque chose de plus convivial qu’une écharpe suite à une dislocation.
Il y a deux gros problèmes avec ce stabilisateur (pour moi!)
Premièrement, ça ne stabilise pas assez. Pour une personne habituellement en santé et qui s’est blessé, qui doit restreindre ses mouvements, ça va suffire. Pour une personne avec une fragilité aux épaules, afin de minimiser le risque de blessure lors de la pratique d’un sport, c’est parfait.
Mais pour limiter la subluxation chez quelqu’un avec le SED (pour moi, en tout cas), ça ne suffit pas. J’ai essayé d’autres types d’orthèses, et je ne crois pas que l’orthèse qui puisse le faire existe. L’amplitude de mouvement dont mes articulations ont besoin pour se subluxer est minime, et cette veste n’est vraiment pas assez restrictive. Elle ne le serait pas assez pour supporter l’épaule suite à une dislocation non plus.
Inversement, ce serait trop restrictif pour effectuer des activités de tous les jours, dans le seul but de tenter d’éviter les blessures. Je n’ai pas la force musculaire ni l’énergie pour bouger contre cette restriction tout le temps, et malgré tout, ça n’empêcherait aucunement les blessures. Ça empêche les grandes amplitudes, comme de faire de grands arcs avec les bras… mais c’est rarement ainsi que je me blesse! C’est par exemple en me couchant sur le côté, et le seul poids de mon corps fait le reste!
Deuxièmement, vous vous souvenez de mon problème de chaleur avec le corset? On parle ici d’une veste à manche longues! Par-dessus laquelle je suis supposé m’habiller. C’est simplement intolérable. Même en hiver j’étais incapable d’endurer la chaleur. Finalement, tout comme le corset, les plis et le zipper m’irritaient la peau. J’ai dû retourner le stabilisateur.
Au final, le meilleur achat fut le moins cher, soit les manchons pour les poignets (je ne trouve malheureusement pas de lien pour l’achat, sauf pour un produit similaire… la version identique ne se vend peut-être plus).
Comme souvent, on croit avoir trouvé une solution simple et qui fait du sens, mais la mise en application n’est pas toujours aussi simple, en raison de l’ensemble des symptômes et des comorbidités (peau fragile, neuropathie, syndrome de Raynaud, etc.) Il ne faut jamais oublier que ce qui fonctionne pour une personne ne fonctionnera pas nécessairement pour une autre, mais surtout, il faut continuer d’essayer et garder espoir qu’on va trouver la bonne combinaison de traitements!