On raconte de nouveau n’importe quoi dans les médias institutionnels. Certains vont même jusqu’à prétendre que le groupe a négocié un échelonnement de paiement de ses impôts partout dans le monde, et ceci en deux coups de cuillères à pot. Risible et ridicule.
Visiblement la fiscalité est insondable pour le journaliste standard. Reprenons donc bêtement et dans un souci de vulgarisation à l’attention de ceux qui voudraient vraiment savoir ce qui se passe et non pas faire reposer leurs sources sur des sottises de journalistes.
A la base un communiqué très clair de l’UBS du 4 juillet 2008 à 07h00 qui, en français dit ce qui suit: “Dans le cadre des pertes enregistrées à cette date, les résultats du deuxième trimestre comprennent un crédit d’impôt d’une valeur approximative de 3 milliards de francs“.
Philippe Rodrik de la TdG qui n’a jamais dû lire le communiqué ni une loi fiscale annonce ce qui suit: “L’UBS réussit un coup formidable, partout dans le monde où ses revenus sont imposables, à commencer par Bâle, Zurich et l’administration fédérale, l’établissement a sollicité un rééchelonnement dans le paiement de ses impôts. Cette mesure constitue dès lors un crédit d’impôts de 3 milliards de francs”.
Emmanuel Garessus du Temps qui d’habitude est meilleur que ses confrères tombe lui aussi en plein dans le panneau de la facilité: “La grande banque a toutefois obtenu [et donc d'abord demandé...] un crédit d’impôt de 3 milliards de francs, basé sur les bénéfices futurs de l’institut. Sans ce revenu exceptionnel, la perte serait donc de 3 à 4 milliards. Même ce chiffre serait toutefois légèrement meilleur que prévu”. Il invente lui le crédit négocié sur bénéfice futur ce qui est une nouveauté totalement inédite .
La vérité (exemple reposant sur la LIFD - loi fédérale sur l’impôt fédéral direct) mais s’appliquant aussi à tous les cantons est beaucoup plus simple: en 2007 UBS SA a subi une perte comptable considérable. On l’avait annoncé ici il y a déjà fort longtemps (paragraphe 4 du billet en lien du 15 février 2008): elle bénéficierait donc du report fiscal de cette perte. En clair voici ce que dit la loi:
“Article 67 Déduction des pertes
1 Les pertes des sept exercices précédant la période fiscale (art. 79) peuvent être déduites du bénéfice net de cette période, à condition qu’elles n’aient pas pu être prises en considération lors du calcul du bénéfice net imposable de ces années”.
Ainsi UBS SA n’a pas à négocier avec quiconque pour ne pas payer d’impôt en 2008 ni à inventer des crédits sur bénéfices futurs: la loi fédérale et les loi cantonales le lui permettent simplement “en reportant ses presque cinq milliards de pertes réalisées en 2007 sur des bénéfices futurs (compensation comptable de plus et de moins, qui au total font moins que zéro, si on veut vraiment vulgariser), si d’autres pertes ne se produisent pas et ne viennent pas augmenter le report possible”.
Merci aux soi disant spécialistes plumitifs de s’informer correctement et aux bonnes sources et aussi de lire les textes légaux: de temps à autre ça fait du bien, ça renseigne vraiment et on passe pour un peu moins nigaud.