Le Général De Gaulle lors de la Libération.
Ayant voté pour Emmanuel Macron, au second tour de l’élection présidentielle, surtout pour barrer la route à Marine Le Pen, je me suis imposé une cure de silence d’un an à l’égard de la politique qu’il conduit. Par souci de cohérence personnelle, je pensais qu’il fallait lui laisser le temps de développer son programme et d’entrer dans l’action avant d’approuver ou de condamner ces derniers. L’année d’observation est passée. Un premier bilan peut être tiré. Et pour l’homme de gauche que je suis, le compte n’y est pas. Certes, le rayonnement international de la France s’est amélioré eu égard à l’« éclat » individuel du nouveau président et la force de ses poignées de main, mais la politique conduite dans l’hexagone est décevante voire détestable. Et même si l’économie n’est pas tout, même si le chômage n’augmente plus, que la croissance donne des signes d’amélioration, l’attitude générale du gouvernement Philippe consiste à rogner tous les acquis, à remettre en cause en profondeur la charte du Conseil national de la Résistance de 1944. C’est pourquoi il est important de relire cette charte que beaucoup ne connaissent pas ou connaissent mal. De la relire en considérant que presque 80 ans de notre vie sociale et politique a été bordée par cette charte rédigée par des hommes et de gauche et de droite. Emmanuel Macron a voulu nous faire croire à une fable. Il faudra en attendre la conclusion pour en tirer la morale mais nous ne devons nous faire aucune illusion : les citoyens de gauche qui ont voté pour Macron — en tout cas au cours de cette première année — n’ont rien vu pour une amélioration de leurs conditions de vie, de leur pouvoir d’achat…Une véritable démocratie économique et sociale Sur le plan économique il est écrit :« L’instauration d'une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l'éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l'économie; une organisation rationnelle de l'économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l'intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l'image des États fascistes; l'intensification de la production nationale selon les lignes d'un plan arrêté par l'État après consultation des représentants de tous les éléments de cette production ; le retour à la Nation des grands moyens de production monopolisés, fruits du travail commun, des sources d'énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d'assurances et des grandes banques ; le développement et le soutien des coopératives de production, d'achats et de ventes, agricoles et artisanales; le droit d'accès, dans le cadre de l'entreprise, aux fonctions de direction et d'administration, pour les ouvriers possédant les qualifications nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de l'économie. »
Le droit au travail et au repos Sur le plan social, que lit-on ? le droit au travail et le droit au repos, notamment par le rétablissement et l'amélioration du régime contractuel du travail; un rajustement important des salaires et la garantie d'un niveau de salaire et de traitement qui assure à chaque travailleur et à sa famille la sécurité, la dignité et la possibilité d'une vie pleinement humaine; la garantie du pouvoir d'achat national par une politique tendant à la stabilité de la monnaie; la reconstitution, dans ses libertés traditionnelles, d'un syndicalisme indépendant, doté de larges pouvoirs dans l'organisation de la vie économique et sociale; un plan complet de sécurité sociale, visantà assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l'État; la sécurité de l'emploi, la réglementation des conditions d'embauchage et de licenciement, le rétablissement des délégués d'atelier; l'élévation et la sécurité du niveau de vie des travailleurs de la terre par une politique de prix agricoles rémunérateurs, améliorant et généralisant l'expérience de l'Office du blé, par une législation sociale accordant aux salariés agricoles les mêmes droits qu'aux salariés de l'industrie, par un système d'assurance contre les calamités agricoles, par l'établissement d'un juste statut du fermage et du métayage, par des facilités d'accession à la propriété pour les jeunes familles paysannes et par la réalisation d'un plan d'équipement rural; une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours; le dédommagement des sinistrés et des allocations et pensions pour les victimes de la terreur fasciste. Une extension des droits politiques, sociaux et économiques des populations indigènes et coloniales.
L’instruction pour tous les enfants La possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l'instruction et d'accéder à la culture la plus développée quelle que soit la situation de fortune de leurs parents, afin que les fonctions les plus hautes soient réellement accessibles à tous ceux qui auront les capacités requises pour les exercer et que soit ainsi promue une élite véritable, non de naissance mais de mérite, et constamment renouvelée par les apports populaires. »
Ils sont donc nombreux ceux qui veulent remettre en cause cette charte. Des représentants du MEDEF ont souvent protesté contre son contenu, la jugeant d’une autre époque et d’un autre monde. Emmanuel Macron, subtilement, cyniquement, la considère également comme un document dépassé. Sur certains points elle l’est (office du blé, colonies) mais sur d’autres, elle demeure plus que jamais d’actualité compte tenu de ses ambitions — pas toutes atteintes d’ailleurs — et du sentiment d’unité de la nation plus que jamais nécessaire. Je vous invite à méditer ce texte écrit après cinq années de guerre, de sacrifices humains et de destructions massives.