L’arrivée de Donald Trump sur la scène politique américaine et internationale a provoqué une réelle disruption ; une véritable rupture avec les codes de la communication et les stratégies traditionnelles.
Son utilisation massive des technologies 2.0 et particulièrement des réseaux sociaux fait de lui un homme dissemblable, gérant, à sa manière, une guerre informationnelle où la victoire est l’ultime visée. Au cœur de la politique et de l’économie, la parole du Président Américain devient un moyen d’action. Comment y parvient-il ? Quels codes emploie-t-il ? Et quelles stratégies de désinformation utilise-t-il ? C’est bien avant son élection du 8 novembre 2016 que D.Trump a dévoilé sa méthode de communication. Inspirée du monde de l’entreprise, domaine qui lui est bien plus proche et naturel que la politique ,sa communication est stratégique pour un retour sur investissement et une influence certaine. Celle-ci repose toujours sur l’offensive, la subversion et la provocation. En analysant ses discours et ses méthodes, plusieurs experts qualifient ses stratégies d’étudiées et structurées, qui se distinguent par un brin de provocation pour attirer davantage d’attention.
D’une part sur le fond : le choix des quatre piliers choisis par le candidat DT a été bien pensé et réfléchi :
- protéger le territoire,
- promouvoir la prospérité américaine,
- préserver la «paix par la force»,
- faire progresser l’influence américaine dans le monde.
Des sujets qui parlent au peuple Américain et qui touchent la nation dans son ensemble. Un positionnement par le contenu qui rallie le peuple et lui confère une adhésion.
D’autre part, sur la forme, DT utilise des techniques rodées ; il dicte son ordre du jour, emploie avec aisance la storyline, maîtrise la dimension informelle de la communication et dirige une campagne sur mesure. Par ailleurs, il adopte en filigrane des tactiques persuasives; la transgression et l’intelligence émotionnelle.
La première technique consiste à dicter son ordre du jour : Quand Trump souhaite parler d’un point en particulier, il l’aborde sans détour en utilisant les réseaux sociaux ou même lors de ses interventions. Il mène ainsi une guerre informationnelle par le contenu.
La deuxième spécificité de sa méthodologie est la narration (storyline). Faisant un usage stratégique du récit, DT propose une approche à laquelle les Américains peuvent s’identifier. Il construit ses messages dans le corps d’une histoire, il accentue les détails et les propos qu’il cherche à mettre en exergue et utilise des mécanismes neurologiques pour capter l’attention. Un des exemples marquants dans le domaine de l’économie est la sanction que les USA pourraient affliger à l’entreprise Carrier, si celle-ci venait à construire son usine de production au Mexique : « Je prendrai mon téléphone et je dirai au PDG de Carrier, bonne chance pour vos affaires au Mexique, mais désormais, chaque climatiseur produit hors des États-Unis sera soumis à une taxe d’importation de 35%« . Un message sarcastique qui débute par une note positive et qui s’achève par une mise en garde.
La troisième technique utilisée par D Trump est celle de la communication informelle : une communication créant de la spontanéité et un semblant de vraie relation interpersonnelle. Cette technique, toujours inspirée du domaine du conseil et de la communication dans le monde entrepreneurial, permet de conditionner l’auditoire. L’exemple évoqué par les médias est celui du temps pris dans les discours de Trump pour évincer les protestataires de la salle. (« Get them out !»). Trump utilise ce temps de communication informelle pour glisser des messages forts.
Enfin la quatrième technique de DT consiste à faire du sur-mesure. Sa guerre informationnelle repose sur une force d’adaptation, avec un positionnement réfléchi, devant des publics différenciés. Cette approche presque innée chez D Trump, lui a permis de conquérir des partisans. Son exercice de la politique a modifié les méthodes d’affrontement sur les terrains économiques et diplomatiques et ses sujets déclenchent des rapports de force avec une capacité de résonnance réelle.
Sur la forme, la provocation reste la caractéristique la plus prononcée dans la guerre informationnelle menée par le Président Américain. Avec son style osé et provocateur, il fait vaciller plusieurs secteurs au niveau mondial (des places financières avec un indice de la peur agité constamment au commerce international), mais aussi et en conséquence, volens nolens, plusieurs pays. La taxation des importations des panneaux et des machines à laver et celle de l’aluminium et de l’acier sont dorénavant actées, déclarant ainsi une guerre économique à ses partenaires économiques. Les derniers exemples en date (ou ces derniers exemples) sont ceux relatifs aux sorties de D Trump qui veut confirmer le protectionnisme économique américain.
Ainsi, la stratégie de communication repose sur la transgression. D Trump n’a pas de mal à passer outre une entente ou une règle. Une manière de provoquer qui repose également sur l’intimidation en jouant avec l’émotion. DT diffuse ainsi ses sentiments d’hostilité envers les Mexicains en les traitant de ‘violeurs’ et rabaisse les journalistes en les qualifiant de ‘dégoûtants’.
Cette stratégie est déroulée avec brio via un canal de communication dans l’ère du temps. Les réseaux sociaux sont les favoris de celui qui se révèle à la dernière minute. Le choix de mode de communication laisse entendre un positionnement de force et une omnipotence à l’image de son pays. Aujourd’hui, il est question d’une diplomatie par twitter qui lui assure une présence médiatique omniprésente. A la fois pour la gestion de la politique intérieure ou pour la gestion des affaires étrangères, son compte twitter est le reflet de ce qu’il pense ou ce qu’il fait. Il est d’ailleurs suivi par plus de 52 millions de ‘followers’ et ses tweets dictent le fil de l’actualité et ont un effet réel. Par le biais des réseaux sociaux, D Trump recherche non seulement une démonstration de force mais également une forme de réintégration par les sociabilités en cultivant une dimension relationnelle avec son électorat. Les « like » sur Facebook, les recherches Google, les mentions sur Twitter, et les followers, sont autant de leviers gratuits de célébrité.
Nous pouvons donc affirmer que la scène politique américaine a été bouleversée par l’approche performative de Donald Trump, approche non improvisée mais bel et bien étudiée et structurée. La netnographie des contenus liés à la présidence américaine actuelle montre une stratégie de communication subversive fondée sur la désinformation et sur la manipulation.
Khaoula RIFFAI
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