Jean-Louis GABRIEL : "...L'une des principales innovation de la loi de modernisation du contrat de travail du 25 juin 2008 est la possibilité offerte à un employeur de pouvoir, légalement, expliquer à un salarié qu'il ne veut plus de lui et qu'il doit partir alors même qu'il n'y a aucun motif en lien avec le travail ou l'entreprise à cette décision (la rupture conventionnelle du contrat de travail )
Pour prendre un exemple qui a récemment fait l'objet d'une jurisprudence prud'homale récente, un employeur n'avait pas le droit de licencier un salarié parce qu'il avait changé de sexe.
Il ne pouvait même pas envisager de lui dire qu'il voulait se séparer de lui.
Désormais, grâce à la loi du 25 juin 2008, un employeur qui, sans motif, sans raison valable décide de se séparer d'un salarié pourra le convoquer et lui signifier qu'il ne compte plus sur lui et que son intérêt serait qu'il accepte de quitter l'entreprise puisque sa présence n'est plus désirée.
Certes le salarié n'est pas obligé d'accepter.
Mais rien n'empêche l'employeur de convoquer ce même salarié tous les jours pour lui signifier qu'il ne veut pas de lui et lui demander s'il est d'accord pour partir, et de continuer jusqu'à ce qu'il accepte.
Ce scénario, qui peut paraître irrationnel pour certains, résulte directement de la loi qui définie la rupture conventionnelle du contrat comme découlant directement d'un ou plusieurs entretiens entre la salarié et l'employeur, sans préciser le nombre et/ou la fréquence de ces entretiens.
Pour comparer cet état de fait avec des situations existantes, le salarié auquel on signifie que l'on ne veut plus de lui et que son intérêt est d'accepter la rupture conventionnelle est dans la même situation que celui ou celle dont le conjoint lui annonce qu'il/elle ne veut plus vivre avec lui et qu'il doit accepter une séparation amiable.
Ainsi, la précarité affective introduite dans la vie de couple au-travers des réformes sur le divorce et la légalisation du PACS et du concubinage est transcris dans le cadre de la relation de travail, entérinant ainsi la « désacralisation » du contrat à durée indéterminée qui n'est plus, comme le mariage, synonyme de stabilité et de perpétuité.
Les employeurs se féliciteront de cette possibilité nouvelle qui leur est offerte de pouvoir faire partir un ou une salarié qui, tout à coup, ne lui convient plus.
Les salariés devront subir cette nouvelle source de stress et de précarité dans le cadre de leur rapport avec leur profession.
En tout état de cause les relations de travail sont totalement changées à compter de ce jour puisque le contrat à durée indéterminée peut être remis en cause par l'employeur à tout moment et sans motif..."
Jean-Louis GABRIEL